Il ne fait aucun doute, au regard de l’agitation enfiévrée qui a prématurément gagné l’ensemble de nos responsables politiques, que celle-ci n’est qu’«accessoirement» liée aux élections locales du 29 novembre prochain. Il devient de plus en plus évident que ce vote sera une sorte de répétition générale avant le scrutin présidentiel de 2014.
Amar Ghoul donne l’air de l’avoir compris, lui qui a clairement affiché la couleur en indiquant être d’ores et déjà présent à tous les rendez-vous électoraux.
Ainsi donc, et même si l’ancienne mascotte du parti de Bouguerra Soltani donne l’air d’être concentré sur les élections locales du 29 novembre prochain, il fait tout, d’ores et déjà, pour montrer à tous qu’il a déjà endossé son costume de présidentiable, et qu’il est dès maintenant braqué sur l’échéance de 2014.
Finalement, le TAJ de Amar Ghoul, ce tout nouveau parti qui promet de beaucoup faire parler de lui, et de faire couler encore force et salive, donne bel et bien l’air d’être la seconde formation politique algérienne a naître avec des moustaches.

L’immense salle du Sheraton, où s’est déroulée une sorte de répétition grandeur nature avant la tenue du congrès constitutif de ce parti les 21, 22 septembre, s’est montrée par trop exigüe pour contenir la foule nombreuse venue prendre part à cet «évènement historique».
Ghoul, ce sympathique et très communicatif ministre des Travaux publics, à qui l’Algérie doit son autoroute est-ouest (en attendant le déroulement du procès lié à cette affaire, prévu pour la prochaine session criminelle, a-t-on pu apprendre), et dont il s’était même servi pour mener sa campagne comptant pour les législatives, avant de se faire sévèrement tancer par la commission de surveillance de ce scrutin, Ghoul disonsnous ne fait plus du tout secret de ce fait avéré qu’il a le vent en poupe, et qu’il donne l’air de jouir d’une «baraka» qui lui promet qu’il ira très loin.
Voilà pourquoi, au reste, il a cherché à ratisser le plus largement possible, braconnant, certes sur les territoires privés de son ancien parti le MSP, mais aussi au sein de la mouvance islamiste et ses nombreux mécontents, dans les rangs dispersés et indécis d’un RND toujours dans l’attente d’un signe venant d’en haut, au sein du FNA désagrégé de Moussa Touati, et même dans les rangs très fournis des mécontents du FFS de Hocine Aït Ahmed.
Ainsi donc, et même si le TAJ incarnera à son corps défendant la mouvance islamiste modérée et entriste en la personne de son seul et unique fondateur, il n’en demeure pas moins que ce dernier lui réserve un destin autrement plus grand et plus prometteur.
UN PREMIER TEST POUR LE TAJ
Ainsi donc, et même si le vote du 29 novembre prochain devrait être le test décisif pour le TAJ, force est de supposer que ce parti a toutes les chances de rééditer le «miracle» du RND au lendemain de sa création en 1997. À peine deux mois après sa naissance, en effet, il raflait la mise aux législatives et aux locales, et damait largement le pion à son actuel frère ennemi qu’est le FLN. Certes, il est quasiment exclu que le TAJ réédite un pareil exploit, lequel avait, on s’en souvient, déclenché une protesta qui avait duré pendant plus d’un mois.
L’Algérie, qui fait attention à ne pas « prendre froid » sous l’effet des bourrasques déclenchées par le printemps arabe, gagnerait largement à entamer une décantation politique salvatrice pour tous.
Bref, le TAJ, et cela dépendra en partie de ses résultats lors des élections locales du 29 novembre prochain, justifiera sa raison d’être immédiate par la nécessité de remplir le vide laissé par le MSP, qui a découvert sur le tard les «vertus» de l’opposition, claquant violement la porte de l’Alliance présidentielle. C’est ainsi que le TAJ de Ghoul devrait l’y remplacer séance tenante.
Se poserait dès lors la question de savoir si le président de la République attendra cette date avant de procéder à un remaniement du gouvernement pour accorder à Ghoul ce qui lui reviendrait de plein droit, et sceller le divorce officiel d’avec le parti de Bouguerra Soltani, dont les ministres restent étrangement présents au sein de l’équipe gouvernementale, ou bien ira-t-on vers un remaniement à deux temps puisque l’urgence de la rentrée sociale impose au moins de remplacer les six fauteuils demeurés vacants depuis le mois de mai passé, avec toutes les conséquences fâcheuses que cela a eu sur des secteurs sensibles, dont certains touchent carrément à la sécurité nationale.
Ce n’est pas peu dire, en effet, que de préciser ici que la question des prix, de la spéculation, des salaires et même de la distribution de médicaments et autres en arrivent à relever de la sécurité nationale, tant la tension sociale n’en finit plus de monter depuis les sanglantes émeutes qui avaient eu lieu chez nous il y a de cela environ deux ans.
IL EST PERMIS DE RÊVER, MAIS…
Mais par delà ces contingences, conjectures et spéculations pressantes et oppressantes, force est de constater que Amar Ghoul, de par son comportement, son discours et ses assurances, se projette déjà à l’horizon des élections présidentielles de 2014.
Qu’il ait ou non reçu des «garanties», en effet, il donne l’air d’être le premier candidat quasi officiellement déclaré. Ghoul, et même s’il choisit un autre chemin que celui de son ancien mentor, Bouguerra Soltani, joue ainsi la carte islamiste, espérant surfer, lui aussi, sur la vague des printemps arabes.
C’est ainsi que si le président du MSP avait pensé décrocher le jackpot en passant violemment vers l’opposition, après toute une vie passée à l’ombre et au service du pouvoir, Ghoul se donne un air plus pondéré, oeuvrant au contraire à prendre la place de son ancien mentor, tout en arborant l’image de l’islamiste BCBG, carrément moderniste, ouvert à toutes les tendances et pouvant, dès lors, prétendre jouer le rôle du «candidat consensuel».
Il est certain, cependant, que pas mal d’outsiders, et non des moindres, devraient afficher leurs «prétentions» dans les prochains mois, au point de remettre sérieusement en cause les ambitions démesurées de cet «hyperministre ». Mais en attendant, il lui est quand même permis de rêver, quoique le poète avait eu ce conseil avisé en direction de tous les rêveurs invétérés : «Une place pour les rêves, mais les rêves à leur place».
Wassim Benrabah