Les quatre vérités d’Abdelatif Benachenhou sur l’économie algérienne

Les quatre vérités d’Abdelatif Benachenhou sur l’économie algérienne

C’est en tant qu’économiste mais surtout académicien qu’Abdelatif Benachenhou s’est exprimé ce lundi sur l’économie algérienne dont il a passé en revue un certain nombre d’indicateurs de sa mauvaise santé actuelle.

Au forum organisée par le Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (CARE) et la fondation Friedrich Naumann, l’universitaire, avec une liberté de ton qui tranche avec le politiquement correcte ambiant  a été particulièrement critique dans son évaluation des politiques publiques.

En évoquant la problématique des subventions de l’état, il juge que ces derniers sont “excessifs et mal ciblées” ; couplées surtout à un “sous-financement” de secteurs vitaux comme l’éducation et la santé. Il s’agit là pour lui de deux “dérèglements majeurs” des politiques publiques.

Evaluant les politiques engagées dans la sphère du service public, cet universitaire qui faisait partie du premier gouvernement du président Bouteflika mis en avant le fait que ces “dérèglements” essentiels sont enregistrés dans les secteurs de l’éducation, les hôpitaux (santé) et le soutien des prix.

LG Algérie

Alors que d’ordinaire on considère l’Education comme un des secteurs les plus budgétivores, Benachenhou bat en brèche cette idée reçue en soulignant que l’éducation est un secteur “sous-financé” en Algérie.

“L’enseignement supérieur l’a emporté sur l’Education ces dix dernières années, tout simplement parce que la présence politique de l’étudiant est plus importante de celle de l’écolier”, a-t-il regretté.

Le financement des hôpitaux et notamment la prise en charge des malades notamment ceux souffrant d’un cancer  semblent aussi être insuffisant, selon le conférencier.

“Le financement public des hôpitaux représente 80% des financements globaux de ces structures alors que, normalement, c’est l’apanage des caisses de sécurités sociales”, a-t-il fait remarquer.

Avec la baisse du taux de chômage et l’augmentation des salaires en Algérie ces dernières années “pourquoi on ne voit pas les cotisations sociales suivre cette trajectoire”, s’est-il interrogé.

C’est effectivement paradoxal, car plus de cotisant implique automatiquement plus d’argent pour les caisses qui doivent , à leur tour fiancer les hôpitaux. Et pourtant ce n’est pas le cas, comme il le constate à juste tire. Quant aux politiques de subventions, elles sont bien marquées par “l’excès”, a insisté M. Benachenhou.

Les subventions, directes et indirectes, représentent, sans compter celles destinées aux Moudjahidine et aux hôpitaux, 13% du PIB alors que 10% de la population bénéficient de 40% des subventions, a-t-il argué.

Mais pour Benachenhou la priorité des priorités pour les autorités politiques doit être la lutte contre l’inflation. “Une priorité, voire une urgence”, insiste t-il d’autre part, le point qui semble le plus préoccupant pour cet économiste est en lien avec les perspectives du secteur des hydrocarbures dont la production représente 40% du PIB, 70% des recettes budgétaires et 97% des exportations algériennes.

Sur la problématique polémique de l’exploitation du gaz de schiste et des énergies renouvelables en général, il a plaidé pour une “discussion sérieuse entre experts pour définir l’objectif d’un tel investissement, de son coût ainsi que les éventuels partenaires”.

La  politique du tout  social ou la théorie du mille-feuille …

Evaluant les politiques d’emploi mises en œuvre par les gouvernements successifs, l’universitaire a encore pointé du doigt le “niveau exagéré” des exonérations fiscales et des aides financières (l’intervention économique de l’Etat) qui atteignent 6% du PIB annuellement.

Pour Benachenhou, cette politique illustre la “théorie du mille-feuille: chaque gouvernement qui arrive remet une couche (de social) sans enlever la couche précédente”, a-t-il dit.

Le secteur agricole, à titre d’exemple, assiste à une “défiscalisation outrancière et inutile”, selon lui. “Au nom de quoi on dispense d’impôts quelqu’un qui possède une chambre de froid pour la conservation de cerises ou de pommes?!”, s’est –il insurgé .

Même les avantages fiscaux accordés par l’ANDI et l’Ansej, qui ont totalisé 90 milliards de DA en 2011, seraient “excessives”, selon lui.

Evoquant, par ailleurs, la politique commerciale en Algérie, l’ex-argentier du pays a préconisé, une baisse “rapide” des importations, une réorientation de la production énergétique, une relance de la production pharmaceutique et agroalimentaire et un investissement “massif” dans le transport maritime.