Les Egyptiens se préparent à affronter les Algériens comme ils peuvent, même en préparant des… slogans. Connus pour leur tradition «orale» qui fait qu’ils ont toujours été très forts dans la rhétorique et dans les dissertations théoriques, les habitants du pays des Pharaons veulent plus que jamais être fidèles à leur propension au verbiage en rivalisant de génie et d’ingéniosité pour trouver les slogans les plus succulents, les plus truculents et, surtout, les plus attentatoires au moral des Algériens, tout en veillant à ce que l’habillage soit dépourvu de vulgarité (encore heureux !).
«Bitoul, bel aârdh ! Han’guib Jazayer ardh !» n’a pris aucune ride
A tout seigneur, tout honneur ! Le slogan maître reste celui utilisé depuis des années, voire des décennies déjà et qui n’a pris aucune ride depuis : «Bitoul, bel aârdh ! Han’guib Jazayer ardh !» (en long et en large, nous mettrons l’Algérie à terre). C’était déjà le slogan longtemps scandé avant le fameux match d’il y a vingt ans entre l’Egypte et l’Algérie, avec également la qualification pour la Coupe du monde comme enjeu. Bien sûr, ce jour-là, au Cairo Stadium, c’était surtout le gardien de but El Hadi Larbi qui avait été mis à terre et la sélection algérienne dans son sillage. Comme il s’agit de l’Algérie, ce cri de guerre reste toujours valable.
Allusion pernicieuse au français
Autre slogan nouvellement sorti en prévision du match du 14 novembre : «Mesrawi aâref maânaha ! Ya Jazayri iwaâ tensaha !» (je sais ce que c’est que d’être égyptien, ne l’oublie pas, toi l’Algérien). C’est surtout un slogan qui est apparu après les deux victoires inattendues et miraculeuses réalisées par l’Egypte successivement au Rwanda et en Zambie et qui l’ont remise en selle pour la qualification. Le sens de la «créativité» des Egyptiens a atteint un degré tel de perfidie qu’un slogan pernicieux et sournois a également fait son apparition dans le hit-parade ces derniers jours : «Bel aârabi, bel faransawi ! Mountakhab masr ha yefdhal aâli !» (en arabe ou en français, la sélection d’Egypte restera au firmament). Inutile de préciser que l’allusion à la langue française est une manière d’indiquer que les Algériens sont plus français qu’arabes. Sans commentaire.
Saqa inspire les slogans, Saâdane aussi
Alors que le onze qui va participer au match se précise, les slogans se font plus personnalisés. Ainsi, la perspective de voir Abdelzaher Saqa prendre la place de Wael Gomaâ, suspendu contre l’Algérie, a inspiré un groupe de supporters qui a sorti : «Barakat wa Saqa wa Saïd ! Wal khamsa haterjaâ min jedid !» (Barakat, Saqa et Saïd, le quintuple va revenir de nouveau). C’est, bien sûr, une allusion aux cinq buts encaissés par l’Algérie en 2001 (5-2), dont un inscrit par Saqa. Rabah Saâdane est également associé à un slogan : «Saâdane qoul al haq ! Masr ahaq walla la !» (Saâdane, dis la vérité : l’Egypte est plus méritante ou non). Dans la foulée des «gentillesses» envers l’Algérien, on peut citer également le fameux «Elaâb ya masri wa werrina ! Ma techmatch Al Jazayer fina !» (joue, toi l’Egyptien, et amuse-nous, ne laisse pas l’Algérie rire de nous).
«Habba habba, tata tata ! Al Jazayer hatchil talata !» fait fureur
Cependant, les slogans qui tiennent le top du hit-parade sont au nombre de deux. Le premier a été créé après la victoire de l’Algérie contre le Rwanda et les statistiques qui en ont découlé et qui ont montré que l’Egypte doit gagner par 3 à 0 pour se qualifier pour la Coupe du monde. «Habba habba, tata tata ! Al Jazayer hatchil talata !» (petit à petit, l’Algérie repartira avec trois buts) est le tube à la mode dans tous les stades égyptiens à l’occasion des matchs de championnat. De la côte méditerranéenne au fin fond du désert, de la Mer rouge au delta du Nil, les Egyptiens reprennent ce slogan à satiété, en faisant le leitmotiv absolu durant la soirée du 14 novembre prochain. C’est un peu le «et 1, et 2 et 3-0 !» des supporters français après la finale du Mondial-98, mais à la sauce égyptienne où le piment n’est pas le moindre des ingrédients.
«Mesrawi mesrawi ! Aboutrika haydalaâ Gaouaoui !» au top du hit-parade
Le deuxième slogan à la mode est aussi personnalisé car mettant en opposition la star égyptienne, Mohamed Aboutrika, au gardien de but algérien, Lounès Gaouaoui : «Mesrawi mesrawi ! Aboutrika haydalaâ Gaouaoui !» (Egyptien, égyptien, Aboutrika va se jouer de Gaouaoui). Connaissant la place qu’occupe le meneur de jeu d’Al Ahly dans le cœur des Egyptiens et les craintes (au plan sportif) qu’il inspire aux supporters algériens, c’est le meilleur épouvantail que les supporters égyptiens peuvent brandir pour tenter d’intimider les Algériens. Tout ceci n’est qu’une guerre de paroles sur un terrain où il n’y a ni arbitres ni délégué de la FIFA. Dis-moi ce que tu chantes, je te dirai qui tu hais. Comme on dit chez nous, parler c’est gratuit. Quant au vrai discours qui paye, c’est sur le terrain.
Par F. A-S.
Musulmans et coptes unis derrière les Pharaons
Il y a beau y avoir un clivage religieux en Egypte entre les musulmans et les coptes (chrétiens), tout s’efface lorsque l’intérêt de Misr oum eddounia est en jeu. Ainsi, les coptes ont profité d’une fête religieuse qui concerne leur communauté pour voir un de leurs leaders faire une prière en faveur d’une victoire et d’une qualification de l’Egypte pour la phase finale de la Coupe du monde de football. Selon des informations de la presse égyptienne non confirmées par une source officielle, les imams auraient reçu une instruction pour adresser une prière vendredi prochain, lors de la grande prière, en faveur d’une victoire de l’Egypte sur l’Algérie. C’est dire que lorsqu’il s’agit de l’Algérie, c’est l’union sacrée.
Un «douktour» en psychologie donne des conseils tactiques
Conscients que la bataille lors du match Egypte-Algérie sera avant tout psychologique, les Egyptiens ont recours aux conseils de nombreux «oustaz», «douktours» et autres «khabirs» pour dire ce que doivent faire les Pharaons. L’un d’eux, Hisham Adel, spécialiste en psychologie, a envoyé une palette de conseils aux joueurs égyptiens. Ainsi, il a indiqué que le match aura trois clefs : ne pas se précipiter pour marquer, ne pas répondre aux provocations adverses «car les Algériens sont très forts dans ce domaine» (sic) et garder son calme même en dehors des terrains en ne répondant pas aux provocations des médias. Le «douktour» a mis l’accent sur le rôle du gardien de but Essam
El Hadary à qui il conseille de ne pas se laisser perturber par quelque événement qui soit. Il s’est même permis de donner des conseils tactiques en estimant que les Egyptiens devraient attaquer davantage à partir du flanc gauche parce que Sayyed Mouawad est connu pour être calme et très patient.