Les fondamentalistes partent à la conquête du pouvoir,Feront-ils chou blanc en Kabylie?

Les fondamentalistes partent à la conquête du pouvoir,Feront-ils chou blanc en Kabylie?
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La Kabylie est un bastion imprenable pour les islamistes...

Cette région d’Algérie, qui cohabite de manière sereine avec la religion musulmane, reste un bastion imprenable pour les partis islamistes.



L’Alliance pour l’Algérie verte (MSP, En Nahda et El Islah), à laquelle ses concepteurs prédisent un destin national après le 10 mai 2012 en anticipant les résultats des législatives, fera probablement chou blanc en Kabylie. Cette partie de la terre d’Algérie, où sont implantés des partis qualifiés injustement et subjectivement de régionaux alors qu’ils ont toujours privilégié l’unité nationale réserve traditionnellement ses suffrages au Front des forces socialistes qui a symbolisé dans les premières années de l’indépendance (1963) l’opposition au pouvoir central incarné par l’ex-parti unique et un peu plus tard avec l’avènement du pluralisme politique au Rassemblement pour la culture et la démocratie.

Ces deux formations politiques ont pratiquement fait jeu égal lors des élections législatives de 1997. 20 sièges pour le FFS et 19 pour le RCD en affichant une suprématie totale dans cette région. Ce fut plus compliqué quelques années plus tard avec des abstentions alternées pour chacune d’entre elles dictées par une conjoncture politique particulière. Revendications identitaires (officialisation et enseignement de tamazight…) et surtout la période du «printemps noir» qui a pratiquement paralysé la vie économique et politique, notamment à Tizi Ouzou et Béjaïa et qui s’est soldée par 126 victimes en majorité des jeunes qui ont laissé leur vie dans des affrontements d’une violence extrême avec les forces de sécurité.

C’est schématiquement les principaux événements qui ont profité aux partis traditionnels (FLN, RND, Parti des travailleurs et à un degré moindre aux indépendants en rupture de ban avec leur parti d’origine). Ils ont ouvert une brèche pour s’installer durablement sur l’échiquier politique kabyle laissé en vacance tantôt par le RCD tantôt par le FFS, parfois par les deux en même temps alors qu’ils paraissaient indétrônables du moins dans cette région, ce qui n’a étrangement pas été le cas pour les partis islamistes et plus particulièrement le Mouvement de la société pour la paix qui s’est imposé comme la troisième force du pays ainsi qu’à l’ex-parti dissous, le Front islamique du salut, qui avait pourtant le vent en poupe au début des années 1990. Pourquoi?

Il y a sans doute un contexte historique lié à des formes d’organisation sociale qui ont constitué un rempart aux thèses extrémistes de tout bord. Il faut dire que dans ces conditions il n’y avait pas de place pour l’Islam radical, de surcroît instrumentalisé politiquement en Kabylie où les traditions et la pratique de la religion musulmane font bon ménage depuis de nombreux siècles sans qu’il ne soit porté atteinte aux libertés individuelles. Chaque village kabyle a son saint et sa mosquée.

Leur organisation sociale répond à des codes bien précis hérités de la nuit des temps. La vie économique est structurée par les travaux des champs, l’élevage, la cueillette des olives… Elle symbolise la rudesse des montagnards du Djurdjura, de l’Akfadou ou de celle de la vallée de la Soummam. Les conflits et les litiges sont gérés par une assemblée, thajmaath, constituée de sages, qui fonctionne de façon démocratique.

Ses décisions sont respectées sans rechigner et évitent de faire appel aux institutions, qu’incarne un pouvoir central dont s’est toujours méfié le peuple kabyle qui a de tout temps résisté farouchement à toutes les tentatives d’invasion. La religion, reléguée à un rôle spirituel, se retrouve de facto éloignée des considérations idéologiques et du coup protégée. Il faut rappeler que la Kabylie, qui est réputée pour sa tolérance, a vu, ces dernières années, des réactions hostiles à la pratique d’autres cultes. S’il faut ajouter à cela que les partis islamistes se sont prononcés pour une transcription du berbère en langue arabe alors que la question identitaire est considérée comme sacrée et non négociable, on comprendra l’augmentation du capital de rejet que leur ont témoigné les électeurs de cette région.

C’est probablement là une forme de réponse qui s’esquisse pour expliquer que la Kabylie est un bastion imprenable pour les islamistes…