Les citoyens de plus en plus indignés par la qualité des prestations, Urgences médicales, la désolation !

Les citoyens de plus en plus indignés par la qualité des prestations, Urgences médicales, la désolation !
les-citoyens-de-plus-en-plus-indignes-par-la-qualite-des-prestations-urgences-medicales-la-desolation.jpg

Service des urgences médicales au CHU Mustapha (Alger), environ une heure après la rupture du jeûne, samedi dernier. Deux femmes, une vielle dame souffrant de douleurs au niveau du dos et une jeune fille se plaignant de maux de tête et de nausées. Les deux attendent leur tour pour une consultation chez le médecin.

Un seul, paraît-il. Assises sur un siège métallique qui n’offre aucun confort, les deux patientes paraissent calmes, résignées, gémissant par moments comme pour dire que leur patience ne pourrait durer longtemps. «C’est insupportable, je ne pourrais pas tenir, j’ai peur de vomir encore ici», se plaint la jeune fille auprès de sa soeur



Plus jeune ou moins jeune, on ne peut le savoir. Celle-ci a la mine grave. Elle aussi donne l’apparence d’une personne qui souffre mais pas d’un mal physique. «C’est cela qu’on appelle service des urgences médicales d’un grand CHU de la capitale ? C’est cela les réformes du système de santé ?», interroge-t-elle d’une voix basse, craignant de faire exploser par ses propos la colère des autres.

La sienne en premier, se dit-elle. Et entraîner un mouvement de contestation comme ceux qui se déclarent partout dans le pays à cause de la cherté des prix, la pénurie du pain, les coupures répétées d’électricité et autres. Non ! Elle n’en veut pas pour le moment.

Il y a d’abord ces malades à soulager, ne serait-ce qu’avec une injection de Spasfon. En fait, c’est ce qui se fait généralement. «Ils vont me faire l’injection, j’en suis sûre. Je me demande ce que je fais ici. J’aurais dû partir directement chez un spécialiste privé…Je refais toujours la même erreur», lance un jeune, debout, parmi ce qui ressemble plus à une cohue humaine devant un marché quelconque qu’à une file de personnes, majoritairement malades, à l’entrée d’une salle de soins.

Aucun agent pour veiller au respect de l’ordre. «C’est à toi de te rappeler de la dernière personne qui est arrivée avant toi. Je pense que c’est cet homme-là qui parle avec la femme enceinte. Sans doute sa femme», conseille un jeune à une autre femme, venue en compagnie de sa mère diabétique.

Celle-là, ne sachant pas quoi faire, rester avec sa mère qui peine à relever la tête ou rejoindre les personnes debout, dans la file, elle prend son téléphone. Elle cherche un nom dans le répertoire et demande à la personne en ligne de la rejoindre à l’hôpital. «C’est l’anarchie totale ici. Moimême je commence à être fatiguée et je crains de ne pas pouvoir apporter l’aide nécessaire à notre mère», dit-elle à son frère, au bout de la ligne.

Ce qu’elle ne peut dire à ce frère, c’est que l’endroit est vraiment sale. Le parterre est propre, peut-être qu’il venait d’être nettoyé mais une odeur des plus nauséabondes se dégage des sanitaires, juste en face du bureau du médecin. Des malades et leurs accompagnateurs entrent et sortent mais on voit d’autres boucher leurs narines pour ne pas sentir l’odeur. C’est carrément de l’urine, disonsle sans détour. Et c’est insupportable.

La mauvaise odeur repousse le malade avant même son arrivée dans le service. Là encore, personne ne se manifeste pour un petit geste. La situation est déplorable. «Ce n’était pas comme ça avant. Il y avait une certaine pression sur le service mais il y avait aussi un certain ordre et aussi une hygiène appréciable. Agents de nettoyage, de sécurité et infirmiers étaient à cheval. Cela remonte à quelques mois, peut-être quelques années.

Aujourd’hui, la situation s’est complètement dégradée. «Personne ne peut dire pourquoi ce laisser aller», commente un homme. Le bureau d’inscription se trouve dans un endroit complètement retiré. Peu visible au visiteur qui doit s’y rendre pour remplir la fiche verte et remettre la somme symbolique de 100 DA.

Une obligation à laquelle certains refusent de se soumettre, arguant du fait que l’hôpital doit être au service des malades et assurer les prestations de santé gratuitement. Un agent suit du regard le va-et vient des malades et de leurs accompagnateurs. Assis sur un autre siège métallique, à droite de la personne qui s’occupe de remplir les fiches vertes, il paraît d’une grande impassibilité. Il observe, fixe du regard mais n’agit pas.

Lui aussi refoule une grande colère. Peut-être même qu’il trouve du plaisir à voir régner le désordre et l’indignation, alors que c’est à lui qu’incombe la responsabilité d’assurer l’ordre, la discipline et aussi rassurer, un tant soit peu, les malades en ce qui concerne leur prise en charge médicale. Rien de tout cela. On laisse faire, c’est aux autres de faire. Aux malades eux-mêmes de se débrouiller comme ils peuvent pour accéder aux soins.

Eux et ceux qui les assistent parmi les membres de leur famille, les proches et les amis. Le service se remplit de personnes étrangères. Des jeunes et des moins jeunes, des hommes et des femmes, un flux quotidien difficile à contenir surtout en cette période de grandes chaleurs et de jeûne. «Je te connais, minable!», s’écrie un homme dans un autre service des urgences du même hôpital.

Juste à quelques mètres du premier. Nettement plus grand et surtout propre, ce dernier a été ouvert récemment par le ministre de tutelle, Djamel Ould Abbès. Sa réalisation a coûté beaucoup d’argent. C’est le service des urgences médico-chirurgicales. La différence est dans le mot chirurgie mais de nombreux malades ne distinguent pas entre les deux.

Pour un problème d’estomac, ils s’y rendent, avant d’être orientés vers l’autre service cité plus haut. Tout cela, c’est un travail en plus pour les agents et les infirmiers qui font toutefois montre de sympathie et de compréhension. «Nous sommes obligés de nous montrer accueillants et agréables», dit une femme, plusieurs fois interpellée par les personnes qui arrivent dans le service. «Nous faisons de notre mieux pour bien les orienter», dit un agent de sécurité.

Compréhensifs envers les citoyens, ces agents et ces infirmiers ne trouvent pas autant de sympathie chez leurs visà- vis. L’agent insulté et ayant échappé à une agression physique n’a rien fait d’autre que d’avoir dit à son agresseur qu’il ne peut pas rendre visite à une personne malade. «On le fait exceptionnellement mais dans ce cas précis, la visite est interdite.

Dès qu’il lui a dit cela , l’homme s’est emporté et l’a insulté devant tout le monde», rapporte un de ses collègues. «Je ne vous dis pas combien de menaces nous recevons chaque jour de certains citoyens. Des menaces de coup de couteau», poursuit-il indigné. Cela fait des années, de longues années, que les ministres en charge du secteur de la Santé promettent et s’engagent à améliorer le fonctionnement des services de Santé, toutes spécialités confondues et partout dans le pays, la situation ne fait qu’empirer.

Des sommes colossales ont été investies dans la réalisation de nouveaux établissements et de nouveaux services, l’acquisition de matériel, qualifié de performant, et l’augmentation des salaires des personnels médical, paramédical et autres employés, mais les choses vont de mal en pis. Ça se dégrade de jour en jour, sans raison apparente. Le problème est dans le système lui-même qui est à refaire. Et cela ne pourrait réussir sans l’implication de tous. Chose que les responsables du ministère rejettent jusqu’à présent.

En attendant de voir leur rêve se réaliser un jour, les indignés s’expriment sur les pages du réseau social Facebook, en toute liberté pour dire toute l’indignation citoyenne devant la dégradation à grande échelle de tout ce qui est administration et services publics. Des pages entières qui se remplissent chaque jour, chaque minute, chaque seconde. Le gouvernement n’y est pas encore. Peut-être qu’il se décidera à s’y inscrire prochainement. A se faire des amis sur le net.

K. M.