Les prochaines élections législatives en Algérie, on l’a beaucoup dit et écrit, s’inscrivent dans des enjeux considérables. Il ne s’agit de rien moins que de réussir un changement radical, une révolution en somme, par les urnes.
Cette révolution a pour nom le renforcement de la démocratie dans le pays certains diront la démocratisation tout court. Une étape qui vient après deux décennies d’expériences, de tâtonnements, d’accumulation d’erreurs mais d’acquis aussi. Si l’ouverture opérée après 1988 a été caractérisée par une impréparation qui a conduit à de nombreuses anomalies, et dont l’addition fut lourde pour le peuple tout entier, la démarche suivante a permis tout à la fois de corriger ces erreurs et de rattraper autant que faire se peut les retards enregistrés sur tous les plans.
Les résultats obtenus sautent aux yeux : la stabilité retrouvée et les projets relancés dans différents domaines autorisent, sans beaucoup d’appréhension, des réformes politiques en profondeur. Peut-être les événements de ce qu’on appelle le «printemps arabe» les a-t-il accélérés mais ils ne sauraient suffire à les expliquer. La situation est mûre pour ces réformes devenues dès lors indispensables.
Ceux qui estiment que le pouvoir aurait pu, malgré tout, aller à contre-courant de cette nécessité, dans une sorte d’aveuglement général, seraient bien en peine de donner des raisons convaincantes à l’espèce de pause dont tous les observateurs ont fait état depuis 2010. Ils seraient bien en peine d’expliquer la diligence avec laquelle le président a annoncé les réformes dès le 15 avril 2011.
Enfin, ils seraient bien en peine d’expliquer pourquoi, contrairement à ce qui s’est passé chez le voisin marocain, où les modifications opérées à la hussarde par le roi n’ont concerné que des aspects inessentiels, les changements proposés chez nous revêtent ce caractère radical que symbolisent les comparaisons officielles du président avec le 1er novembre 1954.
Peut-on envisager l’idée que ce dernier, qui n’a plus rien à attendre de personne, ait pu s’impliquer à diverses reprises dans cette voie, devant l’Histoire, juste par d’incompréhensibles manœuvres politiciennes ? Peut-on encore douter qu’après le 10 mai prochain, rien ne sera désormais plus comme avant ?
Aucune analyse sérieuse ne s’y risquerait. Les partis qui, pour les besoins de la cause, n’hésitent pas à émettre des doutes ici ou là, le font par esprit de marchandage parce qu’ils ont l’illusion d’obtenir ainsi, c’est-à-dire en agitant des menaces de retrait, quelque avantage de l’Etat. Ils n’ont pas bien compris les enjeux véritables de cette élection, ils ne croient pas en la démocratie dont ils se réclament verbalement, et ils mettent en contradiction leurs paroles avec leurs actes puisque leur propre participation, ainsi que celle de la quasi-totalité des autres partis, indiquent clairement que cette fois le «compte y est».
Enfin, dire que la fraude, une fraude volontaire et massive qui plus est, demeure possible malgré tout cela (les engagements solennels, les implications personnelles du chef de l’Etat, les garanties multiples au plan interne et international, contexte géopolitique…) relève d’une irresponsabilité dont les auteurs doivent être comptables publiquement afin qu’un désaveu unanime leur soit infligé comme sanction. Il est vrai, cependant, que la meilleure des punitions demeure leur envergure insignifiante dans les urnes, qu’ils s’y rendent ou pas.