Des hôpitaux algériens mal gérés, pour ne pas dire moribonds, des dirigeants qui préfèrent se soigner à l’étranger, particulièrement en France. Ce qui fait exploser les coûts. Et susciter des colères, certes contenues, sur ce deux poids deux mesures.
Dans la médecine comme dans la géographie politique : il y a les Algériens utiles pour lesquels on dépense sans compter, et les autres, le lumpen proletariat, sommé de se contenter de ce qu’on daigner lui concéder.
Au moment où les malades de cancer pour ne citer que cet exemple, ont tout le mal du monde pour être suivi et soigné dans nos hopitaux, nos responsables au sommet de l’Etat, n’hésitent pas à aller se faire soigner dans les cliniques suisses, ou françaises. La pratique n’est pas nouvelle, elle date des lendemaine d’indépendance. Au lieu de doter l’Algérie de cliniques et d’hôpitaux, dignes de ce nom – pourtant l’argent ne manque pas -, tous les responsables choisissent de se faire soigner ailleurs, car ne faisant pas confiance à ces hôpitaux pour lesquels ils tressent desl auriers dans leurs discours politiques. Seulement tous séjours ont un coût. Des millions en devises. Peut-être plus, car la Cnas ne communique jamais sur les prises en charge à l’étranger accordées à la nomenklatura.
Premier débiteur, l’Algérie accuse une dette d’environ 20 millions d’euros. Viennent ensuite le Maroc (plus de 10 millions d’euros) et les pays du Golfe (10 millions d’euros), la Tunisie (environ un million d’euros). C’est ce qu’a révélé aujourd’hui, 15 octobre, le journal français Le journal du dimanche (JDD).
Ces révélations arrivent en un moment où la Caisse nationale d’assurance sociale algérienne (CNAS) a démenti l’information faisant état de l’existence de dette algérienne auprès des hôpitaux étrangers. A contrario, du côté de l’Hexagone, cette affaire est révélée dans un moment de crise aiguë dans la Zone euro. Cette dette concerne spécialement les séjours effectués par des responsables algériens dans des unités hospitalières européennes. Abdelaziz Bouteflika a séjourné plusieurs fois à Paris, notamment à l’hôpital militaire du Val-de-Grâce, où il a été admis. Selon d’autres informations, le chef de l’Etat algérien, fréquente ces établissements plusieurs fois par mois. Il serait atteint d’une maladie incurable.
Tous les frais médicaux générés par les soins des responsables algériens devaient être honorés par l’argent du contribuable. Un contribuable, lui, bien entendu sommé de se soigner en Algérie. Car n’ayant ni les moyens ni les entrées au sommet de l’Etat pour décrocher le sésame lui permettrant une prise en charge à l’étranger.
« C’est une vieille histoire, l’AP-HP est un outil diplomatique pour la France. Des dirigeants étrangers viennent se faire opérer chez nous. On va les chercher à l’aéroport en ambulance toutes sirènes hurlantes, on leur dispense des soins de qualité et on ferme les yeux sur les factures qu’ils n’acquittent jamais« , se plaint Patrick Pelloux, le célèbre urgentiste syndicaliste, rapporte le journal. Après les soins prodigués au président malien par intérim, c’est le président mauritanien qui séjourne actuellement dans un hôpital parisien après le coup de feu qu’il a reçu dimanche à Nouakchott.
« Il y a dix ans que nous essayons de mettre cette ardoise sur la table. En vain. Mais ce qui était toléré devient moins supportable en période de course aux euros, pointe Loïc Capron, médecin syndiqué et président de la commission médicale d’établissement (CME) de l’AP-HP, le parlement des blouses blanches. On fait payer par les assurés sociaux pas toujours fortunés les créances de gens aisés« , appuie Patrick Pelloux, selon la même source. Il est vrai que les hôpitaux français sont pour la plupart endettés et de fait soumis à une rigueur économique draconienne.
A propos du cumul de cette dette, la réponse de l’un des responsables de ces hôpitaux est significative. Pour lui, des intérêts s’entrecroisent. A comprendre que les soins de Bouteflika en France nous ont coûté probablement « des milliards de dollars de pots-de-vin« , a souligné un médecin algérien. « Des intérêts croisés sont en jeu. Le gouvernement ferme les yeux au nom du prestige de la France« , a annoncé un chef de service aux Hospices civils de Lyon à JDD. Cela expliquerait les positions algériennes notamment sur des questions diplomatiques. Depuis l’arrivée de Bouteflika aux commandes, les entreprises françaises ont raflé plusieurs marchés dans divers domaines.Et depuis quelques semaines, il y a un semblant de frémissement entre Alger et Paris, notamment avec la perspective de la visite du président français en Algérie.
Yacine K./Siwel