Les producteurs de boissons alcoolisées arrosent Ahmed Ouyahia de chiffres

Les producteurs de boissons alcoolisées arrosent Ahmed Ouyahia de chiffres
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La sortie du premier ministre algérien sur la filière des boissons alcoolisées au début de l’automne – « je ne vois pas de production locale à promouvoir » – a glacé les professionnels.

Ils finissent par répondre. Par les chiffres. On y apprend que la demande du marché locale est totalement couverte par la production nationale de bières et de vins. Et qu’elle continue d’augmenter en dépit d’une campagne sans précédent de fermeture de bars et de débits de boissons.

« La production nationale de bière et de vin couvre la quasi totalité des besoins de la consommation locale », a indiqué Ali Hamani, président de l’Association des producteurs algériens de boissons (APAB), rencontré dans son bureau à Alger.

« Les brasseurs nationaux, publics ou privés, produisent près de 1,1 millions d’hectolitres de bière, toutes marques confondues. Quant aux vins, la production nationale est de 600 000 hectolitres par an », a encore précisé notre interlocuteur. Il ajoute que le secteur emploie, actuellement, 2500 personnes de manière « directe et permanente ». « Cela sans parler des milliers d’autres emplois indirects créés par les activités de distribution, consommation… ». Les seules boissons importées, précise encore le président de l’APAB, sont « les liqueurs ».

Pourtant, les autorités ont fermé jusqu’à cette année quelques 1200 points de vente, répartis sur l’ensemble du territoire national. « Ces mesures, que nous n’arrivons pas à comprendre, ont provoqué un petit rétrécissement de la production. Mais le plus grave c’est que ces fermetures provoquent plutôt le transfert de l’activité vers les filières clandestines, avec tout ce que cela peut provoquer comme dangers pour la société », a fulminé M. Hamani.

« Nos ventes continuent de garder le même rythme », a expliqué un responsable d’un brasseur privé. Selon lui, dans certaines régions où aucun bar légal n’existe, les ventes clandestines sont très importantes.

« Pas de production locale à promouvoir »

Le plaidoyer du représentant des producteurs de boissons alcoolisés vient faire un écho à distance aux propos hostiles à la filière tenus par le premier ministre algérien. Au détour d’une conférence de presse tenue à l’occasion de la dernière Tripartite de fin septembre 2011 Ahmed Ouyahia, avait lâché une phrase qui a laissé perplexe plus d’un : « Combien de postes d’emploi peut-on créer dans un bar ? Un, deux, mais il faut voir combien de cirrhoses (maladie du foie, ndlr), de bagarres on peut trouver dans un bar (…) Les produits alcoolisés qu’on y trouve sont de marques étrangères. Je ne vois pas de production locale à promouvoir ».

Le premier ministre répondait à une question portant sur la fermeture effrénée des établissements de vente et de consommation de boissons alcoolisées. A Alger, par exemple, certains établissements, dont certains sont réputés, sont toujours fermés pour diverses raisons. A Bab-El-Oued, les propriétaires de la Grande brasserie, située sur le boulevard Lotfi, luttent depuis plus de quatre ans pour l’ouverture de leur établissement. En vain.

« On nous a expliqué que la licence de vente de boissons n’est plus valable », explique un des membres de la famille qui a préféré l’anonymat. L’affaire est toujours pendante devant la justice. Pendant ce temps, les employés de l’établissement sont au chômage.

« Pourtant, ils ne dérangeaient personne », témoigne un habitant du quartier de Bab-El-Oued. « A Bab-El-Oued, il existait plusieurs débits de boissons il y a tout juste quelques années.

Maintenant, il ne reste aucun établissement », peste un jeune du quartier Triolet, sur les hauteurs du quartier populaire. L’administration de la wilaya d’Alger, sollicitée pour réagir, est restée muette sur le sujet. Les rares réponses présentées publiquement parlent d’une opération de « régularisation ». Une opération qui dure dans le temps en emportant avec elle, par dizaines, bars et débits de boissons. « Nous ne demandons pourtant que l’application des lois qui existent », a indiqué encore Ali Hamani qui a exprimé de manière claire « la peur des investisseurs de s’engager dans ce climat d’incertitude ».