L’Algérie ferait bientôt appel à des agences de notation pour consolider sa santé financière. Pourtant, ces puissantes agences n’ont jamais pu prévenir des risques devenus cas d’école.
Elles ont parfois distribué des triples A à des entreprises ou à des Etats au bord de la banqueroute. En 2001, la Grèce, en crise et endettée, s’est vu octroyer, pour un prêt d’un milliard de dollars, la note maximale par une agence réputée.
Les échos des coulisses parlent de notes payées par les Etats et les entreprises pour mettre en avant leur solvabilité. Aujourd’hui, en Algérie, ce sont justement banques et entreprises privées qui revendiquent l’arbitrage de ces agences à haut risque. Auraient-elles déjà «payé» la note ?
L’Algérie est en voie de concrétiser son projet relatif à la création d’une agence de notation chargée d’évaluer le niveau de stabilité des banques.
Selon le dernier rapport d’Oxford Business Group (OBG), le processus de sélection d’un mécanisme de contrôle s’accélère en Algérie, où l’on espère que le lancement du nouveau système de notation des banques, prévu en 2013 renforcera la confiance dans le secteur financier, tout en favorisant une hausse du volume de prêts, conformément à l’objectif de diversification économique qu’elle s’est fixé.
Les auteurs du rapport expliquent que le système de notation permettrait de détecter de façon précoce les signes de vulnérabilité des banques, tout en contribuant à préserver la stabilité du secteur et à protéger les déposants.
Le nouveau système devrait toutefois permettre de contrôler l’ensemble des banques et institutions financières d’Algérie en tenant compte de différents indicateurs, notamment la liquidité, la gestion du risque et les ratios de solvabilité. Il permettra, par ailleurs, de les évaluer en fonction d’un système de notation et de définir des règles d’intervention.
Enfin, il devrait permettre de renforcer la lutte contre le blanchiment d’argent, tout en offrant des moyens plus pratiques et transparents pour contrôler la solidité des banques. Nour Nahawi, directeur général d’ABC Bank, une filiale algérienne de la banque bahreïnienne ABC, basée à Manama, a déclaré à OBG que le nouveau système de notation devrait avoir des répercussions favorables pour les banques nationales.
«Avec le système de notation à venir et les efforts actuellement déployés pour multiplier les possibilités de crédit, le gouvernement adoptera une démarche proactive pour préserver la stabilité du secteur bancaire, ce qui devrait renforcer la solidité et la santé des banques», a-t-il expliqué.
Frilosité des banques publiques vis-à-vis du secteur économique privé Le cabinet d’expertise londonien estime, par ailleurs, que le système bancaire algérien est sorti relativement indemne de la crise financière mondiale mais le volume des prêts octroyés au secteur privé reste peu élevé.
«Les six banques publiques du pays, qui totalisent environ 85 % des actifs, sont réputées pour leur grande frilosité en matière d’octroi de crédits, marquées par des pertes sur des prêts accordés à des entreprises publiques inefficaces», at- on jugé, en ajoutant que le système bancaire conserve, de ce fait, une quantité importante de liquidités qui pourraient nourrir la croissance dans le secteur privé, en manque de capitaux.
Par ailleurs, dans la mesure où la plupart des banques publiques ne sont pas dotées de la technologie de gestion des risques sophistiquée employée dans le secteur privé, le gouvernement espère que le lancement d’une agence de notation indépendante encouragera les banques les plus performantes à accorder des crédits plus facilement.
Aymeric de Reyniès, responsable pays de la banque Calyon, filiale du groupe français Crédit Agricole, a déclaré à OBG que le développement passerait inévitablement par un secteur privé performant. «L’avenir du secteur bancaire est entre les mains des petites et moyennes entreprises, une stratégie adéquate doit être adoptée pour soutenir de façon optimale leurs activités et développement», a-t-il affirmé.
A long terme, le développement du système bancaire algérien sera très certainement caractérisé par une participation accrue des bailleurs de fonds du secteur privé, selon une tendance amorcée il y a quelques années. André Dieu, chef de division dans la branche algérienne de la banque française Natixis, estime que l’intérêt des pays étrangers dans ce pays du Maghreb est parfaitement fondé.
«L’Algérie est un marché en pleine expansion en termes de potentiel, il n’est pas encore fragmenté et le taux d’utilisation du système bancaire y est encore relativement faible par rapport à certains pays voisins », a-t-il déclaré en concluant que le pays présente un potentiel considérable pour les banques internationales qui souhaitent investir.
Z. M.