Une manifestation à gérer avec sang-froid
Rongés par la misère et l’exclusion, les jeunes du Sud ont décidé de monter au créneau. Ils marchent aujourd’hui pour dire basta à la «hogra» et interpeller le gouvernement sur cette situation.
Grande inquiétude. La colère du Sud angoisse le Nord. La marche prévue aujourd’hui à Ouargla suscite de vives craintes. Tous les regards sont braqués sur cette région, poumon de l’économie algérienne. Cette fois-ci, les chômeurs de la région créent l’événement. Rongés par la misère et l’exclusion, les jeunes du Sud ont décidé de monter au créneau.
Ils marchent aujourd’hui pour dire «basta» à la hogra et interpeller le gouvernement sur cette situation. Près d’un million de participants sont attendus aujourd’hui à cette manifestation. Décidée par le Comité national pour la défense des droits des chômeurs (Cnddc), cette marche se veut pacifique pour revendiquer leurs droits sociaux. L’emploi figure en tête de liste de la plate-forme des revendications. Certaines parties veulent politiser cette action en évoquant le départ du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et la sécession entre le Nord et le Sud. Face à ces rumeurs, il risque d’y avoir des infiltrations.
Ce qui inquiète sérieusement l’Exécutif. Afin d’éviter un dérapage, un dispositif sécuritaire impressionnant a été dépêché dans le Sud. En plus des mesures sécuritaires, le gouvernement a dégagé tout un plan «Marshall» pour apaiser la tension au niveau du Sud. Crédits bancaires, salaires, le gouvernement a multiplié les recettes.
Pour parer à la colère de la population du Sud, le Premier ministre a convoqué en urgence, dimanche dernier, un conseil interministériel auquel ont participé les ministres de la Formation et de l’Enseignement professionnels, du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, de l’Energie et des Mines, du Commerce, de l’Agriculture et du Développement rural, ainsi que le P-DG de Sonatrach et le directeur de l’Agence nationale de l’emploi (Anem). Parmi ces mesures figure notamment, la lutte contre les disparités salariales relevées chez les sociétés de sous-traitance.
«A l’effet de prévenir toute forme de disparité salariale, les entreprises faisant appel à des prestataires de services pour la réalisation de travaux de toute nature sont tenues d’inclure dans les contrats une clause portant sur l’application d’une grille de rémunérations qui ne saurait être inférieure à 80% de leur grille en vigueur pour des postes similaires», indique une instruction dévoilée par l’APS. Mardi soir, le comité intersectoriel de l’emploi a été mis en place à Ghardaïa. Présidé par le wali, le comité regroupe les directeurs des secteurs de l’emploi, l’énergie et les mines, la formation et l’enseignement professionnels, l’industrie, la PME et la promotion de l’investissement, l’agriculture et le développement rural, le tourisme et l’artisanat, le commerce ainsi que l’inspecteur général de la wilaya, l’inspecteur de wilaya du travail, le chef de l’agence de l’emploi et le chef de l’antenne locale du registre du commerce. S’adressant aux membres du comité, le wali a préconisé une autopsie exhaustive du secteur de l’emploi, «sans complaisance», pour trouver des solutions adéquates répondant aux attentes et aspirations de la population. Le comité, qui doit se réunir chaque dimanche, est appelé à identifier après une minutieuse étude de la situation du développement socio-économique et de l’emploi dans la wilaya, «les points faibles» afin d’apporter des solutions innovantes pour réduire le chômage, a expliqué le wali, M.Ahmed Adli. Par ailleurs, le directeur général de l’emploi et de l’insertion au ministère du Travail, Fodil Zaïdi, a avancé que plus de 4000 recrutements illégaux (qui n’ont pas
transité par l’Anem) ont été enregistrés en 2012 dans les wilayas de Laghouat, Illizi et Ouargla. «Sur ces 4000 recrutements illégaux, 97% proviennent d’autres wilayas», a-t-il déclaré hier, sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale. Une réalité qui dérange sérieusement les jeunes du Sud qui sont livrés à eux-mêmes. Ce responsable de l’Anem accuse les sociétés pétrolières exerçant dans cette région d’être derrière ces recrutements. Pour sa part, le secrétaire général de l’Union générale des travailleurs algériens (Ugta), M.Abdelmadjid Sidi Saïd, a appelé, hier à Hassi Messaoud, à une plus grande implication des acteurs de la Centrale syndicale à la recherche de solutions efficientes à la question du chômage dans le sud du pays.