Les Etats-Unis, sans mandat de l’ONU, ont frappé jeudi soir la Syrie, tirant des dizaines de missiles de croisière contre une base aérienne syrienne. Des frappes justifiées par les Américains est leur alliés comme étant une réponse à une attaque chimique présumée que Donald Trump a qualifiée de « honte pour l’humanité ».
La frappe a été menée avec « 59 missiles » Tomahawk, a annoncé un responsable de la Maison Blanche, précisant que Washington avait visé la base aérienne de Shayrat, qui est « associée au programme » d’armes chimiques de Damas et « directement liées » aux événements « horribles » de mardi.
Le président Donald Trump a affirmé que ces opérations étaient « dans l’intérêt vital de la sécurité nationale » des Etats-Unis. Mos cou et Damas, ont quant eux qualifiées ces attaques d’ »agression » contre un Etat.
Le 4 avril, un raid imputé à l’armée syrienne contre la localité de Khan Cheikhoun dans le nord-ouest de la Syrie a fait au moins 86 morts, dont 27 enfants.
Les Etats-Unis ont accusé le régime du président Bachar al-Assad d’avoir utilisé un agent neurotoxique de type sarin contre cette petite ville rebelle, dont les images de victimes – femmes et enfants – agonisantes ont choqué le monde.
Le président Trump avait menacé depuis mercredi de passer à l’action contre son homologue syrien pour cette attaque « odieuse », un « affront à l’humanité ».
Jeudi, en arrivant en Floride pour accueillir son homologue chinois Xi Jinping, il avait encore dénoncé une « honte pour l’humanité » et réclamé que « quelque chose se passe ».
Son chef de la diplomatie Rex Tillerson avait accusé sans le moindre recul « le régime syrien sous la gouverne du président Bachar al-Assad d’être responsable de cette attaque ». La chancelière allemande Angela Merkel a, elle aussi, montré du doigt le « régime d’Assad ».
Mais la Russie, alliée de la Syrie, a averti les Etats-Unis, juste avant les frappes.
Conséquences négatives
A l’issue d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU qui débattait depuis deux jours d’une résolution de condamnation de l’attaque, l’ambassadeur russe Vladimir Safronkov avait mis en garde contre des « conséquences négatives » en cas d’intervention militaire américaine.
A l’été 2013, le prédécesseur de Donald Trump, Barack Obama, avait renoncé à frapper le régime syrien après une attaque aux armes chimiques près de Damas qui avait fait plus de 1.400 morts. A l’époque, le magnat de l’immobilier Donald Trump avait exhorté sur Twitter M. Obama à ne pas intervenir en Syrie.
Jeudi, Rex Tillerson a en outre plaidé pour le départ du président syrien, après avoir dit le contraire il y a une semaine.
Dorénavant aux yeux du patron de la diplomatie américaine, « le rôle d’Assad à l’avenir est incertain et avec les actes qu’il a perpétrés, il semblerait qu’il n’ait aucun rôle pour gouverner le peuple syrien ».
Jeudi dernier, lui et l’ambassadrice américaine à l’ONU Nikki Haley avaient semblé s’accommoder du maintien au pouvoir du chef de l’Etat syrien, avant de hausser le ton cette semaine.
L’ancienne secrétaire d’Etat démocrate Hillary Clinton, qui avait milité pour une approche plus musclée de l’administration de Barack Obama contre le régime de Damas, s’est dite favorable à des frappes pour « détruire » les bases aériennes syriennes.
Perçu comme un isolationniste et hostile à l’interventionnisme de l’Amérique au Moyen-Orient, Donald Trump avait reconnu mercredi que l’attaque chimique avait eu « un énorme impact » sur lui et que son « attitude vis-à-vis de la Syrie et d’Assad avait nettement changé ».
La Turquie, partisane d’une intervention américaine en Syrie depuis 2011, a une fois de plus appelé à « sanctionner exemplairement » Assad.
La Syrie n’a pas utilisé et n’utilisera jamais des armes chimiques
Le régime syrien a été accusé d’avoir utilisé du gaz sarin le 21 août 2013 dans l’attaque de localités aux mains des rebelles en périphérie de Damas, qui avait fait au moins 1.429 morts, dont 426 enfants, selon les Etats-Unis.
Mais le chef de la diplomatie syrienne Walid Mouallem a réaffirmé que l’armée de son pays « n’a pas utilisé et n’utilisera jamais » d’armes chimiques contre son peuple, « pas même contre les terroristes », expression du régime pour désigner rebelles et jihadistes.
D’après lui, l’aviation a frappé « un entrepôt de munitions appartenant » à des jihadistes et « contenant des substances chimiques ». Une explication déjà avancée par l’armée russe mais jugée « fantaisiste » par des experts militaires.
« un préjudice considérable » aux relations russo-américaines
Les frappes américaines en Syrie causent un « préjudice considérable » aux relations entre Moscou et Washington, a déclaré vendredi le Kremlin, qui estime qu’elles constituent une « agression contre un Etat souverain ».
« Cette action de Washington cause un préjudice considérable aux relations russo-américaines, qui sont déjà dans un état lamentable », a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, cité par les agences de presse russes.
Vladimir Poutine avait jugé jeudi « inacceptable » d’accuser sans preuve le régime de Damas d’être responsable de cette attaque qui a fait 86 morts, dont 27 enfants, et qui a provoqué l’indignation internationale.
Pour le président russe, « les frappes américaines en Syrie sont une tentative de détourner l’attention de la communauté internationale loin des nombreuses victimes civiles en Irak », où des raids aériens contre l’organisation Etat islamique (EI) à Mossoul ont tué des dizaines de civils fin mars, explique le porte-parole.