La crise du Sahel risque de faire des émules. Y compris dans des pays comme l’Algérie qui, s’il ne fait pas beaucoup d’efforts de développement en direction de ses régions du Sud, risque de connaître des soulèvements de population. L’avertissement vient d’universitaires qui, durant une journée de débat organisée lundi dernier à Alger, ont tenté de disséquer les origines de la crise dans le Sahel.
Enseignant à l’université de Blida, Saïd Mekki a expliqué que l’Algérie doit profiter de son aisance financière pour développer les régions du Sahara. Pis, faire de Tamanrasset une capitale régionale ne fera que valoriser cette région qui a besoin de vrais plans de développement. L’avis de l’enseignant, rapporté par l’APS, est largement partagé par beaucoup d’autres intervenants qui, citant l’exemple du Nord Mali, ont averti sur les fâcheuses conséquences d’un sentiment d’abandon des populations qui habitent ces régions. Car, en plus de la spécificité ethnique, ces populations se plaignent du dénuement socio-économique.
A l’origine, le conflit du Nord Mali a un soubresaut social. Car, malgré la reconnaissance politique de la culture touarègue, les régions désertiques du nord manquent pratiquement de tout. Ni écoles, ni eau potable, ni de vrais hôpitaux. Cela s’ajoute à un chômage endémique qui ravage les jeunes de la région.
La situation est tellement préoccupante que la dimension économique a fait partie des clauses contenues dans les accords d’Alger, signés en 2006, entre le MNLA (Mouvement national pour la libération de l’Azawad) et l’Etat central. Mais, faute de moyens et sans doute de l’absence de volonté politique, l’Etat central n’a pas tenu promesse. Il a laissé toute cette immense région patauger dans l’extrême pauvreté. Et les 10 millions de dollars versés par l’Algérie pour la construction d’écoles et le raccordement des populations aux réseaux d’eau potable semblent être comme une goutte d’eau dans un océan.
L’Algérie n’est pas confrontée à un problème aussi grave que ce qui se passe au Mali ou au Niger. Mais depuis les années 1990, des groupes de jeunes issus du Grand Sud revendiquent leur droit au développement. Certains ont même fait connaître leurs revendications de manière assez violente. C’est le cas de ces jeunes de Djanet qui, en 2002, avaient attaqué l’aéroport de Djanet, dans la wilaya de Illizi.
L’Etat algérien a toujours sur faire face à ces problèmes. Il a utilisé, jusque-là, les notables de la région qui font encore le poids pour calmer les populations locales. « Mais cela n’est plus évident », nous a confié récemment un député local, très respecté dans la région de Tamanrasset.
Pourtant, depuis des années, l’Algérie a engagé de grands projets de développements dans la région. A commencer par l’un des plus grands projets de transfert d’eau dans le monde. L’Etat a en effet engagé un budget de 2,5 milliards de dollars pour alimenter la ville de Tamanrasset en eau potable à partir de In-Salah. Plusieurs villes du sud, telles que Adrar, Tamanrasset et Tindouf ont même été dotées d’universités ou de centres universitaires. Ceci en plus du fait que le taux d’électrification de ces régions dépasse 95%. Mais beaucoup reste à faire, notamment dans le domaine social.
Essaïd Wakli