À Alger comme à Djelfa, les prix cette année sont loin d’être à la portée des personnes à petites bourses. Alors que le rush a déjà commencé pour acquérir le fameux mouton de l’aïd, la spéculation, les intermédiaires et la cherté des aliments du bétail surgissent, ces jours-ci, pour expliquer, comme à chaque fois, une flambée de plus en plus ressentie.
C’est confirmé, l’aïd est fixé pour le 24 de ce mois et l’affluence se fait remarquer dans les marchés à bestiaux, mais la demande est vite confrontée aux prix exorbitants. La fête du sacrifice, un symbole de piété et de générosité, semble acquérir depuis plusieurs années la tendance commerciale très lucrative. Le mouton, dans ces circonstances, n’est plus qu’un rêve pour les citoyens à petite bourse.
Il en existe de tous les choix. Des moutons qui attirent par leur poids et leurs grosses cornes. Ces derniers se valent au prix d’or, et pour l’acheter, le portefeuille doit être extensible et peser lourd.
Une situation qui s’explique par les prix qui n’ont pas seulement doublé, mais parfois triplé, voire quadruplé. À Alger, comme il fait très chaud, les prix aussi ont eu chaud et sont même brûlants. Ils atteignent facilement les 60 000 à 120 000, voire 140 000 dinars.
Récemment, le porte-parole de l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) a déclaré à la presse que cette année, la flambée des prix ne sera pas importante à la veille de l’Aïd el Adha, alors qu’en réalité, les prix sont loin d’être à la portée de tout le monde. Les citoyens se trouvent alors face à un dilemme entre le devoir religieux et l’argent à dépenser pour ce faire.
Pourquoi ces chiffres ?
Djelfa est une région où l’élevage est l’activité commerciale dominante, grâce aux grands espaces dédiés au pâturage. Nous avons visité cette wilaya où le métier du mouwal, autrement dit, éleveurs de bétail, est transmis de père en fils. Ici, durant l’Aïd el Adha, les Hauts Plateaux se transforment rapidement en une Mecque pour les personnes désireuses d’acheter un mouton au prix abordable.
Nous l’avons visité, à quelques jours de cette occasion religieuse, pour témoigner des bruits qui circulent dans ces lieux de vente du fameux symbole de la fête du sacrifice. La flambée des prix n’est toujours pas exclue, un mouton qui se vendait l’année dernière à 30 000 dinars, est actuellement cédé à 40 000, soit une marge de 10 000 dinars. La meilleure qualité est cédée à 90 000 dinars et après de longues négociations, le mouwal descend le prix à 80 000 DA.
Pour comprendre ces prix qui demeurent chers, nous avons parlé à quelques éleveurs, qui ne nous ont pas caché leurs inquiétudes de ce commerce. Le prix des aliments de bétail qui restent chers, les surfaces de pâturage parfois épuisées sans parler des sécheresses, ainsi qu’un autre souci majeur, celui des intermédiaires qui imposent leur diktat pour gagner par la spéculation. «Tout ça fait grimper le prix», ont-t-ils expliqué.
Durant ces jours, l’activité s’intensifie, et les acheteurs en gros se précipitent pour sélectionner la meilleure marchandise. Ici, beaucoup de revendeurs viennent d’Alger.
«Parfois nous ne nous déplaçons même pas en ville, ici et dans ce marché, toute la marchandise se vend à quelques jours de l’Aïd, tellement l’affluence est importante», nous a raconté un éleveur. «Des personnes achètent en moyenne 5 à 10 moutons pour les revendre en ville, en particulier la capitale», a-t-il rajouté. En réalité, ce sont des spéculateurs qui s’enrichissent durant ces jours. Ils revendent leurs marchandises au prix double, dans les quartiers huppés d’Alger.
Pour témoigner, nous avons fait connaissance d’un résident d’Alger, qui habite aux Eucalyptus à l’est de la ville. Ce dernier, habitué de ce marché, et à chaque fois et à l’approche de cette occasion religieuse, il vient conclure des affaires.
Dans toute cette histoire, il semble que le simple citoyen est toujours livré aux lois des spéculateurs et des intermédiaires. Ces mêmes personnes «déplument» des citoyens de plus en plus noyés dans des dépenses sans fin.
M. M.
82 millions pour un bélier de combat : Un mouton au prix d’une voiture !
Les moutons de combat coûtent entre 60 millions de centimes et 84 millions, une passion qui coûte cher mais prend de plus en plus d’ampleur à la veille de chaque fête de l’Aïd Al Adha.
Les discussions tournent ces jours-ci autour de l’Aïd el Adha, du mouton et de son prix. Les enfants quant à eux parlent des combats de moutons. Les passionnés discutent plutôt des paris et des gains financiers de ces combats très particuliers. En effet, à travers le territoire national, certains citoyens se sont découverts une passion et dépensent des sommes incroyablement élevées.
Cette passion coûte cher car pour un grand mouton de combat, il faut dépenser plus de 60 millions de centimes, voire 84 millions, «un mouton au prix d’une voiture», disent certains. Cela se passe en Algérie où les moutons de combat qui remportent des tournois de quartiers sont très prisés.
Plusieurs propriétaires de ces moutons de combat ont évoqué «la popularité» de ces moutons. «Ils sont nombreux à venir nous voir et assister à nos combats de moutons, certains deviennent tellement passionnés qu’ils finissent par devenir des éleveurs eux aussi», ajoute un vendeur, avec son impressionnant mouton devant lui. «Mon mouton a gagné plus de 12 combats. On m’a proposé 72 millions de centimes pour le vendre mais je n’ai pas accepté».
Un autre éleveur nous dit qu’on lui a proposé plus de 84 millions de centimes. Un autre également, interrogé à ce sujet, nous raconte les performances de son mouton qui selon lui, est imbattable. «Vous savez, aucun mouton ne peut battre le mien, à chaque combat où je l’ai engagé il ressortait gagnant». À Alger et à ces combats, on trouve des gens de partout. Il y a ceux de Bab El Oued, d’Hussein Dey et de La Montagne qui viennent pour voir mais aussi défier au passage les autres moutons, c’est ce que nous a expliqué un des éleveurs.
«Des jeunes et des adultes surtout viennent de partout pour assister à ces combats, des fois ils viennent juste pour regarder mais la plupart du temps c’est pour parier mais aussi défier nos moutons». Bien évidemment les éleveurs qui s’expriment ouvertement sur les prix de leurs moutons, évitent de parler des dessous de leurs paris. Quelques-uns exercent cette activité comme «sport de combat» et assument parfaitement ce mode de vie.
Certains passionnés nous affirment que ce n’est pas aussi facile d’élever un mouton de combat. «Ils demandent beaucoup d’attention et de soins après chaque combat». Face à cette nouvelle activité, de nombreux algériens, choqués de la manière avec laquelle ces moutons sont traités, nous confient : «On leur inflige ces souffrances et ce n’est pas normal qu’on les laisse torturer ces moutons sans rien faire.
Notre religion ne permet pas ce genre de pratiques», s’indignent certains citoyens qui voient en cette activité un certain «crime contre les moutons» et la décrient même comme une pratique sauvage qu’il faut interdire.