Les résultats de l’enquête d’opinion menée par la LADDH pour connaître l’attitude du citoyen face à la corruption sont édifiants. Les personnes questionnées ne font non seulement pas confiance à la justice mais pensent également que les peines prononcées dans les affaires de corruption sont trop légères.
Les réponses au questionnaire intitulé «le citoyen face à la corruption » sont révélatrices d’une crise de confiance qui empêche, d’un côté de dénoncer et de l’autre le recours à la justice. Pis, les personnes questionnées par la cellule de lutte contre la corruption et la protection des deniers publics dépendant de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH) considèrent que les agents publics bénéficient de protection même lorsqu’ils sont coupables de corruption. Pourtant, les citoyens interrogés sont conscients de la gravité des faits de corruption puisqu’ils estiment à 82% que la corruption est un crime. Ils sont néanmoins 85% à penser que les peines prononcées dans les affaires de corruption sont légères. Seulement 14% de l’échantillon qualifie de «sévères» les peines prononcées par la justice, d’où un sentiment d’impunité. Autre révélation : les personnes questionnées estiment que les poursuites judiciaires dans ce genre d’affaires se font sur la base d’articles de presse dans 31,4% des cas, contre 30% sur la base de lettres de dénonciation. Le même taux est attribué aux dépôts de plainte. Les personnes questionnées, si elles semblent sensibilisées à la question, ne veulent cependant pas faire confiance aux institutions puisque 46% d’entre elles préféreraient dénoncer des affaires de corruption à l’opinion publique plutôt que de s’adresser à la justice (36%) ou à une quelconque autorité administrative. A la question de savoir quels sont les freins qui les empêcheraient de révéler des faits de corruption, 51% répondent avoir peur d’être impliqués pendant l’instruction, les autres 43 % justifient cela par le manque de document tandis que 17% disent éprouver une gêne à être traités de délateur. La LADDH a interrogé 1 600 personnes réparties sur 24 wilayas. L’échantillon choisi comporte 62% d’hommes et 38% de femmes. Les 18-40 ans représentent la majorité. Idem pour les personnes ayant fait des études supérieures avec 70% de l’échantillon composé de 51% de fonctionnaires. Commentant ces résultats, la LADDH considère comme positive la «non-banalisation» de la corruption mais note la crise de confiance entre citoyens et institutions, notamment l’appareil judiciaire. La Ligue des droits de l’homme, réagissant aux derniers propos du ministre de la Justice, a lancé un défi à ce dernier, affirmant que la LADDH va se faire un point d’honneur d’apporter des preuves des pressions exercées par l’exécutif sur l’appareil judiciaire.
N. I.