L’augmentation du SNMG de seulement 3 000 DA ne semble pas satisfaire les syndicats tenus à l’écart de la rencontre gouvernement-patrons-UGTA. La persistance du gouvernement à faire de l’ex-syndicat unique le seul partenaire social à la tripartite rend, selon les syndicats autonomes, peu crédibles les décisions qui en émanent. Surtout lorsque celles-ci sont exécutoires quand elles font l’affaire des patrons, et laissées à l’appréciation de commissions spécialisées quand elles portent sur un acquis des travailleurs. Comme c’est d’ailleurs le cas de la révision à la baisse du taux de l’IRG.
La «montagne Tripartite» a accouché en fin de compte de 3 000 DA d’augmentation du SNMG, et de la consolidation du Fonds national de réserves des retraites qui passe de 2 à 3% des revenus des recettes pétrolières.
Ce sommet gouvernement-patronat-UGTA s’est achevé sur beaucoup de promesses, dont le suivi de la mise en application sera assuré par les mêmes groupes de travail mixtes installés lors de la tripartite du 28 mai dernier. Sitôt les interventions préliminaires louant les vertus du dialogue et de la concertation (celle du Premier ministre, celle du SG de l’UGTA et celles des représentants des organisations patronales) terminées, la tripartite a abordé à huis clos l’examen de son ordre du jour qui a porté sur huit points et consisté en l’étude des recommandations des 8 groupes de travail mixtes installés lors du précédent sommet.
LE «MEILLEUR», À SAVOIR LES DÉCISIONS PRISES EN FAVEUR DES TRAVAILLEURS ET DES RETRAITÉS, A ÉTÉ LAISSÉ POUR LA FIN.

Ainsi, cette 14e tripartite a décidé l’augmentation du SNMG de 15 000 à 18 000 DA. La décision prendra effet à partir du 1er janvier 2012, a précisé le communiqué rendu public à l’issue des travaux. «Cette hausse de 20% du SNMG coûtera quelque 75 milliards de DA au budget de l’Etat», a précisé hier à l’issue des travaux le Premier ministre, Ahmed Ouyahia.
Il convient de noter toutefois que cette augmentation restera quasiment nulle d’effet tant que l’article 87 bis du code du travail qui régule les primes et autres indemnités des travailleurs est de rigueur.
Or, et à ce sujet précisément, le communiqué explique que «les entreprises économiques ne pourraient faire face actuellement et sans graves conséquences à une abrogation de l’article 87 bis», assurant toutefois que «la tripartite a décidé de mettre sur pied un groupe de travail mandaté pour évaluer les incidences de la suppression de l’article 87-bis et préparer la prise en charge de cette question dans la prochaine révision du code du travail». Idem pour l’Impôt sur le revenu global (IRG) dont la réduction ou la suppression est à même d’avoir des retombées positives sur les revenus des travailleurs.
Ce point a tout bonnement été passé sous silence par les participants. Il a fallu une question au Premier ministre lors du point de presse qu’il a animé à l’issue des travaux pour que celui-ci réponde qu’»il ne faut plus qu’on attende du gouvernement de baisser un centime d’impôt sur n’importe quel chapitre», arguant que «c’est l’IRG qui intervient pour soutenir les prix des produits de large consommation».
AUGMENTATION DE LA DOTATION DU FONDS NATIONAL DE RÉSERVES DES RETRAITES
Dans le chapitre social toujours, le gouvernement a décidé, lors de cette tripartite, l’augmentation du fonds national de réserves des retraites, créé en 2006 par le président Bouteflika et doté par 2% des revenus de la fiscalité pétrolière. Ce fonds sera désormais «doté par 3% de la fiscalité pétrolière à partir de 2012».
Dans le même registre social, les organisations patronales ont marqué leur accord au sujet de la revendication de l’UGTA portant sur «l’extension des conventions collectives au secteur privé».
Le Forum des chefs d’entreprises (FCE) qui n’a pas été signataire de la convention collective cadre du secteur économique privé, conclue en 2006 et reconduite en 2010, tout en marquant son «accord de principe», s’est «réservé un temps de réflexion pour consulter ses adhérents» à ce propos. S’agissant de la représentation syndicale dans le secteur privé, le gouvernement a menacé de sévir contre les patrons qui dénient ce droit constitutionnel à leurs employés.
La tripartie a décidé par ailleurs de confier à un groupe de travail, également tripartite, la mission de procéder à l’évaluation du Pacte national économique et social (PNES), signé en 2006 en l’absence du FCE, faut-il le rappeler, et à l’élaboration de recommandations pour son enrichissement et sa reconduction.
PROMESSES DE JOURS MEILLEURS POUR L’ENTREPRISE
Ce sommet gouvernement-patronat-syndicat s’est en outre achevé sur beaucoup de promesses en faveur de l’entreprise et de la promotion de la production nationale et de l’incitation aux exportations hors hydrocarbures. Première décision visant à supprimer les entraves bureaucratiques, les participants ont convenu de «maintenir en activité l’ensemble des groupes de travail créés par le sommet du 28 mai dernier, avec pour mission de suivre la mise en œuvre de leurs recommandations respectives».
Parmi les recommandations formulées par ces groupes et étudiées lors des travaux, le gouvernement s’est engagé à prendre en charge une bonne partie. Dans le cadre de la contribution des entreprises au succès des programmes de contrats d’emplois aidés et de formation des stagiaires, «le gouvernement a confirmé son engagement à «réduire les délais de réponse de l’ANEM, à réduire les délais de versement de la contribution de l’Etat au contrat de travail aidé, et d’améliorer l’efficacité du système des abattements sur les charges patronales», est-il écrit dans le communiqué.
S’agissant de la mise à niveau des PME, le gouvernement a marqué son accord pour inclure les représentants du patronat privé au conseil national de mise à niveau. Il a été également décidé que le groupe de travail consacré à ce volet «se (réunisse) mensuellement pour veiller à la mise en œuvre des recommandations acceptées par la tripartite».
Dans le volet «allègement et simplification des procédures fiscales et rééchelonnement des dettes fiscales», le Premier ministre a indiqué dans son intervention d’ouverture qu’une «trentaine de mesures ont déjà été intégrées dans le projet de loi de finances pour 2012», chose pour laquelle les patrons ont exprimé leur satisfaction.
Pour le rééchelonnement des dettes fiscales des PME, le gouvernement a décidé «l’octroi d’une période de différé de paiement durant une ou deux années, selon la situation financière de l’entreprise concernée». Il s’engage également à «l’étalement du paiement de la dette fiscale sur 3 années et l’annulation des pénalités d’assiette et de recouvrement».
Pour l’encouragement des exportations hors hydrocarbures, il a été décidé «le relèvement, de 120 à 180 jours, de délai de rapatriement des recettes de ce genre d’exportations», de «porter à 20% le niveau de rétrocession des devises aux exportateurs hors hydrocarbures», et enfin de «rétribuer, selon des conditions définies, le sous-traitant étranger dans les opérations d’exportations de nos PME».
Dans le même volet, il a été décidé en outre de «généraliser le couloir vert au niveau des douanes aux profit des exportateurs», d’»alléger les procédures de remboursement de la TVA à l’exportation», et de «prendre en charge les frais de labellisation des produits agricoles exportés».
Plusieurs autres engagements ont été en outre pris en matière de l’amélioration de l’accès des PME aux crédits bancaires et aux autres modes de financement de l’investissement, ainsi qu’au traitement des dettes bancaires des entreprises en difficulté.
L’Etat a ainsi décidé d’accompagner de son concours les PME qui ont procédé au rééchelonnement de leurs dettes depuis la date des décisions du Conseil des ministres, à savoir à partir du 1er février 2011. «Ces entreprises bénéficieront d’une période de différé de 3 années durant laquelle le trésor public prendra en charge les intérêts. Elles bénéficieront aussi «d’un effacement à hauteur de 50% des agios non recouvrés», peut-on lire dans le document final de ce sommet.
H. Mouhou