Les médecins estiment que leur ministre n’a pas la volonté de satisfaire les revendications
Au lieu d’ouvrir un dialogue sérieux et constructif, la tutelle a fait dans «l’escalade d’intimidations et mesures coercitives», s’indignent ces médecins.
Courroucés, les médecins spécialistes ont apostrophé le ministre de la Santé, l’invitant à tenir ses promesses. Ces médecins estiment que leur ministre n’a pas la volonté de satisfaire les revendications ni encore moins d’ouvrir un dialogue serein avec les représentants de 8000 médecins spécialistes en grève cyclique de trois jours depuis le 4 mars dernier.
Alors que le système de santé publique «vit sa dernière phase d’agonie, notamment suite à l’instauration de service complémentaire en 1997, qui s’est soldée par une hémorragie considérable du secteur public au profit des cliniques privées, la tutelle affiche une haine et une rancune caractérisées, la première dans les annales des syndicats depuis l’indépendance vis-à-vis de la catégorie des praticiens spécialistes de la santé publique», a déclaré hier, dans une conférence de presse, le président du Syndicat national des praticiens de la santé publique, le Dr Mohamed Youssefi.
Le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Ould Abbès, s’est engagé en octobre dernier, lors de la rencontre de conciliation, à satisfaire la totalités des 7 points portés dans notre plate-forme de revendications en donnant comme garantie et gage de bonne volonté «sa parole d’homme et le feu vert reçu du chef de l’Etat», dixit le responsable du syndicat. Cependant, jusqu’à ce jour, rien n’est fait. «Ou est donc votre parole d’homme Monsieur le ministre?» s’est demandé le Dr Youssefi.
Des milliers d’opérations chirurgicales pour ne citer que cette prestation, «ont été annulées», affirme-t-il. Au lieu d’ouvrir un dialogue sérieux et constructif, la tutelle a fait dans «l’escalade d’intimidations et mesures coercitives», indique-t-il. La période d’avant et durant le déroulement de trois jours de grève, a connu «toute une série de mesures répressives dignes de l’ère du parti unique, qu’on croyait révolue, ont été ordonnées à l’encontre des grévistes», a-t-il estimé. Le 29 février dernier, le ministre de la Santé, à travers son secrétaire général a envoyé une note à ses structures subordonnées. Dans cette circulaire on a instruit les directeurs de la santé des wilayas et d’établissements de santé publique de procéder automatiquement à la retenue sur salaire des grévistes. Le ministère de tutelle a instruit également les walis pour réquisitionner les médecins devant assurer le service minimum.
Le même département à insisté pour qu’on lui communique la liste nominative des grévistes. Ces mesures «rétrogrades vont à l’encontre des instructions du président de la République et les réformes politiques engagées dont on cesse de gloser», souligne-t-il. Tout en dénonçant ces pratiques surannées, le président du syndicat regrette le silence observé par les partis politiques et les ligues de la défense des droits de l’homme car, dit-il, «jamais nos droits les plus électuaires tels le droit de grève, la liberté syndicale et la liberté tout court n’ont été aussi bafoués et piétinés que ces jours-ci». Néanmoins, toutes ces mesures répressives «ne pourront pas nous empêcher de poursuivre notre lutte qui s’inscrit d’abord dans le cadre de la sauvegarde de ce qui reste du secteur public hautement menacé par la disparition définitive», clame-t-il. Par conséquent, à la lumière de l’évolution de la grève entamée le 4 mars dernier, «les étapes de la feuille de route de la contestation tracée par le conseil national en session ouverte seront maintenues». Ainsi, si rien n’est fait, «une grève illimitée succédera à une autre grève de trois jours dont la date de son lancement sera arrêtée par le conseil national prochainement», est-il relevé. «Le service minimum a été respecté et décidé unilatéralement par les syndicats sans que la tutelle ne le demande durant cette grève, qui s’est déroulée dans de bonnes conditions et a été largement suivie a estimé Dr Youssefi.
Ce syndicaliste qualifie «d’allégations mensongères» toutes les déclaration et estimations données par le ministre. Ces affirmations sans fondement, telles la prise en charge des doléances des praticiens spécialistes et l’attribution d’un rappel de 350 millions de centimes-la grève est suivie par 10% de praticiens seulement-«sont vouées aux gémonies ou au lynchage public des grévistes», fait-il savoir. Par ailleurs, le président du syndicat, qui reproche à Ould Abbès de vouloir être juge et partie en déclarant leur grève «illégale» lui lance le défi de «s’asseoir autour d’une table dans le cadre d’un dialogue public».