Si les Algériens votent, massivement, le 10 mai prochain, lors des élections législatives, la vie politique connaîtra un nouveau départ, plus légitime et plus démocratique
Après Chems Eddine Bouroubi, imam à Alger, et qui dirigeait paisiblement une association caritative spécialisée dans les mariages collectifs et les circoncisions pour enfants démunis, Abou Bakr Djaber el- Djazaïri vient de lancer une fetwa appelant les Algériens à aller voter massivement.
Pour l’éminent érudit algérosaoudien, installé en Arabie saoudite, depuis plus d’un demi-siècle, d’obédience wahabite pure et dure, «il faut contrecarrer les plans de ceux qui veulent du mal à l’Algérie» en votant et «en serrant les rangs contre les promoteurs de la fitna».
D’autres imams à Alger et, ailleurs, dans les grandes capitales emboîtent le pas au ministre des Affaires religieuses, Bouabdallah Ghlamallah, en vantant les bienfaits de la participation active aux élections, malgré les limites tracées pour les mosquées, qui doivent être tenues loin du champ du temporel. Ainsi, la religion s’est subrepticement saisie des législatives, et même si cela fait le jeu des autorités qui font du forcing pour que la participation atteigne au moins 40 ou 50 % des inscrits, il y a réellement un risque de retour de flammes.
Car, dans l’autre camp, celui des partisans du boycott et de l’abstention, il y a aussi recours au fetwas. C’est ainsi que le duo, Abassi Madani-Ali Belhadj, vient de diffuser un communiqué dans lequel il stigmatise les législatives, revient sur celles de 1991 et affirme que quels que soient les résultats, elles ne pourraient changer quoi que ce soit dans le système, ni donner une «quelconque légitimité» au gouvernement élu.
Al-Qaïda au Maghreb na pas été en reste, loin s’en faut, s’en mêlant jusqu’au cou pour inciter au boycott. Et c’est Abdelmalek Droukdel, luimême, qui s’affiche sur une vidéo de 21 minutes pour appeler au boycott, en affirmant qu’«il n’y a rien à attendre de ses réformes, ni des élections législatives, à part donner du crédit aux autorités et légitimer une politique de fait».
Aqmi a appelé à plusieurs reprises à une révolte en Algérie et regarde, aujourd’hui, avec inquiétude l’adhésion des Algériens à la vie politique et les nouvelles réformes entamées depuis avril 2011. Pour Aqmi, si le peuple vote, il donne du crédit aux autorités, et c’est là une éventualité qui ne fait pas le jeu d’Al-Qaïda au Maghreb.
Plusieurs autres chefs d’Al-Qaïda avaient essayé d’inciter les Algériens à provoquer une révolution en Algérie : Abou Youssef El-Annabi, Abou Yahia El- Libi, Abdelmalek Droukdel, et même Aymane az-Zawahiri.
Fayçal Oukaci