Sardines grillées, frites, poissons vapeur… Les modes de cuisson – rôti, mijoté, frit, bouilli – varient selon les pays, les cultures, les religions. Certaines de ces pratiques comportent-elles des risques ? Cette question était au coeur des 14esentretiens de la nutrition de l’Institut Pasteur de Lille, qui ont eu lieu les 14 et 15 juin dans la cité du Nord. Quelques conseils pour limiter les risques.
- Préférer les cuissons à l’étouffée, à la vapeur, en cocotte
La cuisson des pommes de terre à la poêle entraînerait une perte de vitamine C de 54 % ! En effet, la qualité nutritionnelle des aliments peut être altérée par la cuisson. Certes, le fait de cuire les aliments les rend plus digestes et améliore leurs qualités microbiologiques et toxicologiques.
Mais cela modifie certains minéraux et vitamines. « Les vitamines les plus sensibles sont les C, B9 (acide folique), B1 et B2, E », énumère Frédéric Tessier, chercheur à l’Institut LaSalle Beauvais. Faut-il alors préférer les fruits et légumes crus aux soupes, conserves ou compotes ?
Des travaux scientifiques mettent en avant le bénéfice des végétaux crus, dont laconsommation est très en vogue. Cuits, il vaut mieux consommer les légumes croquants que bouillis. Et récupérer l’eau de cuisson, pour les soupes par exemple. Car les minéraux (magnésium, potassium, calcium) des légumes sont réduits lors de la cuisson dans l’eau.
Les fritures répétées entraînent une perte de vitamine E. Les huiles de friture ne doivent pas être utilisées plus de dix fois et doivent être jetées au-delà de trois mois. La température doit rester inférieure à 180 °C, rappelle le docteur Jean-Michel Lecerf, responsable du service de nutrition de l’Institut Pasteur. Une astuce : certaines épices comme le curcuma ou le romarin limitent la dégradation oxydative de la vitamine E.
- Consommer les grillades avec modération
Le barbecue entraîne la production de composés toxiques, issus des substances amenées par des fumées (qui dépendent de la qualité du bois) et de composés néoformés, contaminants plus ou moins toxiques. Les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), formés lors de la cuisson au bois ou au charbon, ont des propriétés cancérigènes, rappelle l’Agence nationale de sécurité sanitaire des aliments (Anses). Celle-ci conseille de cuire les aliments à la chaleur des braises et non pas au contact des flammes, qui peuvent atteindre 500 degrés. Le mieux est d’opter pour un barbecue à cuisson verticale.
La chute de graisses dans les flammes peut contribuer à former des HAP. Il est recommandé de recouvrir le foyer d’un léger tapis de cendres. Attention aussi aux poulets déjà cuits.
- Eviter de cuire la viande à vif
Mettre un filet d’huile d’olive ou préparer des viandes en marinades réduit les risques. La graisse joue dans ce cas un rôle d’ »isolant ». Des études montrent que les personnes consommant régulièrement de la viande « bien cuite » ont un risque accru de cancer du côlon et du poumon, rappelle le docteur Lecerf.
Privilégier la viande en pot-au-feu ou blanquette, le poisson au court-bouillon. Un accompagnement important en légumes réduit les risques.
Limiter les pétales de céréales, les frites, le pain grillé, certains types de café, qui comportent de l’acrylamide. Cette substance peut se former à la cuisson à température élevée. Le docteur Laurent Chevallier estime que les industrielsdevraient donner la teneur des aliments en acrylamide, « pas forcément sur l’étiquette, mais sur Internet », ce qui n’est pas le cas. Mais n’oublions pas, tempère Jean-Michel Lecerf, que le tabac est la principale source d’acrylamide. Les autorités sanitaires recommandent que des efforts soient entrepris pour minimiserl’exposition à cette substance.
L’acrylamide fait partie des produits « de la réaction de Maillard ». Ce sont des molécules issues de l’interaction entre sucres et protéines, sous l’effet de la chaleur. « Ces produits pourraient participer aux pathologies dégénératives chez les sujets diabétiques et insuffisants rénaux et constituer des facteurs de risques de ces pathologies chez les sujets sains », explique Inès Birlouez-Aragon, chercheuse.
- Oui au micro-ondes
Ce mode de cuisson ne semble pas présenter de risques. « Les températures de cuisson étant inférieures, il y aurait moins de composés néoformés que dans les processus de cuisson classiques », selon le toxicologue Jean-François Narbonne (CNRS). Mais il faut être vigilant sur les contenants et privilégier ceux en verre. Eviter le plastique et, surtout, ne pas réchauffer les barquettes ou aliments recouverts de film plastique, qui peut être riche en phtalates ou bisphénol, substances toxiques.
Pascale Santi