Nasser Sandjak, ancien entraîneur national, en plus d’être consultant sport sur la radio Beur FM aux côtés de Mohand Marouf, est revenu à son club de toujours, Noisy-le-Sec, où il aide à éclore au plus haut niveau des jeunes issus de l’immigration à qui les centres de formation ont fermé les portes.
Nasser Sandjak nous a déclaré :
«Aujourd’hui, cette affaire fait l’effet d’une bombe, car elle a été mise sur la place publique, mais dans le monde du football français, c’est un secret de polichinelle. Nous, cela fait deux ans que nous en parlions sur la radio Beur FM, mais l’avantage avec Mediapart, c’est que c’est un média crédible, de chez eux, et qui ne peut pas être taxé de communautariste. Cette stratégie des quotas a été décidée à très haut niveau au lendemain du match France-Sénégal perdu en mondovision, 1 but à 0, par les Bleus, lors de la Coupe du monde Japon-Corée, étant donné que le Sénégal ne comptait que des joueurs ayant évolué ou ayant été formés en France. Même la qualification de l’Algérie, pays qui n’est pas dans les petits papiers de la France avec un groupe essentiellement formé en France, ça a fait très mal à certaines personnes et au monde politique français.
Le problème, c’est que cela va à l’encontre de la FIFA de Sepp Blatter qui, pour monter l’audimat de certains matchs de Coupe du monde, soporifique et avec un niveau très bas et pour éradiquer les 8-0 en Coupe du monde, a décidé pour élever le niveau des équipes africaines de puiser dans le réservoir des centres de formation européens. Si Algérie-Angleterre a été programmé à 20h30, en prime time, le moment où les pages de publicité sont les plus chères, et non à 14h dans un stade secondaire, s’il y a eu 0-0 et un jeu plaisant, c’est grâce aux binationaux. Pour la FIFA, les rentrées d’argent, ce n’est pas négociable même face à la Fédération française. Moi qui affronte chaque samedi les réserves pros dans le cadre du championnat CFA, je peux vous dire que ces quotas se pratiquent depuis très longtemps dans certains grands clubs qui ont servi de «laboratoires» à la DTN où il n’y a que des joueurs blancs. A la manière de Luis Aragones, l’ancien sélectionneur de l’Espagne, seul le numéro 6 et le défenseur central sont Noirs, tout le reste est blanc.
C’est plus des Beurs qu’il s’agit
Dans cette affaire, on met beaucoup en avant la discrimination des joueurs blacks, mais en réalité, c’est plus des Beurs qu’il s’agit. Les joueurs noirs, hormis la CAN, n’ont pas trop de problème dans le football français, le problème concerne plus les joueurs «beurs» qui cumulent tous les problèmes, car le véritable problème, c’est l’Islam et surtout le Ramadhan dont le football français ne veut plus entendre parler.
Les Beurs, en plus de la CAN et de la «binationalité» comme ils disent, ont le problème de la religion qui plombe leur carrière. C’est à cause du Ramadhan qu’on les a taxés de l’étiquette de joueurs ingérables. De plus, les centres de formation ont un autre problème, c’est qu’ils ont du mal à gérer la nouvelle génération de jeunes Français et je dis bien Français, surtout ceux originaires de la banlieue. Des jeunes que nous, nous gérons sans problèmes et au quotidien dans nos clubs de banlieue. Le vrai problème, ce n’est pas d’instituer des quotas, mais plutôt de mettre des éducateurs dans les centres de formation qui connaissent et maîtrisent les codes de cette nouvelle génération.
Eux préfèrent garder les gens en place advitam aeternam et instituer des quotas discriminatoires, c’est leur droit, mais ils s’exposent à des poursuites judiciaires d’associations antiracistes ou de parents qui ont vu leurs enfants refoulés pour des raisons ethniques et non sportives. Le problème, et il faut bien le comprendre, c’est qu’on ne veut plus que les jeunes issus de l’immigration bénéficient d’une partie du gâteau football. Les Blacks et les Beurs, bridés dans tous les rouages de la société française, n’avaient comme ouverture que la musique et le football pour exister, on a décidé en haut lieu que le football et ses millions d’euros devaient, à l’image du reste, être verrouillés.
Le véritable problème, ce sont les millions d’euros…
Mais cela ne reste qu’une partie du problème, le véritable fond du problème, ce sont les millions d’euros engendrés par la formation. Lorsqu’une équipe est championne du monde, c’est sa formation et son système de jeu qui sont aussi champions du monde. Le jeu de ce pays devient une marque de fabrique, tous les pays veulent s’en inspirer pour progresser et la DTN du pays champion du monde envoie, contre forte rémunération, des entraîneurs et des formateurs dans le monde entier pour former les pays à jouer à la manière du champion.
Pendant très longtemps, la référence, c’était le Brésil qui a gagné des milliards en exportant ses techniciens et ses joueurs à travers le monde. Après 1998, c’est la France avec son système de bloc défensif basé sur la récupération du ballon qui s’est taillé la part du lion avec «la formation à la française» qui a permis d’exporter les éducateurs dans le monde entier et de vendre les jeunes joueurs français au prix fort dans les plus grands clubs du monde. Aujourd’hui, c’est l’Espagne, avec son système à la «barcelonaise» basé sur les petits gabarits, la vitesse et la technique qui domine la planète football en clubs comme en sélections et tout le monde, y compris la France, qui privilégiait l’impact physique et les grands gabarits, veut s’en inspirer pour ne pas rater le wagon des dix prochaines années.
Et la volonté de Laurent Blanc était de redéfinir les critères de sélection des jeunes pour avoir dans 7 ans des Xavi, des Messi et des Iniesta et non plus des Allou Diarra. Le seul problème, c’est qu’il s’est exprimé en se basant uniquement sur des critères ethniques et pas sur le style de jeu des gamins. Le problème, c’est qu’à l’âge de 12 ans, le jeune Lionel Messi, avec les critères de la formation à la française, aurait été refoulé de tous les centres de formation, et aujourd’hui, le mot d’ordre est clair, ils ne veulent pas rater le prochain Zidane.»
M. B.