Le texte est peu clair, ambigu dans certaines de ses dispositions, donnant lieu à plusieurs interprétations dans d’autres et, de surcroît, sans mode d’emploi.
L’avancée du chantier de rationalisation des importations en ce contexte de crise connaît des difficultés. En clair, le gouvernement a prévu d’instituer des licences d’importation à partir de 2016 pour freiner l’envolée des importations.
Un volet important du plan anticrise décidé en décembre 2014. En ce sens, après consultations de plusieurs parties, débats et approbation du texte par le Parlement, la loi a été promulguée le 29 juillet 2015. Contre toute attente, le texte paraît peu clair, ambigu, susceptible de donner lieu à plusieurs interprétations. Les articles 3 et 6 de la loi en constituent un exemple : “Des mesures de restrictions quantitatives et/ou qualitatives et/ou des mesures de contrôle des produits peuvent être appliquées dans les conditions prévues par la législation et réglementation en vigueur (article 3). Des licences d’importation ou d’exportation de produits peuvent être instituées pour administrer toute mesure prise en vertu des dispositions de la présente loi ou des accords internationaux auxquels l’Algérie est partie prenante. Les règles relatives aux procédures de licences ou d’exportation doivent être neutres dans leur application et administrées de manière juste et équitable. (…) Des mesures de restriction peuvent être mises en œuvre notamment aux fins de conserver les ressources minérales épuisables conjointement avec l’application de ces restrictions à la production ou à la consommation… (article 6).” L’essentiel n’y figure pas : les modalités d’application de cette mesure. Comme à l’accoutumée, la loi renvoie à des textes d’application. “Les conditions et les modalités d’application des régimes de licences d’importation ou d’exportation de produits sont fixées par voie réglementaire.” Du coup, rien ne transparaît sur l’orientation de la loi. Les intentions du précédent ministre du Commerce : la priorité du producteur sur l’importateur, les quotas par produits. Ce qui fait dire à un fin connaisseur du commerce extérieur, M. Boudehri : “Ce texte est inapplicable.” Cet écran de fumée sur la nature des futures restrictions à l’importation semble en fait le résultat d’une absence de consensus sur la question, les lobbies de l’import-import restant très influents. Assistons-nous à un revirement du gouvernement ? La déclaration récente du ministre du Commerce laisse entendre que le champ d’application de cette loi sera très restreint. La licence d’importation touchera cinq produits, a-t-il affirmé. Alors qu’il était prévu au départ une liste élargie. Si on suit les propos du ministre rapportés par la presse, la licence d’importation n’aura donc pas un grand impact sur l’évolution de nos importations. Que de déclarations alors, que de temps perdu pour un texte inapplicable et pour un instrument dont on a limité les effets. La question de la licence d’importation pose un problème de gouvernance. Alors que le dossier est éminemment important sur la voie de la rationalisation des importations, les pouvoirs publics ont observé un silence étonnant sur les inquiétudes d’observateurs de la scène économique quant à la capacité de l’administration à garantir un traitement équitable et transparent des dossiers de licences d’importation soumis par les opérateurs. Pas d’écoute également des spécialistes qui ont mis en garde sur les difficultés à appliquer une telle mesure. Il aurait été plus judicieux d’appliquer la réglementation sur les normes datant de 2005 pour freiner les importations et garantir l’introduction de produits de qualité, sains ou conformes aux normes.
K. R.