Le président de la Commission nationale de promotion et de protection des droits de l’Homme (CNPPDH), Me Farouk Ksentini, qui s’est fait récemment le porte-étendard de la promotion de l’amnistie générale, a-t-il été rappelé à l’ordre après sa récente sortie ?
Ou ce qui est perçu par certains comme un ballon-sonde n’a-t-il pas eu l’effet escompté ?
En tout cas, l’avocat rompu à ce genre d’exercice a assuré, avant-hier soir, en marge d’une conférence sur la démocratie et les droits de l’Homme organisée au siège du Sénat, que ses propos n’engageaient que sa propre personne : “C’est une opinion personnelle. Je ne suis ni un poisson-pilote ni un requin-marteau. J’ai le droit de donner mon avis. Cela n’engage que moi”.
Réputé proche du président de la République et reflétant généralement les orientations du sérail, le président de la CNCPPDH s’était hasardé, lors de son passage à la Radio internationale même, à avancer la période de la tenue du référendum sur l’amnistie générale.
“Je pense que 2010 sera l’année de l’amnistie générale pour tourner la page. Nous avons perdu beaucoup de temps. J’espère qu’il y aura cette amnistie générale. Il faut voir la situation des autres pays. Il n’y a aucun pays ayant connu une guerre civile qui n’a pas fini par une amnistie générale. C’est notre destin, le référendum est sans doute le meilleur moyen pour que le peuple donne son avis sur ce dossier sensible”, avait-il dit.
Cette sortie, perçue dans le microcosme politico-médiatique comme “un avis autorisé”, a fait les choux gras de la presse d’autant que le président de la République, lors de la dernière campagne électorale, avait évoqué l’éventualité d’une consultation populaire autour de ce qui, depuis, ressemble à un projet.
“L’amnistie générale relève des prérogatives du président de la République, moi je n’ai fait qu’émettre un avis personnel”, insiste-t-il.
Il faut relever, soit dit en passant, que cette “reculade” du président de la CNCPPDH, dont l’organisation vient d’être désavouée par une instance onusienne au motif “d’absence d’autonomie”, intervient quelques jours seulement après la sortie du puissant ministre de l’Intérieur, M. Nouredine Yazid Zerhouni, homme lige du Président, lequel a déclaré que le projet de l’amnistie générale n’est pas à l’ordre du jour.
“L’amnistie générale n’est pas dans l’agenda du gouvernement”, a-t-il indiqué aux journalistes. Mais qu’à cela ne tienne, Me Farouk Ksentini juge, par ailleurs, positivement la santé démocratique du pays.
“Ce n’est pas un État militaire ni un État policier, c’est un État débutant dans la démocratie. Les choses évoluent. Et personne ne peut ignorer aujourd’hui que l’Algérie est un État démocratique”, dit-il.
Interrogé sur les cas de dépassements dont seraient victimes les détenus algériens dans les prisons libyennes, Farouk Ksentini s’est dit “déçu”.
“On n’a rien à faire. La Libye est un pays souverain, mais nous déplorons cet état de fait.” Enfin, sur le contenu du rapport sur les droits de l’Homme que sa structure a établi sur nombre de dossiers, comme la réconciliation ou encore les hôpitaux, il a suggéré que la situation est “mi-figue, mi-raisin”. “Y a du bon, mais y a aussi des insuffisances.”
KARIM KEBIR