L’Egypte a vécu, hier, une journée particulière. Des informations contradictoires ont été rapportées par la presse internationale sur les morts dus à l’intervention des forces de l’ordre lors des manifestations pro-islamistes. Si les autorités ont démenti les bilans donnés par certaines sources, les Frères musulmans évoquent carrément un «massacre» suscitant l’indignation internationale.
En effet, les autorités égyptiennes ont commencé, très tôt hier, à évacuer de force plusieurs places du Caire, occupées depuis six semaines par les partisans du président déchu Mohamed Morsi. L’opération, que le pouvoir ne voulait pas voir se transformer en «bain de sang», a pourtant fait de nombreuses victimes, à en croire les médias.
Les bilans restent contradictoires, notamment en raison de l’interdiction faite aux journalistes de pénétrer dans la zone. L’AFP a avancé, hier en début d’après-midi, le nombre de 124 manifestants pro-Morsi tués sur la place Rabiya Al-Adawiya. Ce bilan ne tient pas compte des morts éventuels des autres rassemblements au Caire, ni de ceux d’autres affrontements en cours dans le pays.
Les Frères musulmans, qui parlent de «massacre», évoquent désormais le chiffre de 500 morts et au moins 10 000 blessés. Le ministère de la Santé ne fait état que de 15 morts, dont 5 parmi les forces de sécurité, et 179 blessés.
Sur le plus grand campement, situé près de la mosquée Rabiya Al-Adawiya, la police a d’abord bouclé plusieurs rues avant de tirer des cartouches de gaz lacrymogène sur la foule pendant que des hélicoptères survolaient la place en diffusant des messages par haut-parleur. Des images de télévision ont montré des bulldozers enfoncer ces barrières de fortunes.
Des snipers étaient également placés sur les toits autour de la place, enveloppée de volutes de fumée.
Les forces de sécurité ont ensuite bloqué l’accès à la place avant de parvenir près du cœur du campement, mais les informations parviennent encore de manière très parcellaire. Selon un porte-parole des Frères musulmans, le courant électrique a été intégralement coupé sur la place Rabiya, «même dans les centres médicaux». En milieu d’après-midi, plusieurs centaines de personnes s’affrontaient encore avec les policiers sur cette place.
Le ministère de l’Intérieur a affirmé en fin de matinée que la place Nahda, plus petite, est désormais «totalement sous contrôle». Environ 200 «manifestants armés» y auraient été arrêtés, dont plusieurs responsables des Frères musulmans.
Des corps carbonisés ont été retrouvés sur la place après la dispersion des manifestants, comme le montre une vidéo publiée par la chaîne El Watan. Les causes de l’incendie ne sont pas encore connues.
Après avoir été expulsées par la police, des centaines de protestataires ont tenté d’établir un nouveau camp sur la place Moustapha-Mahmoud.
Policiers et militaires les ont empêché en tirant gaz lacrymogènes et balles.
Le gouvernement provisoire a accusé la confrérie d’être «entièrement responsables de toute effusion de sang, et de toutes les émeutes et les violences qui sont en train d’avoir lieu».
Des pro-Morsi incendient trois églises
Des partisans du président déchu Mohamed Morsi ont incendié, hier, trois églises coptes dans le centre de l’Egypte, ont rapporté des responsables de la sécurité, cités par l’agence officielle Mena. Selon ces responsables, deux églises ont été attaquées et en partie incendiée par des pro-Morsi dans la province d’El-Menia. A Sohag, des pro-Morsi ont jeté des cocktails molotov sur l’église Mar Gergiss, située dans l’enceinte du diocèse de la ville, a rapporté l’agence Mena, évoquant des actions de représailles à la dispersion au Caire.
Face à cette situation, la communauté internationale a réagi vivement, notamment les pays occidentaux, arabes et musulmans appelant à la raison et au dialogue entre les différentes forces politiques du pays et à bannir le langage de la violence.
A. M.