Le syndicat des professionnels et trois autres organisations de la société civile ont appelé à une nouvelle semaine de mobilisation contre le régime à Khartoum et dans les autres villes.
Les forces de sécurité ont réprimé hier les marches auxquelles ont appelé les syndicats, les leaders de l’opposition et les organisations de la société civile, déterminés à faire partir le président Omar al-Bachir, ont rapporté les médias soudanais qui ont fait état de nombreux blessés par des tirs à balles réelles dans la capitale Khartoum. “Liberté, paix, justice” et “La révolution est le choix du peuple” scandaient les manifestants sortis dans les rues du quartier de Bahari, avant d’être rapidement réprimés, selon des témoins et les vidéos postées sur les réseaux sociaux qui demeurent le seul moyen pour les manifestants face à une féroce propagande officielle et en raison de la chasse aux médias indépendants.
Selon le journal Baj News, Khartoum a opéré un déploiement inédit des forces antiémeute dans la capitale, où les manifestations ont toutes été réprimées depuis le lancement de ce mouvement de contestation le 19 décembre 2018, en réponse à la hausse des prix du pain, avant de tourner à une colère politique contre le régime d’al-Bachir, au pouvoir depuis presque trente ans. Mais les manifestants ont poursuivi leur marche et rassemblement, a rapporté la même source. Appelée “Marche des martyrs”, la manifestation d’hier devrait durer une semaine, selon le communiqué diffusé par une coalition de plusieurs organisations syndicales, politiques et membres de la société civile.
À Omdurman, la police a fait usage de balles réelles, mais la foule a continué à scander “On n’a pas peur, on n’a pas peur”, a rapporté la presse locale. Pour rappel, depuis le 19 décembre, près d’une quarantaine de personne ont péri dans la vague de répression menée par les forces de sécurité contre les manifestants, et des dizaines d’autres ont été blessées, dont certaines par balles.
Près d’un millier de personnes ont été interpellées par les autorités, selon un bilan officiel, difficile à vérifier.
Des journaux se voient partiellement censurés ou interdits de parution carrément, alors que des journalistes sont régulièrement arrêtés ou se voient interdits d’écrire. Acculé, le régime de Khartoum s’en est également pris à des universitaires qui ont ouvertement soutenu ce mouvement populaire, déterminé plus que jamais à mener sa révolte jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’au départ du pouvoir d’Omar al-Bachir.
Outre la capitale et les villes périphériques, la colère a gagné le gouvernorat du Darfour, déjà en proie à un conflit armé depuis des années, a rapporté l’AFP. Des imams ont aussi joint leur voix aux manifestants et ont dénoncé les violences armées contre les civils qui crient depuis 26 jours leur ras-le-bol face au marasme socioéconomique que vit le pays depuis presque cinq ans. Sur le plan régional et international, en dehors de l’Égypte qui a exprimé son soutien au régime d’al-Bachir, les ONG internationales, l’Union européenne et l’ONU ont dénoncé la répression meurtrière dirigée contre les manifestants et exigé qu’une enquête soit ouverte pour juger les responsables de ces abus.
Lyès Menacer