Les Algériens et les visas de circulation,La France serre la vis

Les Algériens et les visas de circulation,La France serre la vis

La «déclaration sur l’honneur» imposée aux hommes d’affaires algériens dans la procédure de délivrance de visas jette le doute sur leur bonne foi et ne tient pas compte des répercussions possibles de la mesure sur les exportations françaises.

Une grande agitation entoure les visas français au profit des Algériens. La dernière «trouvaille» est rapportée par le quotidien français Le Monde dans son édition du 29 décembre dernier.

«Selon des informations communiquées par le ministère de l’Immigration, les commerçants algériens doivent désormais, pour obtenir un visa, s’engager à ne pas demander de titre de séjour en France ni à y bénéficier de prestations sociales ou médicales. L’exigence d’une déclaration sur l’honneur résulte d’une initiative du consul général de France à Alger…, a fait savoir le ministère», précise le quotidien qui nous apprend, dans le même article, que le nombre de visas délivrés par la France aux Algériens a baissé en 2010 passant à 125.027 alors qu’en 2009 il était de 130.013. Alors que la représentation française en Algérie a, dans sa dernière précision, zappé l’année 2009 pour placer 2008 comme année comparative à celle de 2010. Tout laisse croire que cette tendance à la baisse se poursuivra puisque le ministre français de l’Intérieur et de l’Immigration, Brice Hortefeux, avait annoncé, dans une interview au quotidien Le Figaro du 22 décembre dernier, que «dans les prochaines semaines, je réunirai les préfets avec les consuls pour leur fixer mes priorités dans l’attribution des visas et leur demander d’être plus vigilants…». Il faut croire que le mot «vigilance» prend ici le sens de «plus de rejet de demandes». Comme on le voit, chaque fonctionnaire y va de son zèle. Quand ce n’est pas le ministre, c’est le consul général de France à Alger qui «prend l’initiative» comme un électron libre. Le tout sans que le Quai d’Orsay ne se donne la peine d’en informer à défaut de consulter au préalable, et comme le veut l’usage diplomatique, la partie algérienne. C’est ce que nous a confirmé une source de ministère algérien des AE. En réalité, le mouvement avait commencé bien avant. Rappelons-nous l’affaire du visa des fonctionnaires du ministère algérien de la Pêche ou encore l’expulsion de l’enseignant-chercheur d’un aéroport français où il venait de débarquer muni pourtant d’un visa en bonne et due forme. On peut y ajouter l’infamante mention «visa refusé» apposée par les services consulaires français sur les passeports de nos citoyens pour mieux comprendre ce qui se trame en réalité. Voilà maintenant cette histoire de «déclaration sur l’honneur» des commerçants algériens et de «l’invitation» exigée à nos journalistes.

Il faut être français pour penser qu’un journaliste peut être invité par des sans-abri, pour effectuer un reportage sur…les SDF des bords de Seine. Et comme si le «flicage» depuis quelques mois de tous les voyageurs algériens en provenance d’Algérie dès la réservation du billet de transport ne suffisait pas. C’est toujours Le Monde du 29 décembre qui nous met sur la voie des intentions françaises. La France ne veut plus se conformer à l’accord bilatéral signé en 1968 avec l’Algérie et qui a déjà fait l’objet de trois avenants. D’ailleurs, «des discussions consulaires programmées depuis longtemps (entre la France et l’Algérie) doivent avoir lieu très bientôt», ajoute notre source du ministère algérien des AE. Inutile d’être surdoué pour comprendre la manoeuvre et d’entendre les négociateurs français venir avec leurs gros sabots. Ce qui explique aussi la réunion prévue par Hortefeux avec les préfets et consuls avant les discussions avec la partie algérienne. Ces multiples histoires de visas paraissent, en effet, n’avoir pour but que de faire monter la sauce en prévision des prochaines négociations sur ce dossier des affaires consulaires.

Ceci dit et pour revenir à cette «déclaration sur l’honneur» imposée aux hommes d’affaires algériens en faisant planer le doute sur leur bonne foi, disons simplement que, de toute évidence, les responsables français ne semblent pas avoir mesuré toutes les répercussions possibles d’une telle mesure sur le commerce extérieur français.

Le volume des exportations françaises en direction de l’Algérie aurait dû inciter à plus de réflexion les autorités françaises. On s’attend ici à Alger à d’autres «initiatives» du même goût maintenant qu’il semble évident que la délivrance des visas français prend une allure de «sanctions».

Zouhir MEBARKI