A l’heure où le Sud algérien est sens dessus-dessous, les citoyens du Nord ont opté pour une toute autre manière de manifester, un geste désespéré, l’immolation.
Depuis le début de l’année 2013, près de 10 personnes se sont suicidées par le feu pour protester contre le mutisme des autorités à l’égard de bon nombreuse de choses. Ces suicidés ne supportaient plus ni leur marginalisation grandissante de la part des pouvoirs publics ni la non-satisfaction de leurs revendications, pourtant licites à leurs yeux.
Cette manière de se suicider en dit long sur les causes. Ces citoyens ne cherchaient pas seulement à se donner la mort pour cause de non-satisfaction ou de refus, car il existe de bien moins douloureuses manières de le faire, « mais à attirer l’attention d’autrui pour qu’on se réveille et on se révolte contre l’injustice régnante», nous dira un psychologue, A. Amrani.
A cet effet, celle-ci rappellera le cas du jeune Tunisien, Mohamed Bouazizi, lequel s’était immolé, en décembre 2010, devant la préfecture de Sidi-Bouzid, après que les policiers lui eurent interdit de vendre ses fruits et légumes dans la rue, seul moyen pour lui de nourrir sa famille. Dans ce même contexte, elle ajouta que «cet acte, perçu comme un acte de bravoure, n’est plus considéré comme pêché mais procure, au contraire, chez d’autres citoyens un sentiment de culpabilité et de même situation».

A en croire ses dires, cette immolation spectaculaire a ouvert la porte à d’autres jeunes dans le monde arabe.
Avant-hier seulement, une famille a tenté de s’immoler dans la wilaya de Guelma en guise de protestation contre la mal-vie et sa marginalisation quant au traitement de sa demande de logement social déposée il y a quelques années déjà. A Bejaïa aussi, un autre cas de suicide par le feu a été enregistré, mais les raisons sont encore inconnues. La victime, un jeune de 29 ans, originaire de Kherrata, a été aussitôt transférée au CHU de Béjaïa, au vu de la gravité de ses brûlures. Partageant, du moins, les mêmes souffrances, deux autres jeunes de Tizi Ouzou et de Mascara ont mis le feu à leur corps pour dénoncer un cas d’injustice dont ils auraient fait l’objet.
Hiba Benfarès