Les arabes n’apprécient pas la position d’Alger sur la guerre au Yémen, Intox et bataille médiatique

Les arabes n’apprécient pas la position d’Alger sur la guerre au Yémen, Intox et bataille médiatique
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Un activiste algérien connu pour sa haine de l’Algérie a été convoqué pour les besoins de la campagne.

L’offensive arabo-occidentale contre les Houtis au Yémen, avec en sous-main la constitution d’une force arabe d’intervention, a constitué le sujet-phare du dernier Sommet de la Ligue arabe. La position de l’Algérie qui milite pour une solution négociée au problème n’arrange pas la coalition constituée essentiellement de monarchies arabes du Moyen-Orient plus le Maroc, soutenue par les Etats-Unis et la France.

La salve des critiques arabes n’est pas frontale, les gouvernements ne pouvant obliger l’Algérie à changer de doctrine sur la question de l’intervention en dehors de ses frontières. La mission de «confondre» l’Algérie est, de fait, laissée aux médias de la région qui n’hésitent pas à trouver «quelques contradictions» entre la position officielle de l’Algérie et son appartenance à la «grande famille sunnite». les propos ne sont pas ainsi formulés, mais cette insistance à évoquer le danger chiite, en mettant en avant les déclarations des partis islamistes algériens, participent d’une volonté à induire l’opinion algérienne en erreur, en voulant faire accroire que l’intérêt de la société algérienne est dans la défaite de l’islam chiite, considéré par les monarchies du Golfe comme plus périlleux pour la survie de la nation musulmane qu’Israël. Le discours de ces médias est très insidieux et joue sur les confusions ethnique, religieuse et géostratégique.

La désinformation comme arme

LG Algérie

L’Iran est ainsi décrit comme une puissance malfaisante qui tente de placer ses pions dans tout le monde islamique. Sans le dire ouvertement, les experts invités par les médias moyen-orientaux à s’exprimer sur les enjeux que présente la situation du Yémen insistent lourdement sur la nécessité de l’union arabe contre les Houtis. L’Algérie étant la seule voix discordante dans le concert arabe, est pointée du doigt et accusée, à défaut de faire le jeu des chiites, au mieux de neutralité négative dans le conflit qui fait rage au Yémen. Les explications de certaines émissions vont plus loin que la seule critique et tentent de trouver des interlocuteurs algériens pour appuyer la thèse d’un islam sunnite, mis à mal par l’hégémonie du chiisme, en Algérie même. Les commentateurs «politiques» de ces chaînes ne s’embarrassent pas de citer des formations politiques algériennes d’obédience islamiste qui seraient contre l’option de non-intervention choisie par les autorités officielles du pays. Les commentaires vont bon train et il semble que la campagne n’est qu’à ses débuts.

Ces médias prennent la chose très au sérieux. On en a pour preuve, la convocation pour les besoins de ladite campagne de l’activiste Anouar Malek. Ce dernier a tenté de marquer son allégeance aux puissances de la région, en tirant à boulets rouges sur l’Algérie. «Cette décision de l’Algérie de s’opposer au consensus arabe aura des conséquences néfastes sur la place de l’Algérie sur les scènes arabe et internationale», lance ce défenseur des thèses fissites sur un plateau de télévision. Ce genre d’intervention vise à «mobiliser» l’opinion islamiste algérienne et la montée contre l’idéologie chiite. Il faut dire que le courant salafiste algérien, qui développe une haine assumée envers le chiisme, mène sa propre campagne dans les mosquées du pays, allant jusqu’à justifier les massacres de Daesh, en les assimilant à une revanche contre les chiites, plus «cruels» encore. C’est d’ailleurs en ces termes que les actions des terroristes en Syrie sont expliquées aux jeunes Algériens. Les massacres de chiites relèvent de «la guerre sainte», disent les salafistes ici et ailleurs. C’est cette thèse qui est accréditée, sous couvert de géostratégie et de rétablissement de la légalité institutionnelle au Yémen, dans de nombreuses émissions de télévision portant sur l’offensive de la coalition arabo-occidentale contre les Houtis.

Dans la case «stratégique», les médias moyen-orientaux font dire au même Anouar Malek que «c’est le rapprochement de l’Algérie avec l’Iran qui est à l’origine de cette non-position.» de l’Algérie. Et l’activiste de supposer que l’influence de l’Iran chiite est en train de devenir une réalité en Algérie, notamment dans la ville d’Oran où, dira-t-il, cette confession se développe. Il va jusqu’à préconiser «une guerre préventive» que devrait mener l’Algérie pour mettre un terme à «l’expansionnisme iranien» en Algérie. C’est ainsi que la position doctrinale de l’Algérie de ne pas intervenir militairement en dehors des limites territoriales du pays est transformée en réaction à une influence néfaste d’une puissance chiite sur l’Etat.

L’Otan en embuscade

Le «témoignage» de Anouar Malek est «corroboré» par des «informations» relayées par ces médias attestant d’un prétendu mécontentement au sein de la classe politique algérienne proche du pouvoir. Bref, les médias du Golfe veulent faire accréditer la thèse selon laquelle le gouvernement est isolé.

Il reste que tout ce qui se dit sur cette offensive arabo-occidentale contre les Houtis cache des considérations autrement plus «pernicieuses». Il y a certes, la détermination des monarchies «sunnites» à réduire de l’influence du chiisme, mais il y a aussi Israël et l’Otan en jeu. L’expert en lutte antiterroriste et en stratégie, Abdelhamid Larbi Chérif, estime que cette guerre est motivée par le contrôle du détroit d’Aden, dont la partie africaine, à Djibouti, est déjà sous la mainmise israélo-américaine. La prise par les Houtis de la ville d’Aden n’est pas envisageable pour l’Otan, sachant que ce détroit contrôle 68% du commerce international. «L’Otan contrôle le détroit de Gibaltar à l’ouest et celui d’Aden à l’est. Il n’est pas pensable pour les pays occidentaux de perdre partiellement le contrôle sur Aden», note M.Larbi Chérif. Et d’ajouter: «Si les Houtis entrent dans Aden, la guerre cessera et la coalition devra négocier», ce qui n’est pas concevable. Pour ce qui concerne la campagne dirigée contre l’Algérie, notre interlocuteur estime que les monarchies du Golfe ont Daesh comme moyen de pression.