Une fuite de Kadhafi vers le Venezuela a été évoquée hier par le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague.
La Libye est sur le point de sombrer dans la guerre civile au vu des derniers développements qui ont fait des centaines de morts suite aux ordres de tirer à vue sur les manifestants, lesquels auraient même été les cibles de bombardements de l’armée de l’air. Mouammar Al-Kadhafi n’est pas prêt à lâcher du lest pour que la Libye renoue avec le calme.
Il ne recule devant rien pour garder le pouvoir comme l’indiquent ces informations concordantes, rapportées par Al-Jazeera, qui ont fait état de bombardements des manifestants par l’aviation libyenne, hier, en fin de journée. Des avions de chasse auraient été utilisés, selon la même source. Dans la nuit de dimanche à lundi, Kadhafi, par la voix de son fils Seïf Al-Islam, avait carrément menacé les Libyens d’un bain de sang.
“La Libye est à un carrefour. Soit nous nous entendons aujourd’hui sur des réformes, soit nous ne pleurerons pas 84 morts mais des centaines de milliers et il y aura des rivières de sang dans toute la Libye”, avait notamment déclaré le rejeton du colonel dans un discours à la nation, alors qu’il n’occupe aucune fonction officielle. “Nous allons détruire les éléments de la sédition” et “l’armée aura maintenant un rôle essentiel pour imposer la sécurité parce que c’est l’unité et la stabilité de la Libye” qui sont en jeu, a-t-il affirmé sur un ton menaçant, tout en promettant une constitution et de nouvelles lois libérales.
Ainsi, les Kadhafi, qui n’entendent pas déposer les armes, brandissent la menace d’une guerre civile, que Seïf Al-Islam n’a pas hésité à évoquer que “la Libye, à l’inverse de l’Égypte et de la Tunisie, est composée de tribus, de clans et d’alliances. Ce n’est pas un pays avec des partis et ce genre de choses. Tout le monde est donc au courant de ses devoirs. Cette situation risque de nous mener à une guerre civile, semblable à celle de 1936”. Ceci étant, la Jamahiriya, qui est un État sans institutions depuis qu’elles ont été dissoutes par Mouammar Al-Kadhafi, est au bord de l’implosion.
On dénombrait hier au moins 332 morts, selon Human Rights Watch, dont 61 à Tripoli dans la nuit et la matinée d’hier. Les manifestations, qui se limitaient jusque-là à Benghazi, Al-Baïda, Mesrata, Al-Zaouiya se sont étendues hier à la capitale Tripoli où le siège d’une télévision et de la radio a été saccagé, ainsi que des bâtiments publics, des postes de police et des locaux des comités révolutionnaires incendiés selon des témoins.
Près du centre-ville, la “salle du peuple”, où se déroulent souvent des manifestations et des réunions officielles, a également été incendiée et une colonne de fumée s’élevait lundi matin au-dessus de cet important bâtiment gouvernemental, où les pompiers étaient toujours à l’œuvre. Dans le quartier résidentiel de Hay Al-Andalous, le commissariat de police a été incendié dans la nuit. Par ailleurs, plusieurs villes libyennes, dont Benghazi et Syrte, sont tombées aux mains des manifestants à la suite de défections dans l’armée, a affirmé hier la Fédération internationale des ligues de droits de l’Homme, qui avance un bilan de 300 à 400 morts depuis le début du soulèvement. “Beaucoup de villes sont tombées, notamment sur l’est de la côte. Des militaires se sont ralliés” au soulèvement contre Mouammar Al-Kadhafi, a déclaré à l’AFP la présidente de la FIDH, Souhayr Belhassen, citant notamment Benghazi, bastion de l’opposition.
L’ONG, Human Rights Watch, a fait état de son côté, lundi matin, d’un bilan d’au moins 233 morts. À la frontière tuniso-libyenne, les douaniers et policiers libyens ont déserté pendant quelques heures la frontière au principal point de passage entre les deux pays.
“Il n’y a plus de douaniers ni de policiers libyens au point de passage”, a déclaré en début de matinée un douanier du côté tunisien de la frontière à Ras-Jdir situé à une trentaine de kilomètres de Ben Guerdane. La police libyenne a également déserté dimanche Zaouia, située à 60 km à l’ouest de Tripoli, qui est depuis livrée au chaos.
De nombreux diplomates libyens, notamment ceux en poste à Pékin, Londres, Jakarta et auprès de la Ligue arabe ont démissionné en signe de protestation contre la violence dont sont victimes les manifestants. Le ministre de la Justice libyen leur a également emboîté le pas hier après-midi.