Les divers syndicats de la scène sociale s’activent depuis des mois afin de voir leurs revendications satisfaites, que ce soit le corps des greffiers, de l’éduction, des spécialistes de la santé, les retraités.
Chacun est à pied d’œuvre afin d’acquérir des droits. Mais montent-ils au créneau à la veille du vote afin de faire parler de leur cause ou pour participer de manière contestataire à la campagne, une façon de faire monter la pression auprès du gouvernement, focalisé sur l’échéance électorale du 10 mai ? Jointes par téléphone, les différentes corporations réagissent à nos interrogations.
Ainsi, M. Smaïl Alaouchiche, secrétaire national de la Fédération des retraités, affiliée à l’UGTA, nous indique que l’action des retraités s’inscrit dans une démarche normale. Ils attendent la revalorisation annuelle de leurs retraites. «On veut une augmentation de 15%, on attend la décision qui est prévue par la loi ; on va l’avoir sans problème parce que c’est le mois de mai et que chaque 1er mai, le taux de nos retraites est revalorisé. A ce jour, nous n’avons toujours rien, mais nous n’avons pas de revendications autre que celle-ci.»
Pour M. Larbi Nour, secrétaire général du Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement du secondaire (Snapest), la campagne électorale est l’affaire des partis politiques. «Les dossiers nous concernant sont ouverts avec la tutelle depuis 2010, nous n’avons donc pas l’intention de nuire au processus politique». Et d’ajouter : «Nous ne sommes pas partie prenante de ces législatives, nous n’avons pas à inciter les gens à y participer ou à les boycotter». Il reconnaît tout de même que le moment est opportun, car la grève est un moyen de pression pour arriver à des négociations favorables. Donc, «faire pression, oui, mais agir sur la campagne de manière contestataire, non».
Bon timing pour interpeller les députés
Pour M. Meziane Meriane, secrétaire général du Conseil national autonome des enseignants du secondaire (Cnapest), la lecture que l’on peut faire de ces événements, c’est qu’il y a un malaise profond depuis longtemps et pas de solutions proposées par la tutelle. Il ajoute qu’en ce qui concerne sa corporation, les syndicats de l’éducation n’ont pas attendu les élections pour revendiquer leurs droits. «Il y a toujours eu des grèves, des sit-in, une effervescence.»
Mais il reconnaît que cette période est propice aux manifestations, ajoutant que «c’est le bon timing pour interpeller les députés sur nos revendications. Nous avons eu des acquis avant. Aussi, manifester juste à l’orée du vote, c’est une façon de faire participer les députés à nos problèmes. Nous menons un combat avec la tutelle depuis 2003, et chaque année, le problème n’a pas été résolu». Dans cette optique, il affirme que le combat syndical ne va pas finir avec l’échéance électorale.
«Ce n’est pas pour faire du tapage médiatique, mais nous n’attendrons pas de conjoncture particulière pour monter au créneau.» Et d’ajouter : «Même si la période est propice, par respect pour toutes les sensibilités politiques au sein de notre syndicat, nous n’avons pas de position partisane.»
Par ailleurs, M. Merabet, secrétaire général du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSSP), nous indique que la démarche de sa corporation n’est pas tributaire du scrutin du 10 mai et qu’elle ne veut pas nuire à cette échéance électorale. Il ajoute tout de même que les syndicats du monde entier manifestent toujours à la veille d’élections afin d’augmenter la pression sur la tutelle.
Précisant que leurs revendications perdurent depuis 2009, il s’interroge sur la tutelle qui laisse traîner les choses. «Cela fait 4 ans que l’on attend les promesses de la tutelle. Le statu quo perdure, mais le 10 mai, nous sommes des citoyens comme les autres.»
Loin des calculs électoraux
Pour M. Youfsi, secrétaire général du Syndicat national des spécialistes de la santé publique (SNPSSP), mettre en parallèle l’ébullition du front social et l’approche des élections n’est pas une bonne analyse. «Notre combat n’a rien de politique, c’est l’étiquette qu’on nous colle, or nos revendications sont d’ordre socioprofessionnel. Nous voulons encourager nos spécialistes à rester dans le secteur public et pour ce faire, nous devons bénéficier d’un environnement favorable pour que le malade ait une bonne prise en charge.»
Et d’ajouter : «Nous avons une plateforme de revendications depuis 2 ans et je démens tout ce qu’a déclaré la tutelle au sujet d’un prétendu règlement du problème. Tout le monde a eu une augmentation, sauf nous. En conséquence, nous défendons nos droits.»
Il affirme que le timing n’a rien à voir avec leur action. «Nous avons eu une dernière rencontre avec la tutelle le 24 octobre 2011, à cette époque, nous n’étions pas au courant des élections du 10 mai. Les 4, 5 et 6 mars, nous avons débuté notre mouvement et si la tutelle avait voulu régler notre situation, nous n’en serions pas là. Ce n’est pas la première fois que ce scénario a lieu, nous sommes loin des calculs électoraux, le problème se pose aujourd’hui, et se posera demain.» Quant à la corporation des greffiers affiliée au SNAPAP, le secrétaire général,
M. Mourad Kidad, a indiqué que le mouvement s’inscrivait dans une démarche normale, la grève étant un droit inscrit dans la Constitution.
«Nous n’exerçons aucune pression sur l’Etat, nous aimons notre pays, nous nous sommes surpassés pendant la décennie noire, cependant l’Etat refuse le dialogue. Plus de 2000 greffiers ont été isolés, nous nous sommes vu fermer les portes des négociations et nous avons même fait l’objet de menaces.» Pour M. Malaoui, cadre du SNAPAP, «chaque année il y a des élections. Notre démarche s’inscrit dans un cadre normal, nous n’avons pas choisi ce timing exprès, le combat continue».
Sabrina B