Les Algériens dans l’expectative

Les Algériens dans l’expectative

Souvenons-nous ! C’était la promesse du Premier ministre Abdelmalek Sellal, qui déclarait à la presse, au mois de février passé, que les Algériens allaient découvrir un nouveau modèle économique national en avril.

A l’époque, le débat était concentré sur les aspects de la crise due à la chute des recettes pétrolières, les retombées des actions de rigueur budgétaire et surtout le plan d’autarcie qui pointait à l’horizon.



Même la loi de finances 2016, tant décriée par l’opposition, était qualifiée de moins contraignante, plutôt timide dans ses taxes et autres charges « compensatoires ».

Les effets de la crise n’étaient pas encore visibles et le gouvernement, sans être euphorique, évitait coûte que coûte de montrer le moindre signe de « panique » budgétaire ou un affolement économique.

Depuis des mois, Sellal et son staff ont invité des experts indépendants à faire des propositions, à élaborer des formules de sorties de crise, et surtout à « peaufiner » un programme de développement qui allie aussi bien la logique capitaliste que les exigences sociales.

A la recherche d’un pragmatisme économique et surtout d’une alternative économique fiable et sûre, le gouvernement Sellal ne voulait surtout pas « gérer dans l’urgence ». Mais voilà que c’est le Premier ministre qui annonça publiquement que le pays va « connaître un nouveau modèle économique » au mois d’avril. C’est ce jour-là qu’il révéla la décision de son gouvernement de lancer le fameux emprunt obligataire.

Force est de constater qu’avril tire à sa fin et que ce modèle tant attendu ne voit toujours pas le jour. La promesse de Sellal risque de devenir un souvenir. A-t-il reculé sur ce projet ? Ou l’a-t-il reporté sine die ? Qu’est ce qui empêche Sellal d’en parler, à la moindre occasion, pour éclairer la lanterne de l’opinion publique ?

Que fait-on des recommandations de septembre dernier, faites par d’éminents économistes et autres consultants algériens et étrangers grâce à des approches du CNES et de l’élite de notre diaspora ? Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas engagé un débat médiatique ou une vraie campagne explicative sur son modèle ?

Selon des sources partisanes, il semble que le Premier ministre a été « contrarié » dans son agenda, car son modèle économique annoncé en février était subordonné à un remaniement conséquent de son gouvernement que le président Bouteflika s’apprêtait à faire dès le début du mois d’avril.

Beaucoup de cartes ont été abattues ces derniers temps, et il semble que les dés sont « pipés », dès lors que le scandale de « Panama papers » est venu comme un « cheveu dans la soupe », tout comme l’épisode glacial de Valls.

Pour Sellal, un modèle économique est une nécessité absolue.

Or, cela exige une équipe homogène, compétente et soudée, qui partage une vision commune et adhère à un projet unique. A un an des législatives où tout reste ouvert et possible, le Premier ministre était conforté dans son analyse, celle de lancer ce modèle, en commençant par l’emprunt obligataire pour arriver à la prochaine tripartite.

Selon ses assertions, ce modèle est basé sur des partenaires et des associés politiques, patronaux et syndicaux, en reproduisant presque le même schéma que celui du Pacte économique et social signé en février 2014.

Aussi bien à l’UGTA qu’au FCE, personne n’avait la latitude de dévoiler les grands axes de ce modèle ou de ce partenariat, bien que le patronat, sous la houlette de Haddad Ali, ait montré sa préférence pour un PPP (partenariat privé-public) et surtout un code d’investissement plus souple et moins coercitif dans le climat des affaires.

Bien plus que cela, Sellal était disposé à proposer la création de certaines instances susceptibles d’accompagner ou de mener les réformes nécessaires, comme la restructuration de certaines entreprises publiques « non performantes », ou en chapeautant un programme ciblé de « réindustrialisation » selon des critères technologiques, comme le « mix énergétique »ou les TIC, voire l’environnement et les nouvelles cultures agricoles.

Or, aux dires des spécialistes, rien n’a été fait jusqu’à présent pour pouvoir préparer et présenter ce modèle économique nouveau. Pas d’annonce médiatique, pas de débat au Parlement. Tout se fait comme si l’ambition de Sellal au début de l’année en cours vient d’être enterrée. Alors qu’un modèle de ce genre exige une synergie globale, on a l’impression que chaque secteur ou département joue au « cavalier seul ».

Le ministère du Commerce qui peine à délivrer des licences pour importer des véhicules, un autre ministère qui annonce pour juin un code de l’investissement, alors que le département du Travail révèle que le code du travail est bloqué en raison de fortes divergences.

La Banque d’Algérie qui contredit le ministère des Finances, et les exemples sont nombreux. Des cacophonies qui ne plaident guère pour une sérénité dans la gestion de la crise. A la recherche d’une diversification de notre économie, le gouvernement peine surtout pour des considérations qui lui échappent. A moins que Sellal ne tienne sa promesse d’avril.