Commencée sans grande conviction le 14 avril, la campagne électorale pour les législatives s’est achevée hier dimanche, dans un climat d’indifférence.
L’équiation est simple pour le président : on prend les mêmes et on recommence.
Est-ce qu’un jour ceux qui sont aux manettes de cette Algérie meurtrie, trahie, instrumentalisée, qui se débat dans d’inextricables problèmes de gestion, de gouvernance, se sont intéressés à ce que souhaite et attend le peuple ? Assurément non, car quand on voit comment cette campagne électorale est menée, il n’y a pas photo. Aucun doute. L’Algérie marché à côté de ses chaussures. Le pouvoir gère à contre-emploi. Le divorce entre ceux qui gouvernent et le peuple est de plus en plus manifeste. Comment ? Les premiers d’abord dont la seule ambition est de demeurer au pouvoir par tous les moyens, quitte à recruter une clientèle qui va lui servir de paravent à un semblant de classe politique.
A ce titre, les partis créés, ex nihilo, de toutes pièces, à partir du personnel politique qui grenouille depuis des lustres, par affairisme ou lien familiale, dans les arcanes du pouvoir, participe de cette volonté de ceux qui tiennent les manettes de ce pays à se régénérer. L’élection pour eux sera une espèce de bain de jouvence pour durer un autre demi-siècle. Malgré les échecs recommencés, en dépit des scandales répétés, des violations quotidiennes des droits de l’homme, de la gabegie qui gangrène tous les étages de l’Etat, le président, le premier ministre et son gouvernement n’ont pas froid aux yeux pour se présenter devant les Algériens comme des patriotes, sincères et épris de l’Algérie.
Il y a dix ans, Abdelaziz Bouteflika nous avait promis la paix, la prospérité, le travail, le logement, on attend toujours. Pour la paix, à 100 km d’Alger, il ne fait pas bon d’être entrepreneur au risque d’être kidnappé, chaque semaine des policiers des soldats de l’armée nationale (des enfants du peuple) sont abattus par des hordes de criminels. Pour la prospérité, l’Algérien ne voit que les zéros des milliards de dollars dont l’Algérie s’enorgueillit, pour le reste, tout le reste, ce n’est qu’illusions, écran de fumée. L’Algérie désespère des promesses sans lendemains. Que dire des millions de logements annoncés jamais réalisés ? « En termes de bilan du régime, c’est sombre. Mais l’histoire ne s’est pas arrêtée pour autant. La société algérienne a changé et les contradictions se sont approfondies », affirmait Lahouari Addi, dans l’entretien (*).
La campagne dans l’indifférence
Le pouvoir a mis le paquet pour réussir son élection. Car il a choisi ses partis, ses participants, écartant sur son chemin toute personne qui ne rentre dans son moule.
Pour cette campagne, le ministre de l’intérieur ne pouvait faire mieux, en quelques jours, il a composté 21 partis, après avoir verrouillé pendant dix ans l’espace politique algérien et réduit à néant toute expression démocratique. Mais alors peut-on croire qu’on puisse créer un parti politique en quelques jours ? Non.
Pendant 21 jours, les 41 partis politiques, un triste record, ont prêché dans le désert de l’indifférence. 118 listes indépendantes, soit un total de 25.800 candidats, ont battu la campagne pour tenter de s’adjuger les suffrages des 21,6 millions d’électeurs inscrits.
L’objectif de faire participer les Algériens risque de ne pas être atteint, à en juger par l’indifférence et le peu d’engouement affichés par les citoyens qui ont boudé les meetings et autres campagnes de proximité des candidats. Combien de meetings annulés faute de citoyens !
Autre signe majeur de cette désaffection: le sort subi par les panneaux d’affichage des listes. Ils ont été vandalisés par-ci, tagués par-là avec des mots peu amènes pour les candidats qui ont eu, en plus, la malchance de partir en campagne au moment où la pomme de terre, à cause d’une subite envolée de son prix, a été au cœur des débats.
« Importez la pomme de terre plutôt que de gaspiller l’argent pour des mascarades électorales! », « pourquoi voter pour une Assemblée sans pouvoir? », « les élections passent, les problèmes restent » sont quelques uns des graffitis écrits souvent en langue arabe sur ces panneaux en faisant penser aux dazibaos à l’époque de Mao Tsé-toung.
« Cette indifférence dont vous parlez s’explique à mon sens par le fait que les citoyens sont convaincus que ces élections ne seront pas meilleures que les précédentes, qu’elles ne changeront rien au quotidien des Algériens », estime le politologue Rachid Grim dans un entretien à l’Associated Press.
« Les Algériens sont méfiants, car cela fait 50 ans qu’ils entendent les mêmes promesses », ajoute-t-il en dénonçant aussi « les paroles en l’air » des candidats, le « manque de niveau et de cohérence de leurs discours ».
Cette indifférence est un signe annonciateur d’une forte abstention. A moins bien entendu d’un bourrage des urnes, comme on l’a connu pendant certaines consultations.
Samedi, le Premier ministre Ahmed Ouyahia, par ailleurs président du RND, parti de la coalition présidentielle au pouvoir, tout en qualifiant le Printemps arabe de « déluge », a mis les électeurs devant le choix suivant : soit ils participent massivement au scrutin pour soutenir les réformes politiques, soit c’est « la porte ouverte à une intervention étrangère » qui imposerait au pays un « agenda extérieur ». Outre l’argument islamiste, Ouyahia a recours maintenant à la main étrangère. La ficelle est grosse, l’argument n’est pas nouveau, il est vieux que le personnel politique qui dirige notre pays. Jouer sur la peur à défaut d’avoir fait de véritables réformes politiques n’est pas payant. Car enfin, Ahmed Ouyahia qui a été dans tous les gouvernements depuis 1998, donc responsable de la situation actuelle, s’est-il posé la question de savoir pourquoi les Algériens ne le croient pas, ni d’ailleurs tous ceux qui nous mènent en bateau depuis l’aube de l’Algérie ? Mais qu’importe pour lui ce que pensent les Algériens, car ils n’ont droit au chapitre que pour dire « oui ».
Sur le registre de l’émotion, le président Abdelaziz Bouteflika a même comparer au 1er novembre 1954 la prochaine élection !!! Le comble ! De quel colonialisme le président veut-il en fait nous libérer ? De ceux qui ont confisqué de l’Algérie ? Mais il en fait partie.
Yacine K.