Les ménages n’ont pour choix que de se rabattre sur les légumes de moindre qualité Au moment où les fruits et légumes connaîssent une surproduction, les prix, eux, obéissent aux règles du mercantilisme.
Cette équation économique se maintient désespérément hors de portée des petites et faibles bourses. Pourtant, jugées très favorables, les conditions climatiques ont laissé espérer les ménages, à des prix plutôt raisonnables par rapport à l’année précédente, où les fruits et légumes avaient affiché des prix «inabordables», jusqu’à leur pourrissement sur les étals. Cette année, la situation est similaire, pour les fruits et légumes, dont les prix sont, malheureusement très élevés, notamment ceux des légumes de base, comme la pomme de terre, les haricots verts et blancs «Grénnier» et le poivron vert, ou encore la tomate. Cette dernière, de type industriel, destinée à la transformation en concentré de tomate, est mise en vente au même prix que la «Maranande». Des vendeurs ambulants, engagés par les propriétaires, procèdent au mélange de tomate industrielle, (les prix de la tomate industrielle étant soutenu par l’Etat sont fixés à 35 DA/kg). La tomate maraîchère est cédée à 80 DA/kg. Pour le reste des légumes, c’est le wait and see. Car, avec un faible pouvoir d’achat caractérisant plus de 22.000 familles vivant au-dessous du seuil de la pauvreté à Annaba, qui est capable de se permettre une livre d’haricots verts à 180 DA/ kg, les aubergines à 75 DA/kg? L’ail quant à lui, il ne faut surtout pas y penser, 650 DA/ kg, devient facultatif pour la popote. Face à cette flambée des prix, les ménages n’ont pour choix que de se rabattre sur les légumes de moindre qualité, pour ne pas dire ceux de dernier choix, destinés en temps normal à remplir des décharges.
Pour ce qui est des fruits, l’espoir d’une baisse n’est pas permis pour autant. La surproduction, notamment d’abricot, pêche et cerise, a fait que les prix sont calculés en fonction d’une clientèle de premier rang. Cette dernière, jugée huppée de par son pouvoir d’achat, se permet d’acheter un kilogramme de chaque fruit, obligeant les vendeurs à ne plus prêter attention aux faibles bourses, pour ne pas dire de la «classe économique» de par leur faible pouvoir d’achat. A ce titre, il est à noter que plus de 50% de la population annabie, vit avec un salaire de moins de 10.000DA/mois.
Selon Mme Zahar Omar, économiste «les conditions sociales sont le reflet direct des mécanismes économiques et politiques de l’Etat. Et comme nous savons que la politique va dans le sens de la rationalisation à tous égards, l’économie, s’oriente vers la promotion. En d’autres termes, le régime, vise, par des mécanismes, à appauvrir la population à plus d’un titre», a expliqué l’interlocuteur, en mettant en exergue, l’intervention de l’Etat, quant à la mise en place de mécanismes, pouvant, dans cette conjoncture, éviter l’agression du pouvoir d’achat, cela étant plus intéressant que la révision du Smig.
En effet, qui a le courage de se permettre l’achat de ces fruits, qui sont cédés entre 100 DA et 1300 DA? «Il faut être vraiment «barjo», pour acheter la cerise à 1300 DA, je préfère payer ma facture d’électricité avec…», dira une mère de famille.
Le défilé des pères et mères de famille devant ces étals de fruits, les uns salivent, sans pouvoir y goûter, les autres dégustent du regard sans savourer.
Les fruits étant intouchables pour les faibles bourses, les ménages se contentent d’une bouteille de jus. Sans fruits, avec quelques légumes, et un morceau de viande congelée les pères de famille rentrent chez eux. Car, même la viande fraîche ovine est à 1200 DA/kg et 850 DA/ kg, pour la viande bovine.
Trop chère pour une viande des pauvres, autrefois, adeptes de la volaille, cédée depuis plus de 4 mois à raison de 270 DA/kg. N’ayant plus de choix, des milliers de familles sont devenues, aujourd’hui, grandes consommatrices des abats de poulets et carcasses de dindes, une manière de donner du goût à leur cuisine.
Dans ces cas de figure, il vaut mieux changer de régime alimentaire, et devenir végétarien, une manière de réfréner les envies de la crevette grillée ou du merlan en papillote.
«A 2000 DA pour l’un et 1600 DA pour l’autre, où encore 40 DA/kg pour la sardine, il vaut mieux payer un mois de loyer», c’est là la réplique d’une dame, qui, comme elle l’a si bien dit: «Je tourne comme une bourrique depuis plus d’une heure, pour rentrer avec 2 kg d’oignons, 1 kg de pomme de terre et 3 kg de carottes, pour faire du torchi..» ce témoignage laisse présager des jours difficiles.
En effet, nous sommes à cinq semaines du mois de Ramadhan, et ce n’est qu’un avant-goût de ce que sera ce mois sacré.