Où est passé Sidi Saïd ? » ; « Pourquoi ne vient-t-il pas écouter nos doléances ? » ; « Que fait-il pour défendre l’honneur bafoué des travailleurs ? ».
Plus de 150 travailleurs de Sonatro étaient hier à leur 10e jour de sit-in au siège de la centrale syndicale à Alger, à se poser ces interrogations douloureuses.
« Nous sommes à notre 10e jour de grève et Sidi Saïd ne s’est pas encore manifesté. Qu’il vienne nous recevoir », réclame Tebizi Mohamed, membre du syndicat de l’entreprise Sonatro.
Ils revendiquent le départ de l’actuel directeur général par intérim de Sonatro accusé de « mauvaise gestion » et la réintégration des 320 travailleurs licenciés, dont 22 membres syndicaux, depuis avril dernier.
Ces ex-travailleurs forcés au chômage technique n’ont pas encore reçu leur salaire de plusieurs mois.
Des salaires qui, faut-t-il le préciser, ne leur permettent pas de joindre les deux bouts.
Plus de la moitié des ouvriers licenciés habitant loin de la capitale ont déjà regagné leurs pénates les poches vides.
« Nous sommes dans le désarroi total. On est en plein Ramadhan, la veille de l’Aïd et la rentrée scolaire a débuté aujourd’hui (hier, ndlr). On n’a pas touché nos salaires depuis plusieurs mois. Ils veulent nous affamer en ces temps de rentrée sociale », fulmine un travailleur, hors de lui.
Depuis leur licenciement ces travailleurs, pour la plupart des pères de famille, ne sont pas convaincus par le discours officiel prônant le sauvetage des entreprises publiques en difficultés.
« Ahmed Ouyahia, Premier ministre parle de Sonatro à l’APN comme un fleuron de l’économie nationale. Mais, on est toujours dehors. On demande notre réhabilitation. On refuse de rester les bras croisés.
Nous voulons simplement reprendre notre travail », ajoute un autre cadre syndical. « C’est une véritable politique de paupérisation », entonne une voix raillée d’un autre protestant.
Selon les syndicalistes, le DG par intérim de Sonatro a redoublé d’acharnement contre les travailleurs au lendemain de la dénonciation sur les colonnes de la presse de la mauvaise gestion de cette entreprise.
« Ils ont voulu vendre en catimini l’entreprise avec la complicité des responsables de l’UGTA et de SGP travaux publics. Il n’y a qu’à voir le chute vertigineuse de son chiffre d’affaires de 400 milliards de centimes en 2004 à 70 milliards de centimes en 2009 », dénonce Sedi Mohamed, un autre membre du syndicat de l’entreprise.
Sonatro croule également sous une dette étouffante de l’ordre de 5 milliards de centimes, soulignent-ils. A en croire ces travailleurs grévistes, la direction de l’entreprise cherche à leur mettre la muselière.
« Le DG par intérim installe des commissions ad hoc, grâce auxquelles des travailleurs et des syndicalistes sont mis à la porte », explique M. Tebizi.
Les ouvriers parlent même d’une mort programmée de leur société, leur gagne-pain. « En raison de la mauvaise gestion due à l’incompétence des dirigeants, notamment le directeur général par intérim, plusieurs marchés confiés à l’entreprise ont été résiliés », regrette, amer un syndicaliste.
Après avoir sollicité en vain les hautes autorités, les travailleurs étaient déterminés à « camper » devant le siège de l’UGTA.
« C’est injuste de pousser à la porte des pères de famille, dont la majorité ont une trentaine d’années d’expérience. Aujourd’hui, si je commets un crime contre ces responsables, de grâce ne me qualifiez pas de terroriste. Ces responsables poussent les gens aux extrêmes », tonne un travailleur licencié au comble du désespoir.
Hocine Lamriben