Les États-Unis ont-ils commencé à mettre concrètement en oeuvre en Libye la nouvelle «doctrine Obama» en matière d’intervention militaire extérieure après leurs échecs en Irak et en Afghanistan? En visant hier, le bureau de Kadhafi, le détruisant complètement, les avions de chasse de l’Otan en voulait à l’évidence à la vie du guide libyen ou du moins l’effrayer suffisamment pour le pousser à l’exil afin d’éviter un enlisement du conflit et compléter leur stratégie en Libye, voire dans toute la région
Selon les experts militaires, la précision des frappes laisse penser que le commandement militaire de l’Otan aurait eu recours aux drones US, ce qui signifie que l’on est passé à une autre étape de la guerre en Libye , après l’opération de promotion médiatico- diplomatique en Europe et notamment en France , du leader autoproclamé du Conseil de la résistance nationale libyenne.
Les Etats-Unis, qui ne veulent pas laisser complètement le champ libre au duo Sarkozy-Cameron « des soustraitants », semblent mettre en place une stratégie qui va à l’encontre d’une guerre d’occupation mais en laissant tout de même à leurs alliés, au sein de l’Otan les interventions à terre que l’on prépare déjà avec l’envoi de conseillers militaires et du renforcement de la présence des forces spéciales qui agissent discrètement aux côtés des insurgés libyens.
Encore faut-il se demander, si l’on peut parler encore d’insurgés libyens au moment où des informations fiables commencent à filtrer sur les préparatifs entamés dès novembre pour faire chuter Kadhafi ?
Car et au vu de la chronologie des événements le soulèvement général contre le leader libyen, comme veut le faire croire la propagande occidentale relayée par Al Jazeera , devenue instrument de guerre des pays du Golfe pour étouffer le renouveau démocratique arabe , n’a pas eu lieu, à l’exception de la région de Benghazi.
D’après les révélations du réseau Voltaire, dont les analyses percutantes sont fiables et contrairement à ce qu’affirme la propagande occidentale et au romantisme révolutionnaire d’opérette de Bernard- Henry Lévy, la révolte de Cyrénaïque n’a rien de spontanée. Elle a été préparée, selon lui, par la Dgse, le MI6 et la CIA.
Pour constituer le Conseil national de transition, les Français se sont appuyés sur les renseignements et les contacts de Massoud El-Mesmari, l’excompagnon, chef du protocole et confident, de Kadhafi qui a fait défection en novembre 2010 et a reçu asile à Paris.
Il ajoute que comme solution de rechange et pour « rétablir la monarchie, les Britanniques ont réactivé les réseaux du prince Mohamed el-Senoussi, prétendant au trône du Royaume de Libye, actuellement réfugié à Londres, et ont distribué partout le drapeau rouge-noirvert au croissant et à l’étoile », tandis que les États-Unis ont pris le contrôle économique et militaire en rapatriant de Washington des Libyens en exil pour occuper les principaux ministères et l’état-major du Conseil national de transition.
Ces informations sont corroborés par les derniers développements de la situation puisque et comme par hasard le prétendant au trône libyen vient de donner une conférence de presse à Bruxelles, pour rappeler au monde son existence et faire accessoirement don de sa personne.
Ainsi et contrairement à ce qu’on a voulu faire croire les médias occidentaux et leurs relais au Proche-Orient qui assomment les opinions publiques arabes, il n’a jamais été question de voler au secours du peuple libyen mais bel bien de » dégager » Kadhafi et ses fils pour occuper, par le biais d’un régime croupion, la Libye et piller ses richesses.
En ne se mettant pas au devant de la scène, Obama a agi de main de maître, soucieux de préparer sa réélection, de préserver son image de Nobel de la paix tout en gardant quasiment intact la bonne image qu’il veut entretenir au sein du monde arabomusulman. Son habilité a été de soustraiter le dossier libyen par le duo Sarkozy-Cameron.
Le président Sarkozy, un chef d’État inconséquent dont le seul souci, comme on le constate de jour en jour et de se faire réélire coûte que coûte et quels que soient les moyens. D’ailleurs pour Dominique de Villepin, l’ancien chef de la diplomatie française, Sarkozy ne doit pas faire du conflit libyen « une affaire personnelle » au risque de s’engager dans une guerre longue, un enlisement à l’irakienne ou à l’afghane.
Au moment où le duo Sarkozy- Cameron projette une visite à Benghazi, à « l’invitation » du Conseil national de transition libyen (CNT), Dominique de Villepin, estime que Sarkozy ne doit pas faire ce déplacement. » Quel serait le signal envoyé, soit par David Cameron, soit par Nicolas Sarkozy, soit par les deux derrière le message d’espoir adressé à des rebelles ou à des insurgés? » s’est interrogé l’ancien Premier ministre français.»C’est qu’ils feraient de cette guerre, à partir de cet instant-là, une affaire personnelle », a-t-il poursuivi.
« La guerre, ce n’est jamais une affaire personnelle. Nicolas Sarkozy lierait son sort politique à la situation de la Libye? Ça veut dire que Mouammar Kadhafi pourrait devenir alors l’arbitre de l’échéance électorale française », a jugé Villepin, soulignant que : « L’affaire libyenne, nous n’en sommes peut-être qu’au début.
Cette affaire peut durer longtemps », a-t-il prévenu, avant de se demander si la France doit prendre le risque de rentrer dans une guerre longue, dans une surenchère qui est susceptible de s’élargir à l’ensemble de la région? « N’allons pas jouer Tintin en Afrique une nouvelle fois en Libye », « Ne nous prenons pas pour Rambo », a insisté l’ancien chef de la diplomatie française. »L’Irak nous a montré le chemin, l’Afghanistan nous montre le chemin, ne jouons pas les fiers-à-bras, ne jouons pas les libérateurs », a-t-il lancé.
Mokhtar Bendib