Le ministre Ould Kablia a fait part de ses craintes concernant l’abstention qui, dit-il, le hante, tandis que le Premier ministre Ahmed Ouyahia avoue qu’il redoute l’abstention et non pas la victoire des islamistes.
Comment réconcilier les Algériens avec les urnes ? L’obsession de l’abstention taraude les esprits. Loin d’être considérée comme un boycott délibéré, la crainte d’une forte abstention aux prochaines législatives prévues en mai semble hanter aussi bien le gouvernement que la classe politique. Le spectre des législatives de 2007 avec un taux d’abstention de 65% plane toujours, un scénario qui peut se reproduire fort probablement en mai prochain.
Il ne s’agit pas là d’un pronostic, mais d’une vérité, voire un problème auquel gouvernement et acteurs politiques doivent faire face. Ceci dit, la question de l’abstention en Algérie reste posée. L’abstention, cette tendance de dissidence civique, interpelle le gouvernement auquel le peuple algérien semble avoir retiré sa confiance. Le gouvernement semble avoir pris acte et conscience de ce «divorce» qui en dit long sur la détérioration du rapport administration/ citoyen. Ahmed Ouyahia, secrétaire général du RND et Premier ministre, avait déclaré le 8 janvier dernier à l’issue des travaux de la 5e session du conseil national de son parti : «Nous ne redoutons pas les islamistes mais l’abstention». Les craintes du Premier ministre concernant un éventuel taux d’abstention aux prochaines législatives dénotent d’un manque de répondant électoral à un scrutin qui marquera l’entame d’une nouvelle ère après l’adoption d’une palette de lois inscrites dans le cadre des réformes politiques. Le ministre de l’Intérieur, Daho Ould Kablia, prend également la chose au sérieux et craint une abstention massive. «L’abstention est une crainte qui me hante, compte tenu du scrutin législatif par le passé qui n’a pas mobilisé grand monde», a-t-il avoué il y a quelques jourssur les ondes de la Radio nationale. Le ministre de l’Intérieur, faisant allusion aux législatives de 2007, a expliqué que «c’est le scrutin où il y a le plus fort taux d’abstention, comparativement aux élections locales où les intérêts sont plus grands, et aux élections à caractère national telles que les élections présidentielles ou les référendums».
Du reste, Ould Kablia a mis en évidence les appréhensions soulevées par ceux qui boycottent sous prétexte que le résultat était connu d’avance.
A défaut de pouvoir ramener l’électoral sur le chemin des urnes, le ministre de l’Intérieur a promis d’assurer la transparence et de rassurer le citoyen. Comment ? D’après lui il suffit de «dire au citoyen qu’il n’a rien à craindre par rapport à la fraude et que son choix sera respecté». Ce faisant, Ould Kablia recommande aux partis politiques de désigner des candidats crédibles. L’Algérien qui ne croit plus au discours des politiques ne l’entend pas de cette oreille. Du côté de la classe politique, l’abstention est un défi auquel les partis politiques font face. «C’est un problème important qui se pose pour l’ensemble des formations politiques et qu’il faut affronter sérieusement», a reconnu Kassa Aïssi, porte-parole du FLN.
Ces craintes sont justifiées, d’autant plus que l’électorat, cet élément indissociable qui légitime l’acte de vote, semble manquer.
Ce chaînon manquant risque de fausser les calculs et pronostics politiques des uns et des autres.
Par Yazid Madi