Les syndicalistes improvisent une marche à Alger
Refoulés par les policiers à quelques mètres de l’entrée du ministère du Travail, les délégués syndicaux ont improvisé une marche sous la haute surveillance des agents de sécurité avant de tenir un sit-in face à la BEA de la place de la Concorde (ex-1er-Mai) pour scander : “Arrêtez le vol des milliards !”
Au moment où le ministre du Travail et de la Protection sociale était “l’invité de la rédaction” de la Chaîne III, un important dispositif sécuritaire se mettait en place pour barricader le passage des délégués syndicaux qui se sont “auto-invités” pour un sit-in devant le département de Tayeb Louh.
En effet, deux heures avant le sit-in prévu à 11 heures, une dizaine de véhicule Nissan étaient stationnés à quelques mètres de l’entrée du ministère. D’autres fourgons s’étaient immobilisés au niveau des ruelles avoisinantes.
Le dispositif “répressif” était tel que passants et habitants de la rue Mohamed-Belouizdad étaient inquiets et chuchotaient des “que se passe-t-il ?” Las d’attendre, les policiers mobilisés faisaient les cent pas sur les trottoirs.
Certains n’ont pas hésité à faire les magasins du coin. Une demi- heure avant le rendez-vous des syndicalistes, le dispositif sécuritaire n’était plus visible.
Les policiers arrivés en Nissan ont quitté les lieux et seuls les fourgons étaient toujours parqués dans les ruelles. Des petits groupes de syndicalistes et de journalistes commençaient à se former.
Une fois réunis, les délégués syndicaux se sont dirigés vers l’entrée du ministère du Travail en exhibant le portrait du regretté Redouane Osmane qui a jeté les bases de la lutte syndicale du CLA avant d’être terrassé par un arrêt cardiaque.
Sur des pancartes on pouvait lire : “Non à la hogra”, “Non à la marginalisation” , “Pour les libertés syndicales”…
Les syndicalistes, appuyés par la présence de l’ex-syndicaliste le Dr Besbas Tahar, député RCD, qui était derrière les premières grèves des médecins, scandaient en marchant vers l’entrée du département de Tayeb Louh : “Arrêtez de voler les milliards!”, “L’Algérie libérée pour subir la hogra”, “Non à la répression”… Ils sont accueillis par des policiers qui leur interdisent d’approcher plus et de les forcer à reculer.
Tout en reculant, les délégués syndicaux scandaient à tue-tête les différents slogans sous les encouragements des passants qui n’ont pas hésité à reprocher aux policiers leur attitude.
“Laissez-les s’exprimer, pourquoi les en empêcher puisque c’est une action pacifique”, lance un sexagénaire.
Et une autre dame d’ajouter : “Ils ont raison de dénoncer le mal-vivre et la dégradation du pouvoir d’achat. Laissez-les tranquilles”. Ce genre de commentaires étaient lancé par les passants dans chaque rue et ruelle empruntées par les délégués syndicaux.
Constamment poussés à reculer par les agents de sécurité, les protestataires ont improvisé une marche du siège du ministère du Travail et de la Protection sociale à travers différentes rues de la place du 1er-Mai avec des haltes bloquant la circulation.
Du département du travail en passant par l’APC de Belouizdad et le siège de l’UGTA, les syndicalistes ont tenu tête aux nombreux policiers qui les ont suivis à travers leur marche en tentant de les convaincre de stopper leur action. Mais c’était peine perdue. Arrivant à la rue Hassiba-Ben-Bouali, à quelques mètres de la Maison de la presse, les délégués syndicaux ont tenu un sit-in face à la Banque extérieure d’Algérie de la place du 1er-Mai.
Lieu symbolique sur lequel ils ne se sont pas rabattus fortuitement.
“Arrêtez le vol des milliards”, “Non à la corruption”, n’ont cessé de crier les syndicalistes. Ils seront violemment remis à l’ordre par un policier qui lance : “Arrêtez ce que vous dites.”
Les syndicalistes lui rétorquent en chœur : « À bas la répression ! Vive la liberté d’expression !” Sur ce, ils décident de mettre fin à leur mouvement et de se donner rendez-vous le mois prochain pour une action similaire. “Aujourd’hui, ce n’est qu’un avertissement auquel ont pris part les délégués syndicaux. Si les autorités persistent dans leur sourde oreille, la prochaine fois nous appellerons les travailleurs à prendre part à l’action”, avertit M. Tchiko du Snapap.
Le porte-parole du CLA enchaîne : “Les pouvoirs publics veulent profiter des vacances scolaires pour faire passer leurs lois. Nous leur disons qu’il y aura toujours une rentrée.” Et de conclure : “Si pour les pouvoirs publics il faut travailler plus pour gagner moins, pour nous, notre slogan est travailler moins et gagner plus.”
MALIKA BEN