Le rapatriement des nationaux et des délégations étrangères, sur instruction du gouvernement algérien, a mobilisé tous les moyens nécessaires pour la réussite de l’opération, en allégeant les procédures et avec une présence renforcée sur le Tassili II, notamment de médecins et de psychologues.
La délégation du Sahara occidental a eu droit à un traitement particulier à l’accueil et une prise en charge totale, au même titre que les ressortissants des autres pays. Concernant les nationaux, un dispositif a été mis en place par la solidarité nationale, à travers l’acheminement des Algériens rapatriés vers toutes les wilayas du pays. Une centaine de bus a été réservée à l’occasion.
Mais cela a semblé insuffisant pour apaiser la majorité d’entre eux, notamment les familles. Etablis depuis de longues années en Libye, plus de vingt ans pour certains, des pères de familles se sont retrouvés sans travail et sans logement du jour au lendemain. «Les choses se sont précipitées pour nous.
On a tout laissé là-bas. Que deviendrons-nous maintenant ?», s’interroge Mohand, chauffeur de taxi depuis 20 ans en Libye.
Kamel, établi depuis 1994, lui, a eu le pressentiment que les choses allaient se dégrader et a fait venir sa famille il y a quatre mois.
Les témoignages recueillis auprès des rapatriés, en particulier ceux domiciliés à Benghazi, font part de la violence des atrocités et du climat de psychose qui prévaut là-bas. «Nous avons vu des adolescents conduire des chars ; porter des armes lourdes ; des avions bombarder un entrepôt d’armes autour duquel de nombreuses personnes faisaient des va-et-vient ; des dizaines de morts sont enregistrés au quotidien», selon diverses témoignages recueillis à l’arrivée.
«Toute ma vie est organisée en Libye. Maintenant, me voici les mains vides. Que dois-je faire, quel sera mon sort ?», s’exclame Farouk, travaillant dans une société d’aluminium et de décor, gagné par la panique. «Je sais qu’ils auront faim demain», ajoute-t-il, en désignant du doit sa femme et ses deux enfants.
Le climat d’incertitude et l’absence de perspective véritable a affecté la majorité des rapatriés nationaux.
Les «One, Two, Three, Viva l’Algérie !» scandés à gorges déployées au débarquement dans une ambiance de fête et d’euphorie se sont vite estompés, bousculés par la réalité qui risque d’être dure pour ces citoyens. «Que peuvent nos familles pour nous ? On ne peut pas être pris en charge indéfiniment par nos proches. Franchement on a peur.
On se retrouve chômeurs, alors qu’on pensait résoudre la difficile équation du chômage», s’exclame un groupe de jeunes travailleurs contractuels en Libye, partis il y a juste quelques mois. «C’est, une fois encore, le saut dans le vide. C’est le retour à la case de départ, vous savez, ce n’est pas facile. On souhaite simplement que l’Etat suivra de près notre cas», espère Boualem de Tipasa.
On a appris que les rapatriés se sont constitués en collectif pour suivre de près l’évolution de leur situation, Salah (Mila), Amer (Constantine), Boualem (Tipaza) et les autres seront-ils rassurés ?
A. K