Les Algériens rapatriés de Libye: entre crainte pour les biens abandonnés et soulagement de regagner le pays

Les Algériens rapatriés de Libye: entre crainte pour les biens abandonnés et soulagement de regagner le pays

Le visage creusé par la fatigue, le regard perdu face à un lendemain incertain, des Algériens établis en Libye ont regagné le pays, à bord du premier vol réservé au rapatriement des membres de la communauté nationale établie en Libye, munis, au plus, de valises légères, contenant ce qu’ils ont réussi à emporter après avoir tout abandonné, suite à la dégradation de la situation sécuritaire dans ce pays.

Ces Algériens, composant le premier groupe qui regagne le pays et qui ont délaissé, leurs biens et l’argent gagné après des années de « dur labeur » occupaient le grand hall de l’aéroport international Houari Boumediene, cherchant auprès des responsables des réponses convaincantes à leurs préoccupations exprimées toutes par une seule question: « qu’allons nous faire à présent après avoir tout perdu? ».



Ils sont en majorité des jeunes qui ont préféré, depuis peu ou depuis longtemps, se rendre en Libye, à la recherche d’un travail, mais qui se sont retrouvés, du jour au lendemain, contraints de retourner en Algérie, laissant derrière eux tout l’argent dûment gagné, pour fuir les troubles « qui s’intensifiaient de jour en jour, notamment après la fuite de plusieurs détenus et la constitution de bandes armées qui s’attaquaient aux civils tant libyens qu’étrangers ».

Fatma Ounès, compte parmi les membres de la communauté nationale rentrés en catastrophe au pays. Résidant depuis 14 ans à Tripoli, elle a préféré revenir en compagnie de son mari et de son bébé, âgé de quelques mois, après que la terreur eut dominé toutes les rues de la capitale libyenne « devenue un champ de bataille ».

Elle a fait part du profond sentiment de peur qui envahit la population de Tripoli à chaque moment de la journée et même de la nuit, « lorsque les tirs de balles se font entendre ». « On ne reconnaît plus Tripoli, tout a changé. Les bâtisses étaient en feu et les accrochages ne s’arrêtaient presque jamais. Nous craignions pour nos vies, alors nous avons décidé de rentrer en Algérie », confie-t-elle .

En dépit de la dégradation de la situation sécuritaire en Libye, Fatma garde toujours l’espoir de retourner un jour dans ce pays, lorsque les choses iront mieux. « J’ai pris l’habitude de vivre là-bas et je suis liée d’amitié avec plusieurs familles libyennes. Tout ce que je possède, je l’ai laissé là bas », regrette-t-elle. Houria Djafaar, originaire de Chlef et résidant avec son mari et ses deux filles à Tripoli depuis six ans dira avec une voie pleine d’émotion « j’aurais préféré rester en Libye, car son peuple est très généreux et accueillant, mais la situation est devenue effrayante et instable ».

Houria a précisé que de nombreux Algériens se sont réfugiés au niveau de l’ambassade et du consulat dans l’attente d’être évacués de Libye en raison de « l’escalade de la violence qui a transformé la capitale, l’espace de quelques jours, en ville sinistrée ». Ahmed Yassine Ben Ahmed, qui a été victime d’une agression, a raconté qu’il s’apprêtait à ouvrir son café lorsqu’il a été attaqué par une bande armée qui l’a conduit jusqu’à la Place verte où il a été passé à tabac. Immédiatement après avoir été relâché, il s’est rendu à l’ambassade d’Algérie pour ensuite regagner l’Algérie. Mais comme la plupart des Algériens rapatriés de Libye, il se demande ce que l’avenir peut bien lui réserver.

Ce soutien d’une famille de six personnes a tout perdu. Yassine et d’autres jeunes ont pourtant reçu des promesses de bénéficier de facilités pour l’obtention de crédits pour la création de micro-entreprises dans leurs wilayas d’origine. Pour d’autres Algériens rapatriés de Libye, c’est le logement qui pose problème, d’autant que le secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, chargé de la communauté nationale à l’étranger, M. Halim Benatallah, présent sur place, a clairement fait savoir que cette question « ne sera pas réglée dans l’immédiat ».

Soulagés d’avoir quitté la Libye, les Algériens rapatriés n’en demeurent pas moins inquiets pour leur avenir et pour le sort de leurs compatriotes restés là-bas (plus de 7750 personnes). Ils ont précisé à l’APS que la priorité est aux ressortissants algériens qui se trouvent toujours en Libye et qui doivent être ramenés sains et saufs au pays ».