«Sur les traces de la résistance: L’Émir Abdelkader et Cheikh Bouamama»
Un pack qui allie tourisme et histoire a été proposé à 30 journalistes algériens lors d’un eductour qui les a menés sur les traces de la résistance algérienne contre le colonialisme français.
Faire du tourisme et vivre l’histoire, cela fait sûrement rêver certains d’entre vous! Et bien, désormais, c’est possible. Le ministère du Tourisme et de l’Artisanat vient de lancer un produit touristique des plus innovants, il s’agit du tourisme historique! L’Office national du tourisme (ONT) a organisé un «eductour» (voyage de presse) pour faire la «promo» de ce pack des plus innovants. 30 journalistes ont pris la direction de l’Ouest du pays (Tlemecen, Mascara, Aïn Sefra) à la découverte du tourisme historique. C’est la résistance algérienne qui est au menu de cette caravane, comme l’indique si bien son intitulé «Sur les traces de la résistance: L’Émir Abdelkader et Cheikh Bouamama». En lisant le programme, les journalistes étaient étonnés par cette nouvelle forme de tourisme. Ils s’attendaient à un voyage des plus ennuyants avec la langue de bois coutumière. Ce fut tout autre chose. Après six jours «d’aventures», les journalistes découvrent avec joie que le tourisme c’est aussi de l’Histoire. Ils étaient, donc, unanimes quant à leur appréciation de ce voyage d’un autre genre. «Atypiques et novateurs», ont jugé à l’unanimité les présents.
L’émir Abdelkader et Tlemcen
La conquête de l’Ouest a commencé à Alger à l’aéroport internationale Houari Boumediene où les 30 journalistes s’étaient rassemblés pour prendre la direction de la ville des Zianides, Tlemcen où ils devaient suivre les traces d’Abdelkader, le dernier émir d’Algérie. «Oui, il avait même pris un jet privé», répond avec humour Mme Dehbia Hamani, alias Nacéra, responsable des relations publiques à l’ONT. Tout est fin prêt, le moral aussi. L’avion décolle vers Tlémcen et à son bord 30 «aventuriers». Dans l’avion, Nacéra explique le programme de notre péripétie. «On va d’abord partir à Tlemcen pour découvrir la vie spirituelle de l’Émir Abdelkader ensuite à Mascara pour voir son lieu de naissance. Notre aventure finira à Naâma (Aïn Sefra) où nous suivrons les traces d’une autre figure de la résistance Cheikh Bouaâmama», dit-elle pour annoncer la couleur. Arrivé à Tlemcen, Nacéra renchérit avec son humour légendaire. «Vous allez être logés dans l’hôtel où séjournait l’Émir Abdelkader à savoir l’hôtel Renaissance de Tlemcen». Après un bon «repos de guerrier» dans cet établissement qui a sonné la renaissance de l’hôtellerie algérienne, les «soldats» du tourisme sont prêts pour la bataille.
«Je vais vous faire découvrir des endroits que peu de gens connaissent», assure M.Baghli Mohamed, notre guide historien. L’autobus prend la direction du centre-ville de Tlemcen, plus exactement à la mosquée d’El Mechouar ou doit commencer notre aventure. «Après le Traité de la Tafna (L’article 9), l’Émir Abdelkader occupa El Mechouar entre 1836 à 1837. Il fut réoccupé par les militaires français dès 1842», révèle notre guide. Une visite de la médina historique est également au programme. «Je vous réserve une surprise», annonce le guide. Il nous a fait assister à une réunion religieuse qu’effectue chaque vendredi un collectif baptisé Cheikh Senouci. Ce collectif se réunit dans la Khaloua (Hermitage) du même nom, au derb Sid El Yeddoun qui est un des endroits où a étudié l’Emir. Après cette réunion des plus spirituelles, place à un tour dans la médina; on a même eu droit à une maison où a vécu l’Emir à «Darb Sensla».
On a ensuite visité le mausolée de Sidi Brahim. «Il immortalise la bataille de 1845 gagnée par l’Émir contre le colonel Montagnac, tué lors de ce raid», rappelle notre guide. La deuxième étape de notre aventure nous mène à la wilaya de Mascara lieu de naissance de l’Emir. Cette wilaya représente indéniablement toute la vie de l’Emir. De sa naissance jusqu’à son allégeance. Mais avant d’arriver à Mascara, une halte s’impose à Aïn Témouchent pour visiter le mausolée de Sidi Yacoub là où a livré, un certain 25 avril 1835 l’émir Abdelakder, l’une de ses plus prestigieuses batailles. Après ce bref arrêt, direction Mascara plus exactement la zaouïa de Sidi Mahieddine à El Guetna. Cette dernière est le lieu de naissance de l’Émir Abdelkader et où il poursuivi ses études aux primaires. Au programme également, l’arbre de Dardar à Ghriss (site ayant abrité la prestation de la première allégeance à l’Emir Abdelkader, le 27 novembre 1832. Tout comme l’endroit de la deuxième allégeance à l’Emir qui est la mosquée de la Moubayaa.
La smala de l’Émir Abdelkader à Sidi Kada, avec ses remparts, le hammam de l’Émir ont également été au programme. La fin de l’aventure mascaréenne a été la visite du tribunal de l’Emir et le siège du commandement de son armée. Cette dernière étape n’a pas échappé à la bonne humeur du groupe qui s’en est pris au jeu en imaginant et simulant des procès de l’époque de l’Emir.
Un paradis en jachère
Après l’Emir Abdelkader, la caravane fonce vers le sud-ouest du pays dans la wilaya de Naâma, plus précisément à Aïn Sefra), sur les traces d’un autre héros de la résistance nationale en l’occurrence Cheikh Bouamama. Ce dernier a combattu la France dans cette région. Moghar, la citadelle qu’il a fortifiée porte des stigmates témoins de cette période de lutte contre le colonialisme. C’est dans cet endroit paradisiaque, Ksour Moghrar Foukani, où il est installé depuis 1873, qu’il décide de passer à la révolte. «Il a été surnommé ‘Bouamama », car toute sa vie durant il a porté un turban (A’mama) sur la tête évoquant sa piété et son attachement à sa religion, l’Islam», nous explique un habitant de la région. «Il a tout d’abord réussi à mettre fin aux divergences tribales de son époque et constitua sa base militaire dans son fief Moghrar Tahtani sur la route de Naâma et Labiodh Sidi Cheikh (ex-Géryville)», rapporte-t-il. «Après l’unification, en habile meneur d’hommes, il a dirigé la résistance contre le colonialisme en Algérie de 1881 à 1908, en participant à de nombreuses batailles», raconte ce citoyen rencontré dans le musée érigé à sa mémoire. Moghrar n’est pas seulement riche en histoire mais également en potentialités touristiques. Elle est constituée de deux palmeraies. Celle de Moghrar Tahtani qui est la plus importante. Elle s’étale sur les 2 rives de l’Oued Moghrar, et compte outre ses 14 000 palmiers, des cultures étagées d’arbres fruitiers divers. En plus de cette palmeraie, Moghrar Tahtani est connue pour ses stations rupestres, son petit musée de la préhistoire, la Tour du ksar et le Vieux ksar. La seconde palmeraie est celle de Moghrar Foukani. Elle possède aussi une superbe palmeraie et un magnifique ksar dont une partie est encore habitée de nos jours. Moghrar est également un lieu de halte à de nombreux oiseaux migrateurs qui traversent la Méditerranée et le Sahara. Bien que possédant des atouts touristiques considérables, et une grande histoire, Moghrar reste encore très peu fréquentée. Voilà, donc, que cette aventure «pleine d’histoire» s’achève dans un paradis inexploité qui est Aïn Sefra. Histoire et voyage ont donc séduit les participants à cet «eductour». D’une pierre deux coups, donc, avec ce tourisme d’un autre genre. Un bouillon d’histoire avec une pincée de tourisme sont les ingrédients de ce voyage pas comme les autres…