Les robes noires protestent à nouveau contre le projet de loi proposé par la chancellerie.
L’institution judiciaire est en crise. Les participants à l’assemblée générale des membres des 15 barreaux du pays, tenue les 14 et 15 octobre derniers, sont d’accord. Et à l’issue de cette AG, très animée, les avis étaient partagés d’où le huis clos.
Un, observer trois journées de protestation les 25, 26 et 27 du mois en cours ; deux, de geler l’assistance judiciaire ; trois, d’amender le code de procédure civile conformément aux recommandations du conseil national ; quatre, d’enrichir le code de procédure pénale en tenant compte de la commission nationale ; cinq, de créer une mutuelle des avocats ; six, de plaider pour une TVA de 5% au lieu des 17% que l’avocat acquittera de préférence sous forme de timbre fiscal, etc. Et en dernier, l’amendement du projet de loi à travers certains articles, jugés problématiques, exigeant des clarifications, voire la suppression.
C’est en tout cas cette dernière recommandation, qui a suscité des controverses. Elle a constitué une ligne de démarcation entre les deux tendances qui se sont opposées jusqu’à quasiment la fin de la séance. Et pour cause ! Quatre barreaux dont celui d’Alger, fort de ses 6 000 avocats, étaient pour le retrait du projet de loi.
Cette position est justifiée, selon Me Bourayou, “par une régression des droits de la défense”. Plus encore, ce texte, a-t-il poursuivi, est “en contradiction totale avec les orientations du président de la République qui, lors de son discours d’avril dernier, a souligné la nécessité d’ouvrir le pays vers les libertés publiques et des droits humanitaires”.
Il se trouve, a expliqué Me Bourayou, que contrairement aux anciens textes régissant la profession d’avocat, le nouveau texte n’a pas bénéficié des nouvelles orientations du président de la République et de la commission de réforme politique.
C’est la raison pour laquelle une
partie non négligeable des membres des
barreaux avait milité pour son retrait pur et simple. Car on considère que le texte “va réduire considérablement le rôle de la défense et ramener le procès à l’omnipotence du juge et dans lequel l’avocat n’est qu’un alibi pour un simulacre de justice”.
L’autre tendance pense, au contraire, qu’il n’y a pas lieu de rejeter le projet de loi. Lequel projet a été, selon le bâtonnier de Constantine, élaboré par des anciens bâtonniers à la fin de l’année 1997. Quant au reproche de mise sous tutelle du pouvoir politique à travers les ministères de la Justice, de la famille et de la défense, Me Si Youcef du bâtonnat de Tizi Ouzou réfute en bloc “cette allégation”. Écoutons-le : “Je n’accepterai jamais d’être sous la coupe du ministère de la Justice ou de l’administration en général. Par conséquent, je suis pour des amendements, des clarifications, mais il n’est
pas question de revenir au texte de 1991”, jugé obsolète.
Pour rappel, l’AG de l’Union des organisations du bâtonnat survient après le mouvement initié par le barreau d’Alger, qui a observé en juin dernier un débrayage où il a été réclamé le retrait définitif de ce texte. Une revendication réitérée au cours de l’AG d’hier par le bâtonnier d’Alger, Me Sellini, qui craint “une clochardisation” de la profession d’avocat.
Une position qui tranche néanmoins avec celle du président de l’Union des barreaux d’Algérie (Unba), Me Lanouar Mustapha. “C’est nous qui avons participé à l’élaboration de ce projet. C’est vrai qu’il y a eu, avec les directeurs du ministère et autres, quelques erreurs qu’il est possible de corriger. Le ministère nous a promis de le faire”, a-t-il affirmé.
M. Ouyougoute