Le président de la République a évoqué “la gravité de la conjoncture financière que traverse notre pays” en Conseil des ministres. Il a indiqué que “le caractère unique de nos dépenses publiques d’investissement et nos transferts sociaux” sont “uniques au monde”.
La compréhension de la situation par le peuple va ainsi l’amener à “adhérer aux efforts nécessaires pour préserver l’indépendance de décision économique du pays” et rendrait possible “la poursuite d’une politique conforme à nos valeurs de justice sociale réelle et de solidarité nationale effective”.
En d’autres termes, et pendant que le peuple se serrera la ceinture, le gouvernement compte poursuivre la même politique : une économie dont le fonctionnement repose essentiellement sur la dépense publique. Et ce, malgré la diminution des recettes pétrolières.
La crise, pour grave qu’elle est, ne semble donc pas pousser le pouvoir à réviser sa doctrine : celle qui consiste à faire essentiellement reposer la vie économique et sociale sur la capacité de dépense publique. “L’indépendance de la décision économique” signifie, dans le langage officiel, que le régime ne veut pas renoncer à l’avantage politique qu’il tire du fait que la vie économique et sociale dépende d’abord de la décision politique. Pour cela, il ne doit pas se contenter de réguler l’activité économique et commerciale ; il doit la gérer. Le sort des milieux d’affaires comme celui des catégories sociales doivent dépendre de la volonté du pouvoir. De ce point de vue, la réponse à la crise n’est plus une conversion d’un système rentier en système de croissance productive.
Pour que le politique continue à surdéterminer la vie économique et sociale, le pouvoir renonce à la seule solution qui pourrait atténuer les effets de la crise financière : une croissance basée sur l’encouragement de l’initiative économique. Le monopole économique et social est garant du monopole politique. Et le développement est sacrifié pour s’assurer ce monopole politique.
Cette démarche illustre parfaitement le propos, communément cité, de la philosophe américaine d’origine russe, Ayn Rand : “Quand vous vous rendez compte que, pour produire, vous avez besoin de l’autorisation de quelqu’un qui ne produit rien… Quand vous vous rendez compte que l’argent, c’est pour ceux qui font des affaires non pas avec des biens mais avec des faveurs… Quand vous vous rendez compte que beaucoup sont devenus riches avec des pots-de-vin et une influence plus que pour leur travail, et que la loi ne nous protège pas de ces individus, mais qu’elle les protège à eux… Quand vous vous rendez compte que la corruption est protégée et que l’honnêteté mène au sacrifice de soi-même… Alors vous pouvez dire, sans avoir peur de vous tromper, que la société est condamnée.” Elle l’avait écrit en 1920 !