Le vrai FLN est mort en 1962

Le vrai FLN est mort en 1962

Depuis la tenue du congrès de Tripoli, fin mai début juin 1962, convoqué, contre la volonté du GPRA (gouvernement provisoire de la République algérienne), sous la pression du duo Ben Bella-Boumediene, les congrès du FLN ne présentent ni enjeux ni surprises. À ce titre, le Xème congrès ne déroge nullement à la tradition. Ainsi, comme ceux qui l’ont précédé, il va renforcer –et c’est le moins que l’on puisse dire – le clan régnant.

Le plus regrettable dans cette histoire, c’est que cette course effrénée pour la mainmise sur l’Algérie est présentée comme une œuvre d’intérêt général. Quelle serait la réaction des valeureux martyrs, à l’instar de Ben Mhidi, Ben Boulaid, là où ils sont ? Leur déception ne devrait pas être moindre par rapport à celle ressentie par les Algériens vivants.

De toute évidence, pour maintenir cette emprise sur l’Algérie, un seul argument est constamment avancé : continuer l’œuvre des chefs historiques. Or, pour la majorité des Algériens, celle-ci ne peut pas justifier leur maintien au pouvoir dans la mesure où 90% de la population est née après l’indépendance.

Mais, dans la réalité, est-ce que les chefs historiques ont bénéficié d’un respect digne de leur sacrifice ? Faut-il rappeler que sur les six chefs historiques, ayant survécu à la guerre, le régime postindépendance a assassiné trois d’entre eux et emprisonné deux autres. Seul Rabah Bitat a échappé au mauvais traitement en choisissant de jouer un rôle subalterne.

Cela dit, si, pendant le règne du parti unique, le parti a été utilisé au service des hommes forts du moment, après l’ouverture démocratique, deux orientations se sont affrontées. La première est incarnée par des réformateurs, dont les têtes d’affiche sont Mehri et Hamrouche, et la seconde est représentée par ceux qui regrettent le pluralisme politique. Pour rappel, le chef de l’État actuel appartient à cette deuxième ligne politique.

Hélas, la victoire de celle-ci sur celle-là, après notamment le coup d’État scientifique contre Mehri en 1996, replonge le FLN dans ses pratiques ténébreuses. Du coup, il n’est pas étonnant à ce qu’on entende des commentateurs de la vie politique nationale parler du retour de l’article 120 –pendant le règne du parti unique, l’accès aux fonctions de haut rang est réservé aux militants du FLN –, sans qu’il soit pour autant inscrit dans les statuts du parti.

De la même manière, bien que les intentions de Ben Mhidi et de Saidani and Co soient aux antipodes, les dirigeants continuent à assimiler le FLN historique à celui d’aujourd’hui. Or, si Ben M’hidi a combattu le système colonial pour que l’Algérien devienne libre, il n’en est pas de même des dirigeants actuels qui œuvrent pour que le citoyen soit asservi.

Pour conclure, il va de soi que le FLN historique a accompli sa mission « pour l’indépendance de l’Algérie », pour reprendre le titre du livre de Saad Dahlab, ministre des Affaires étrangères du GPRA et principal négociateur de la délégation algérienne à la conférence d’Évian. À ce titre, si le FLN historique [1954-1962] représente le patrimoine de tous les Algériens, ces derniers ne se reconnaissent pas dans celui des luttes fratricides et des détournements des deniers publics. Du coup, pour que ce sigle ne soit pas sali, le mieux serait –comme le suggèrent beaucoup d’Algériens – de le mettre au musée.

Boubekeur Aït Benali