Toutes les banques privées algériennes devraient finalement être au rendez-vous de la fin de l’année 2009, en dépit de l’importance de l’augmentation du capital minimum décidée en décembre 2008 par les autorités financières du pays.
Conséquence, un flux de capital inespéré pour la balance de paiement du pays.
C’est le 31 décembre prochain qu’entrera en application la décision du Conseil algérien de la monnaie et du crédit (CMC), organisme dépendant de la Banque centrale, d’augmenter fortement le montant du capital minimum requis des banques et des établissements financiers du pays (le capital minimum des banques passe de 2,5 milliards à 10 milliards de dinars, soit 100 millions d’euros ; celui des établissements financiers de 2,5 à 3,5 milliards de dinars).
On estime généralement que BMCE et Attijariwafa Bank devraient confirmer leur intérêt pour le marché algérien. Ce qui ne sera sans doute pas le cas des Tunisiennes d’Amen Bank ou de la BIAT.
Les objectifs officiels recherchés par cette mesure ont été explicités dès son annonce par la Banque d’Algérie. Il s’agit tout d’abord, dans le contexte de crise financière internationale, de renforcer la solidité du secteur bancaire algérien en augmentant les fonds propres des banques privées, toutes étrangères, qui, au nombre d’une quinzaine, activent actuellement sur le marché algérien. Un autre objectif est de stimuler l’implication des banques privées dans le financement de l’investissement des PME algériennes.
Et, de façon moins officielle, certains cadres de la Banque centrale suggèrent que le relèvement du seuil du capital minimum est de nature à « barrer la route » aux candidats à l’agrément, dont la liste avait tendance à s’allonger au niveau du CMC et dont l’intérêt se porte exclusivement sur le financement des opérations du commerce extérieur peu gourmandes en capital.
Près de 2 milliards de dollars d’investissement en 2009
Les enseignements à tirer du succès de cette opération qui devrait se confirmer prochainement, en dépit de l’absence de communication sur les dernières réunions du CMC, sont loin d’être négligeables. A raison de plus de 100 millions de dollars en moyenne par établissement, l’opération devrait en effet se traduire au total par des entrées de capitaux proches de 2 milliards de dollars. Ce qui placera en 2009 les investissements étrangers dans le secteur largement en tête des bilans sectoriels, devançant même les investissements réalisés dans le secteur de l’énergie.
Selon nos informations, la quasi-totalité des banques privées devraient s’aligner sur le nouveau seuil légal. C’est en particulier le cas des plus en vue d’entre elles, BNP Paribas et Société Générale. La surprise dans ce domaine vient de la filiale algérienne de HSBC, installée depuis moins d’un an en Algérie et qui porte son capital à 11,3 milliards de dinars (113 millions d’euros).
Les autorités algériennes, dont la politique en matière d’attraction de l’investissement étranger a donné lieu à de vives critiques au cours des derniers mois, ne manqueront pas d’en tirer argument pour justifier le bien fondé de leurs nouvelles orientations économiques en soulignant la marque de confiance indiscutable que ces investissements, très supérieurs aux performances des pays voisins, représentent vis-à-vis du marché algérien.
Les nouvelles normes algériennes pourraient cependant refroidir l’ardeur des banques candidates à un agrément. Parmi ces dernières, on estime généralement que la BMCE marocaine, associée au CIC français, ainsi qu’Attijariwafa Bank, devraient confirmer leur intérêt pour le marché algérien. Ce qui ne sera sans doute pas le cas des Tunisiennes d’Amen Bank (déjà présente dans le capital de Maghreb Leasing) ou de la BIAT.
De nouveaux créneaux
Le contexte dans lequel intervient cette mesure a changé depuis l’été dernier. Le tir de barrage des autorités algériennes contre les importations, en hausse constante et soutenue au cours des dernières années, a conduit à l’interdiction pure et simple du crédit à la consommation depuis le début du mois de septembre.
L’impact de cette nouvelle mesure est surtout sensible pour un petit nombre de banques. C’est en particulier le cas des filiales algériennes de BNP Paribas ou de Société Générale, lancées depuis plusieurs années dans une course de vitesse pour développer leur réseau dans le pays. Leurs objectifs, dans ce domaine, ont été revus à la baisse et le personnel dédié au crédit à la consommation – celui de Cételem notamment – réaffecté vers le crédit aux professions libérales, aux artisans et commerçants, nouveaux créneaux porteurs identifiés dans le but de rentabiliser le réseau.
Le financement de l’investissement en question
Le souci exprimé par le régulateur algérien de voir les banques privées s’engager de façon plus active dans le financement des PME reste accueilli avec circonspection. Un banquier de la place appelle à une réflexion sur les causes de l’absence de financement de l’investissement par les banques qui, selon lui, ne seront pas effacées par une simple mesure d’augmentation de capital. « Il n’y a, tout d’abord, en réalité, que fort peu de projets bancables qui tiennent la route et qui offrent des garanties de solvabilité suffisantes. Un deuxième problème est constitué par le manque de transparence ; les états financiers ne reflètent pas la situation réelle des entreprises. Enfin, en raison de l’absence de marché financier, les ressources longues qui permettraient de financer des projets d’investissement sur dix ou quinze ans ne sont pas disponibles. » Le même interlocuteur souligne cependant que les récentes mesures vont « accroître globalement la liquidité des banques locales et rendre potentiellement des ressources disponibles pour le financement des entreprises, à condition que soient réalisées de nouvelles alliances entre banques privées et publiques ».
PAR HASSAN HADDOUCHE, ALGER