Le ministère des Finances
A ce rythme de prélèvements sur le Fonds de régulation des recettes, les partis estiment qu’il y a péril en la demeure.
Les chiffres font froid dans le dos. Le recours abusif au Fonds de régulation des recettes (FRR) inquiète sérieusement les partis politiques. Avec un prélèvement de 3000 milliards de dinars en 2014, l’Algérie risque de mettre ses économies à rude épreuve. Devant une facture d’importation qui est en constante augmentation estimée à plus de 60 milliards de dollars et face à la chute des prix du baril du pétrole, le gouvernement aura du mal à assurer l’importation des produits de base. Pourtant, les ministres n’arrêtaient pas d’affirmer qu’avec les recettes du Fonds de régulation, l’Algérie peut assurer ses importations pendant trois ans.
Or, à ce rythme de prélèvement, les partis estiment qu’il y a péril en la demeure. Ramdan Taâzibt, député du Parti des travailleurs ne cache pas ses appréhensions. «Il est tout à fait normal que l’Etat fasse des prélèvements sur le Fonds de régulation des recettes», a-t-il estimé avant de s’interroger: «Qu’avons nous fait de cet argent?». Contacté par nos soins, ce député soutient que si cet argent a été injecté pour améliorer le cadre de vie des citoyens et développer des projets cela ne pose pas de problème. Cependant, il estime que si cet argent est destiné à l’importation, il y a péril en la demeure. L’Etat doit mettre de lourdes restrictions sur la politique du commerce extérieur pour éviter la fuite des capitaux et mettre fin au gaspillage», a insisté Taâzibt. De son côté, Filali Ghouini, député d’Ennahda explique que c’est tout à fait logique que l’Etat procède à des prélèvements avec la chute des recettes d’exportation. Le problème pour lui est que ce Fonds de garantie n’est pas soumis au contrôle du Parlement. «L’ordonnateur c’est le ministre des Finances mais il ne l’a jamais été», a-t-il affirmé en précisant que l’Etat se permet des prélèvements sans qu’il y ait de contrôle ni de compte-rendu.
Or, ce député pense que le recours à des prélèvements aussi importants est dû à l’échec de la politique de gestion de l’Etat. «Cet échec est dû à un mauvais démarrage de l’économie car il n’y a pas une politique économique claire à long terme qui encourage le développement d’autres alternatives», a estimé M.Ghouini. Pour lui, le gouvernement se contente des politiques provisoires sans prendre au sérieux les conséquences. Avec ce rythme de prélèvements du Fonds de régulation des recettes, ce député d’Ennahda craint que l’Algérie n’arrive pas à assurer ses approvisionnements en matière de produits alimentaires pour les deux prochaines années. Même constat partagé par le porte-parole de jil jadid. Sofiane Sakhri explique que son parti a anticipé ses résultats. «L’Algérie a beaucoup de moyens financiers mais elle n’a rien fait pour transformer son système économique basé sur l’importation en un système productif», a-t-il affirmé en précisant qu’il y a un problème de gestion des deniers publics. Les prélèvements sur le Fonds de régulation des recettes pour financer les déficits sont passés de 91,5 milliards de dinars en 2006 à un record de 2965,6 milliards de dinars l’année dernière.
Pour rappel, selon le bilan de la direction générale de la prévision et des politiques (Dgpp) du ministère des Finances, les prélèvements sur le Fonds de régulation des recettes pour financer les déficits sont passés de 91,5 milliards de dinars en 2006 à un record de 2965,6 milliards de dinars l’année dernière. Autrement dit, en l’espace de 14 ans, le gouvernement n’a pas pu développer une économie productrice de richesse pour mettre fin à la hausse des importations qui absorbent une bonne quantité des recettes en devises.