Les indiscrétions, qui n’hésitent pas à faire état de «pots-de-vin» versés, afin que le système se déclenche à Oran environ une heure avant Alger, parle de centaines de milliards perdus par des importateurs victimes de cette situation pour le moins ubuesque.
La Douane algérienne a frôlé l’émeute hier. En effet, des dizaines d’importateurs s’étaient massés, tôt le matin, devant le siège de Bézier, en vue de protester contre un «bogue» qui ne semblait pas en être un.
Il s’agit du déclenchement du système qui permet la suppression des taxes douanières concernant divers produits importés, mais suivant des quantités bien précises chaque année. Les premiers arrivés sont donc automatiquement les premiers servis.
On comprend les raisons de cette incommensurable colère, lorsque l’on sait que le système s’est déclenché à Oran aux environs de 9 heures 15, alors qu’à Alger il ne s’est mis en marche que plus d’une demi-heure plus tard.
Pour la bonne compréhension de la nature de ce scandale, qui promet de faire couler encore pas mal d’encre et de salive, il faut souligner également que les autres ports du pays ne sont pas dotés de ce système, et fonctionnent donc de manière archaïque. Si bien que ce même système est géré par le CNIS à l’échelle nationale.
Des sources proches de ce dossier, que nous avons pu contacter hier, nous ont expliqué que par exemple pour une affaire d’importation de taurillons, taxés à 32 %, la malheureuse victime est obligée de payer une somme de plusieurs milliards, si la taxe est de 50 000 dinars par bête, et si l’opération concerne plusieurs milliers d’entre elles.
La direction de la Douane, qui a saisi l’ampleur de cette «bévue», a tenté d’étouffer le scandale en invitant les protestataires à une séance de travail au niveau du siège de la direction générale, où même en montrant patte blanche il était impossible de se faire admettre ni même de voir distiller la moindre indiscrétion.
À force de persévérance, toutefois, nous avons pu apprendre que les responsables des Douanes qui ont reçu les protestataires ont évoqué une simple «erreur». Une erreur de plusieurs centaines de milliards, hélas. Et qui ne peut en aucune manière être rattrapée, pour la simple raison que les premiers arrivés sont automatiquement les premiers servis, concernant divers produits comme le sucre, l’huile, le blé… Etc.
Les importateurs, chauffés à blanc, disent ainsi qu’ils ne comptent pas se laisser faire aussi facilement, d’autant que l’on évoque des « pots de vin » qui auraient été versés, afin que cette erreur se produise, et qu’une première liste des importateurs exonérés d’impôts douaniers aurait été «remaniée» par la suite, si bien que même à Alger des opérateurs classés bons derniers seraient arrivés les premiers et vice-versa.
On parle, aujourd’hui, d’importateurs ruinés, car ne disposant pas de la somme requise, alors qu’ils étaient certains de profiter de cette exonération des taxes douanières. Toutes nos tentatives pour joindre la direction générale des Douanes afin d’avoir sa version des faits sont demeurées vaines. Le dossier reste donc à suivre…
Ali Oussi