Législatives : Moussa Touati, président du FNA, à l’Expression: « Nous participons pour défendre les intérêts du pays »

Législatives : Moussa Touati, président du FNA, à l’Expression: « Nous participons pour défendre les intérêts du pays »

Le président du Front national algérien est catégorique quant à sa participation aux élections législatives de mai prochain.

Il considère que la fraude est toujours présente dans la mesure où les membres de la Haute Instance indépendante de surveillance des élections ont été désignés et non pas élus ou approuvés par les partis politiques.



L’Expression: Vous traversez une conjoncture très grave compte tenu de ce qu’a connu le Front national algérien (FNA) ces derniers temps comme dissensions internes. Quelle sera votre prestation durant les élections législatives de mai prochain?

Moussa Touati: En ce qui nous concerne, nous allons participer à ces élections malgré ce que nous avons connu comme situation interne ces derniers temps. Nous sommes un parti qui n’a peur de rien, nous assumons notre participation, nous irons jusqu’au bout dans ces élections législatives même si les conditions ne sont pas favorables pour assurer des élections propres et honnêtes.

Ce n’est pas facile de convaincre la base militante de participer aux élections, alors que cette base sait que ces dernières sont truquées. Nous assumons notre participation pour prouver que nous sommes fidèles au serment des chouhada et moudjahidine qui se sont sacrifiés pour ce pays et non pas pour ceux qui sont en place aujourd’hui et qui servent la France.

C’est une accusation très grave, ce que vous dites là, avez-vous des preuves ou est-ce juste des supputations?

Oui, il y a des preuves tangibles qui confirment ce que je dis. La venue du Premier ministre français Bernard Cazeneuve s’inscrit dans cette démarche qui consiste à faire chanter le pouvoir en place parce qu’il sait que les élections en Algérie sont truquées.

Vous voulez dire que la France est responsable de cette «fraude»?

C’est clair que la France est impliquée, la preuve, il y a eu des élections auxquelles la France a annoncé son soutien clair, alors que ces élections étaient entachées de fraude. La France avait bénéficié d’une somme d’argent considérable, et quand les Américains ont eu vent de ça, ils ont affiché leur niet, ce qui leur a permis d’avoir leur pactole aussi. Cet argent aurait pu être utilisé dans le développement du pays. Il faut être clair, l’Algérie n’est pas indépendante, et ce n’est pas le peuple qui choisit.

Pourquoi participez-vous alors aux élections?

Nous participons aux élections pour défendre les intérêts du pays. Sinon, nous allons annoncer notre démission et laisser le pays à ces gens qui servent les intérêts de la France. Nous avons créé notre parti pour défendre les intérêts de l’Algérie et ceux de notre peuple, notre rôle est de créer les conditions politiques qui permettront aux Algériens de rester dans leur pays et de ne pas le quitter, surtout ceux qui portent des projets prometteurs pour la nation.

L’Algérie ne devrait pas être une propriété de ces gens qui servent les intérêts de l’étranger.

Quelles sont les chances du Front national algérien?

Nous sommes convaincus que le peuple à travers son éveil et sa conscience élevée de la chose politique va voter pour nous. Seulement, le peuple est démissionnaire maintenant, parce qu’on lui a volé sa voix par la fraude massive qui a caractérisé les élections précédentes. Il faut maintenant prendre une sérieuse option pour un nouveau combat politique pacifique, celui d’aller voter et surveiller les bureaux de vote pour que la voix du citoyen ne soit pas détournée ailleurs.

La Haute Instance indépendante de surveillance des élections a rassuré les partis politiques et les Indépendants que les élections législatives de mai prochain seront libres et transparentes. Vous ne pensez pas que cette instance est garante de l’honnêteté des élections?

Entre dire les choses et les appliquer, il y a un sérieux fossé. Moi, je ne crois pas à l’indépendance de cette instance, ceux qui décident du déroulement des élections sont au pouvoir, ce n’est pas l’instance qui décide réellement de la tournure des élections, tout le monde le sait, la décision est ailleurs. Les élections vont se dérouler sur fond d’une crise économique très grave, les banques ont été siphonnées, aucun Algérien lambda ne pourrait bénéficier d’une grande somme d’argent sous forme de crédit. Ce qu’il faut savoir, c’est que les membres de la Haute Instance de surveillance des élections n’ont pas été élus, ils sont l’émanation d’une désignation. Ils auraient pu au moins nous solliciter et nous inviter autour d’une table pour en discuter, voire pour approuver uniquement, comme ça, la chose aurait été acceptable. Ils ont exclu les partis politiques, alors que ce sont ces partis qui sont concernés par les élections.

Donc, j’appelle les citoyens à aller voter massivement le jour du scrutin, même s’ils doivent utiliser un bulletin blanc ou de rester à la maison le long de la journée du vote. C’est une meilleure manière de faire face à la fraude. Nous pouvons recourir à des méthodes pacifiques dans le genre pour contrer le trucage de l’urne.

Mais cela nécessite un travail de mobilisation profond, avez-vous les moyens et les instruments pour y parfaire?

En tout cas, l’essentiel est d’appeler à cette forme de lutte pacifique pour dénoncer la fraude et le bourrage des urnes. Le FNA avait eu le mérite de réunir les partis politiques durant les élections législatives précédentes pour discuter des propositions à faire pour parer aux pratiques de la fraude. En notre qualité de FNA, nous avons proposé un vote biométrique, mais la proposition n’a pas été prise en considération, nous avons alors décidé de créer un tribunal populaire dans la rue, une manière de dénoncer la fraude. Nous avons demandé à nos parlementaires de ne pas siéger au Parlement, nous siégeons dans la rue.

Votre appel n’a pas été suivi par les parlementaires issus de votre parti, comment expliquez-vous cela?

Ils ont été achetés par le pouvoir, même les partis politiques à cette époque ne m’avaient pas aidé, je me suis retrouvé seul face à cette manipulation…

Pardon, ça veut dire que le FNA ne dispose pas de ligne politique conséquente, il est considéré comme une structure du clientélisme et d’opportunisme politique, n’est-ce pas?

Dans un sens, oui, le FNA a été utilisé comme piédestal à des fins personnelles, mais le pouvoir aussi a joué sur ça, en les récupérant dans son giron pour affaiblir le parti. Quand le pouvoir promet à un de nos parlementaires que vous allez devenir ministre, vous pensez que ce parlementaire va suivre son chef de parti?Et ce n’est pas uniquement au sein du FNA que cela se passe, c’est dans tous les partis que le pouvoir utilise ses méthodes pour affaiblir et détruire les partis politiques. Maintenant, les règles du jeu vont changer, il y a une loi qui a été mise en oeuvre pour mettre un terme au nomadisme politique qui a pourri la pratique politique dans le pays.

Vous avez connu une crise interne récemment, pouvez-vous nous dire dans combien de circonscriptions électorales êtes-vous présent?

Avant, nous étions présents dans 48 wilayas, mais maintenant et après ce qu’a connu le parti, nous sommes présents dans 33 circonscriptions. Le FNA a été victime d’une opération de déstabilisation, visant à le détruire. Et durant cette période de déstabilisation, il y a eu création de 27 partis émanant de notre parti. Notre problème, ce n’est pas qu’on n’existe pas politiquement, c’est qu’ils ont tout fait pour nous casser, et ils sont arrivés à leur fin. Ils nous ont démolis parce que nous voulons garder notre autonomie et être dans l’opposition. D’ailleurs, ils n’arrivent pas à comprendre comment se fait-il que avec toutes ces pratiques déstabilisatrices ciblant le FNA pour le détruire, avec tout ça, nous arrivons toujours à ratisser et avoir des siéges dans toutes les élections.

Ce qu’ils n’arrivent pas à comprendre c’est que le FNA est très proche du peuple et veille à redonner la parole au peuple, et nous, nous sommes contre les vireux qui veulent se rapprocher du régime. Ces gens, nous les dénonçons avec force et nous ne voulons pas d’eux dans notre parti. Ce qui est sûr, nous avons le soutien populaire, et c’est une vérité, nous n’inventons pas des choses à ce propos. Notre problème est avec ceux qui veulent faire du FNA une voie pour atteindre leurs fins étroites et servir le pouvoir en place.

Votre base militante est presque érodée, de combien de militants dispose le FNA maintenant?

C’est vrai, cette année nous avons enregistré une baisse très forte en matière d’adhésion des militants au parti. D’ailleurs, c’est pour la première fois depuis la création du FNA que le taux d’adhésion des militants a connu une baisse très forte. Nous sommes environ 5000 militants maintenant, alors qu’avant, nous étions 50.000 militants. Le parti a pris un sérieux coup après les dernières tentatives de sa déstabilisation.

Peut-être est-ce dû aux méthodes précédentes du FNA qui ont participé à cette désertification du parti, à l’image de ce qui s’est passé durant les élections législatives précédentes où vous avez exigé des sommes d’argent colossales à des militants qui voulaient se présenter à la députation. Quelle lecture faites-vous?

Nous, nous avons eu le courage de dire ça et le proposer aux militants du parti, qu’ils participent avec leur argent qui doit être versé dans le compte du parti pour financer la campagne électorale des militants qui se portent candidats aux élections législatives. Mais certains ont dit que le président du FNA a pris cet argent pour lui.

D’ailleurs toute cette démarche s’est déroulée en présence de la presse et les représentants du parti au niveau des wilayas. Nous avons exigé à raison de 270 millions de centimes pour chaque candidat pour que sa campagne soit gérée normalement, parce que le parti ne dispose pas de ressources financières pour prendre en charge la campagne de chaque candidat. Donc, personne n’a le droit de me dire que j’ai instauré la loi de «la chkara» dans les élections. Tous les candidats et candidates ont approuvé cette démarche dans un cadre officiel et aussi dans toute transparence. D’ailleurs tous ceux qui étaient derrière cette campagne de dénigrement contre l’image du FNA se sont fait démasquer après, ils ont choisi le chemin facile, celui de se retrouver dans les bras du pouvoir après avoir trahi le FNA et lui porté un sérieux coup.

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