Législatives: La place de l’éducation dans les programmes des partis: Un sujet à polémique

Législatives: La place de l’éducation dans les programmes des partis: Un sujet à polémique

Le secteur de l’éducation, sensible, est considéré par les partis islamistes comme étant un sujet à fort potentiel polémique qui peut les mettre dans un face-à-face mortel avec les autres partis, d’où le choix de le zapper.

Le secteur de l’éducation est hautement stratégique dans la mesure où il constitue la machine à travers laquelle l’Etat reproduit et socialise ses attributs. Toutefois, malgré la singulière importance qu’il revêt, celle-ci ne semble pas assez suffisante pour le placer au coeur de la campagne électorale pour les législatives du 4 mai prochain. En effet, curieusement, il ne suscite l’intérêt que de quelques partis qui essaient, tant bien que mal, d’en donner une vision.

Pourtant, à y regarder de très près, ce ne sont pas les raisons d’en faire un objet de débat national qui manquent. Bien au contraire, puisque le secteur de l’éducation est l’un des plus instables sur la scène sociale nationale, notamment avec les grèves récurrentes des enseignants, la violence dans les écoles, la déperdition scolaire, la problématique de l’enseignement des langues étrangères, les langues d’enseignement, la généralisation de tamazight, les enseignants vacataires, le manque de certaines catégories d’enseignants dans les régions des Hauts-Plateaux et du Sud, la surcharge des classes, les réussites et les échecs abusifs, la situation sociale des enseignants, etc. Mais de tous ces problèmes pourtant fort sensibles, les partis et les candidats préfèrent détourner les regards et discourir sur d’autres sujets.

En la matière, le FLN, parti majoritaire lors des précédentes élections législatives, ne propose rien et ne trouve même pas utile de commenter les problèmes qui agitent ce secteur et que des spécialistes et autres syndicalistes soulèvent à longueur d’année. Poussant le bouchon plus loin, il se targue même de ne pas avoir de programme en réclamant une majorité écrasante le 4 mai. Pour le FLN, le programme, dans le secteur de l’éducation comme dans tous les autres secteurs, est «d’améliorer» la situation mais sans donner de chiffres, sans dire pourquoi et comment et, surtout, sans inscrire «l’amélioration» dont il est question dans un agenda. Mais ce n’est pas que le FLN qui semble se nourrir de cette mamelle populiste.

Même le TAJ de Amar Ghoul, le MPA de Amara Benyounès et l’ANR de Belkacem Sahli y tétent avec fierté. En effet, pour ces partis, le secteur de l’éducation a tout au plus besoin d’être «amélioré», ce qui laisse entendre que ces partis sont entièrement d’accord avec les réformes entreprises par Nouria Benghebrit et celle qu’elle compte entreprendre dans les temps à venir si elle venait à être maintenue à la tête de l’Education nationale. Cependant, bien qu’il n’ait pas donné beaucoup de détails concernant sa vision du secteur de l’éducation et des réformes à mettre en place pour le moderniser et l’améliorer, le RND a dévoilé son engagement irréversible pour une école moderne et républicaine et a appelé à la poursuite des réformes pédagogiques et sociales en cours dans le secteur et qui, selon Nouria Benghebrit, vise à consacrer l’algérianité, la modernité et l’universalité comme constantes de l’école.

Le Front El Moustakbal a lui aussi plaidé, dans son programme électoral, pour la poursuite des réformes entreprises jusque-là dans le secteur de l’éducation. Mais, par souci d’originalité, ce parti s’est engagé, dans le cas où il obtiendrait la majorité, à «annuler l’examen de passage entre le cycle primaire et le cycle moyen ainsi que la création d’un baccalauréat professionnel».

L’autre parti à avoir décliné un programme clair dans le secteur, c’est le RCD de Mohcine Belabbas. En effet, rappelant ses positions en faveur d’un système éducatif performant et expurgé de l’idéologie obscurantiste et rétrograde», le RCD considère que «la réforme du système éducatif doit concerner tous les cycles primaire, secondaire, professionnel et universitaire et doit être menée selon une approche systémique pour lui donner un maximum de chances de réussir».

«On doit agir simultanément sur le contenu des programmes, les méthodes pédagogiques et d’évaluation, le recrutement et la formation des enseignants et des personnels d’encadrement pédagogique et administratif ainsi que les conditions de travail des personnels et des élèves.» Sur le chapitre qui revient «aux politiques» et concernant la législature à venir, le RCD estime qu’il est possible de présenter et de défendre une orientation qui structure une option porteuse de modernité et de performance», détaille ce parti qui est à l’origine de la mise en place, début des années 2000, de la commission de réforme de l’éducation confiée à Benali Benzaghou. Plus concrètement, le parti de Mohcine Belabbas a proposé, entre autres, l’institutionnalisation d’une scolarisation obligatoire à l’âge de 5 ans., l’intégration de la formation professionnelle au sein du ministère de l’Education nationale de sorte qu’aucun élève ne puisse quitter les bancs de l’école avant d’avoir appris un métier ou obtenu les prérequis pour poursuivre des études universitaires.

Du côté des partis islamistes, malgré l’importance particulière qu’ils accordent à l’éducation dont les moindres enjeux les font baver, ces derniers n’en ont pas beaucoup parlé. Les deux alliances que managent Abdellah Djaballah et Abderrezak Makri n’évoquent, dans le meilleur des cas, que les aspects généraux consistant en le respect des valeurs et des constantes nationales. Pour banales qu’elles paraissent, ces positions n’en sont pas moins tactiques. En effet, compte tenu de la sensibilité des questions liées à la réforme de l’école et des grosses polémiques qu’elles peuvent susciter dans la société, lesquelles polémiques peuvent faire perdre des points à leurs partis, les islamistes ont préféré battre en retraite et éviter les sujets qui fâchent.

Il n’est nullement question d’abandon de la bataille idéologique. Il s’agit, au contraire, d’un repli stratégique, surtout que les deux partis au pouvoir, le RND et le FLN, ont clairement affiché leur adhésion et leur soutien aux efforts de modernisation du secteur qu’effectue Nouria Benghebrit depuis quelque temps.

Ainsi, contrairement aux grands débats que présageaient les turbulences ayant secoué le secteur de l’éducation, les partis préfèrent pour la plupart zapper les questions qui y sont inhérentes en raison de leur caractère sensible et, parfois polémique, se contentant, pour certains, d’évoquer des concepts très vagues et, pour d’autres, de réitérer leur soutien ferme aux réformes déjà en cours.