«A 70 dollars, nous serions en danger, à 60 dollars ça irait mal, à 50 ça irait très mal»
Le patron de l’Exécutif avait fixé une ligne rouge à l’économie algérienne, un baril de pétrole à bas prix nous mettrait en danger, avait-il estimé en septembre 2008.
La sonnette d’alarme a donc été tirée il y a trois ans tout juste. «A 70 dollars nous serions donc en danger, à 60 dollars ça irait mal, à 50 ça irait très mal», avait souligné Ahmed Ouyahia au mois de septembre 2008.
La marge peut paraître encore certes suffisante mais il ne faut pas l’oublier que les cours de l’or noir ont déjà engendré des pertes de plus de 5 dollars en une seule séance. Le prix du baril a fini la semaine sur une perte de 2,94 dollars à New York, soit 3,58%, à 79,20 dollars le baril. Jusqu´où peut aller la dégringolade des cours de l´or noir? «Le prix du pétrole devrait se situer dans une fourchette de 60 à 70$», a pronostiqué, il y a près de six mois, Rex Tillerson, patron d´ExxonMobil.

Le Premier ministre, qui a constamment mis en exergue l’étroite dépendance de l’économie algérienne par rapport à ses exportations en hydrocarbures, se trouve au lendemain de la tripartite qui a réuni l’Union générale des travailleurs algériens, le gouvernement et le patronat, conforté dans sa position notamment en ce qui concerne les augmentations de salaires, le Snmg ou les retraites. Un communiqué de la tripartite a mis en évidence la mauvaise conjoncture économique mondiale, ses répercussions sur les prix du pétrole et les effets néfastes qui affecteraient inévitablement l’économie algérienne. Hormis les recettes en devises essentiellement tirées de ses ventes de pétrole à l’étranger, l’économie nationale a cette particularité de ne pas être productrice de richesses.
Le secteur industriel est toujours au niveau des balbutiements, celui de l’agriculture n’a même pas atteint le stade de l’autosuffisance tandis que le secteur du tourisme patine, victime certainement d’une politique très peu agressive et d’une situation sécuritaire qui a considérablement altéré l’image du pays à l’étranger, bien que nettement améliorée. Les merveilles algériennes (Tassili n’Ajjers, de l’Ahaggar, les balcons du Rouffi…) sont mal vendues aux potentiels touristes occidentaux, asiatiques ou arabes. Reste donc la fabuleuse manne pétrolière qui représente à elle seule près de 98% des recettes en devises de l’économie du pays. Elle supporte les salaires des fonctionnaires, les pensions de retraites et assure tant bien que mal leur pouvoir d’achat. Le Premier ministre n’a pas raté l’occasion de le rappeler. «Mon espoir personnel est que les idées du patronat en général et du Forum en particulier nous aideront, ensemble, à sortir du libéralisme de la mamelle après avoir quitté le socialisme de la mamelle», a rétorqué Ahmed Ouyahia, à Réda Hamiani le président du Forum des chefs d’entreprise, qui a mis l’accent sur le manque de performance de l’économie algérienne. Une manière d’exhorter les patrons d’industrie à relever le défi de la mise en oeuvre d’une économie productrice de richesses et de ne plus compter que sur la rente pétrolière pour instaurer une véritable politique des salaires et ne serait que réduire une enveloppe des importations qui devrait connaître une explosion à inscrire dans les annales de la gestion des affaires du pays: la barre des 40 milliards de dollars sera probablement largement franchie. «Les importations algériennes de produits alimentaires ont enregistré durant le 1er semestre 2011 une progression de plus de 59%, tirée à la hausse essentiellement par les céréales dont les achats ont augmenté de plus de 99% à 2,04 milliards de dollars», ont indiqué, au mois de juillet dernier, les Douanes algériennes. C’est dans la foulée de cette hausse des importations de produits alimentaires que l’Opep a publié un rapport alarmiste sur l’état des réserves de pétrole prouvées en Algérie.
Les chiffres du rapport de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole rendus publics, le 21 juillet, indiquaient que les réserves prouvées du pays qui s’élevaient à 12,2 milliards de barils sont restées quasiment inchangées depuis 2006. Incontestablement, l’Algérie épuise ses réserves d’or noir. Le temps de l’arrêt de la traite de la vache à lait est arrivé.