L’école et l’université rouvrent leurs portes aujourd’hui : Une rentrée sous haute tension

L’école et l’université rouvrent leurs portes aujourd’hui : Une rentrée sous haute tension

Depuis la démission du président de la République, après six semaines de mobilisation populaire, les rentrées scolaire et universitaire interviennent dans un contexte politique assez particulier. En effet, envoyés en vacances anticipées le 10 mars dernier, c’est aujourd’hui que les étudiants rejoindront leurs amphithéâtres même si les appels à la grève se sont multipliés ces derniers jours pour les dissuader de revenir à la fac. Des appels à des sit-in de protestation au sein des universités ont été aussi lancés ainsi qu’à des marches à travers le territoire national.

Par Wafia Sifouane

Partie intégrante du mouvement populaire du 22 février dernier, les étudiants, malgré les vacances anticipées et forcées, offertes par l’ex-ministre de l’Enseignement supérieur Tahar Hadjar, ont toujours répondu présents à l’appel de la rue. Ils ont d’ailleurs fait du mardi « leur journée » où ils manifestent aux côtés de leurs enseignants et animent des cercles de débats en plein air. Pour Abdelmalek Azzi, coordinateur national du Conseil national des enseignants du supérieur (Cnes), la rentrée promet d’être « compliquée », a-t-il estimé. « Il est vraiment difficile d’appréhender cette rentrée au vu de la situation.

Les étudiants devraient rejoindre les universités, mais je considère qu’ils sont des personnes majeures qui ont déjà prouvé que l’on pouvait leur faire confiance lors du mouvement populaire », a-t-il dit. Concernant le nouveau ministre installé par Noureddine Bedoui, Abdelmalek Azzi a indiqué que le Cnes est « complètement désintéressé » de faire connaissance avec le nouveau ministre. « Notre position est très claire, elle est celle du peuple qui rejette catégoriquement le nouveau gouvernement. C’est pour cela qu’il n’y aura aucune collaboration entre le Cnes et la tutelle », a-t-il affirmé. Alors que le Cnes a préféré resté neutre en laissant le libre arbitre aux étudiants, de nombreux enseignants universitaires les ont appelés à la raison pour rejoindre les universités.

C’est le cas de l’enseignant de droit au pôle universitaire de Koléa, Farouk Slimani, qui a lancé un message à ses élèves sur les réseaux sociaux, dans lequel il les a appelés à se « présenter en masse aujourd’hui et ne pas se laisser manipuler ou emporter par certaines parties malintentionnées qui veulent porter atteinte à l’université algérienne », a-t-il estimé. Le Cnes, aile Abdelhafid Milat, a pour sa part dévoilé un communiqué dans lequel il demande aux étudiants d’ignorer les appels à la grève, mais de maintenir la pression en participant au mouvement populaire sans pour autant déserter les universités. « Les étudiants qui ont fort soutenu le mouvement populaire peuvent continuer à le faire de manière organisée. Une heure par jour de protestation suffira.

Des sit-in peuvent aussi être tenus à l’intérieur des universités en plus de la marche du mardi qui est devenue une tradition. Mais il est hors de question de faire grève car cela ne peut être que néfaste pour les étudiants », a rapporté le communiqué. Du côté de l’Education nationale, les choses risquent d’être plus fluides si l’on se fie aux syndicats du secteur qui aspirent à préserver l’Ecole algérienne de toute dérive ou manipulation. C’est le cas du Conseil national autonome des personnels enseignant du secteur ternaire de l’éducation (Cnapeste). « L’Ecole algérienne doit rester en dehors de ce qui se passe dans le pays, car nul n’a le droit de jouer avec le destin de nos enfants. Que l’Algérie ait un président ou pas, que nous ayons un nouveau ministre de l’Education ou pas, nous considérons que rien n’a changé.

Les enseignants et le personnel des administrations se doivent de répondre à l’appel et être présents pour sauvegarder l’Ecole », a indiqué Messaoud Boudiba, porte-parole du Cnapeste. Concernant la grève nationale prévue le 10 avril, à laquelle a appelé la Confédération des syndicats algériens et qui touchera de nombreux secteurs-clés, à l’instar de l’éducation et de la santé, le syndicaliste a tenu à rassurer les parents des élèves. « Cette action de protestation s’inscrit dans le cadre de notre soutien au mouvement populaire, ce n’est qu’une journée de grève qui sera ponctuée par des marches à travers le territoire national. Si nous nous sommes organisés de la sorte, c’est pour éviter que les secteurs vitaux ne soient perturbés et ciblés par des personnes malintentionnées », a-t-il fait savoir. Concernant le nouveau ministre de l’Education nationale Abdelhakim Belabed, Messaoud Boudiba a indiqué que l’ensemble des syndicats du secteur ont décidé à l’unanimité de boycotter toute activité qui sera organisée par la tutelle.

« Nous avons été parmi les premiers à avoir refusé de rencontrer le Premier ministre dans le cadre des consultations lancées pour la formation de son gouvernement. Le peuple a rejeté le gouvernement de M. Bedoui et c’est aussi notre cas, car nous le considérons comme illégitime. Nous n’avons aucun problème avec la personne du ministre mais avec l’ensemble du gouvernement », a-t-il conclu.