La Tunisie, l’Algérie et le Maroc se sont dotés chacun de programmes de développement des énergies renouvelables (EnR) et chacun des pays a développé une expertise dans un segment précis : photovoltaïque en Algérie, éolien au Maroc, chauffe-eau solaire et d’efficacité énergétique en Tunisie. Un échange d’expertise entre les entreprises des trois pays s’avère « très bénéfique » pour le Maghreb, souligne l’expert Boukhalfa Yaïci.
L’Algérie prévoit de produire 12000 MW d’énergie verte d’ici 2030, le Maroc aspire à atteindre 6000 MW à l’horizon 2020 tandis que la Tunisie s’est fixée l’objectif de 3000 MW à réaliser en 2030. Cela représente une capacité de 30 GW à installer, avec un taux allant de 40% à 42 % du total de leurs besoins en électricité. Ces programmes de développement des énergies renouvelables (EnR) constituent un créneau d’échanges « important » pour les entreprises maghrébines, relève l’expert Boukhalfa Yaïci. D’autant plus que chacun des trois pays s’est distingué dans un segment précis.
Les Algériens ont une longueur d’avance dans le photovoltaïque (PV) mais ils ont beaucoup à apprendre de l’expérience tunisienne en matière de fabrication des chauffes-eau solaire et d’isolation thermique. Les entreprises marocaines peuvent apporter leur savoir-faire dans l’industrie éolienne. Les entreprises maghrébines auront ainsi « plus d’opportunités à se développer dans un marché plus vaste », a expliqué Yaïci à Maghreb Emergent, en marge d’une rencontre sur l’investissement dans le domaine des EnR, organisé jeudi soir à Alger par la chambre de commerce et d’industrie Algéro-Allemande (AHK). Les entreprises maghrébines spécialisées dans les EnR auront également de grands atouts pour se développer en exportant leurs produits et services vers les autres pays de l’Afrique où l’électricité est « très chère » , dit-il encore.
Des échanges trop modestes
L’expert, qui vient de lancer son cabinet de conseil, EnR Engineering Services, a relevé, sur un autre plan, que l’interconnexion maghrébine en matière d’électricité a procuré des avantages techniques et économiques « substantiels ». Il s’agit du secours instantané de puissance à chacun des réseaux dans des situations difficiles, la réduction du coût de production par la mise en commun de la réserve tournante. Dans cette même optique, il souligne que le passage au palier de 400 kV entre l’Algérie et le Maroc en 2009 et bientôt entre l’Algérie et la Tunisie est à même d’assurer le transport et le transit de plusieurs milliers de MW.
Mais « malheureusement » les échanges intermaghrébins restent modestes (5% des capacités disponibles entre l’Algérie et la Tunisie et 16% entre l’Algérie et le Maroc). Boukhalfa Yaïci suggère, d’autre part, aux Etats maghrébins d’aider les entreprises locales activant dans le secteur des EnR en imposant la « part locale » obligatoire sur les projets et de protéger leurs produits à travers les droits de douanes. Il propose aussi de supprimer ou du moins réduire la TVA sur les produits locaux et d’augmenter les tarifs de l’électricité. Les gouvernements maghrébins devraient en outre favoriser l’implantation des entreprises internationales dans leur pays en adoptant des réglementations « attrayantes ». L’expert a mis l’accent surtout sur la nécessité de développer la R&D en créant des passerelles entre les universités et les entreprises.
Farouk Djouadi, Maghreb Emergent