Le bus était plein à craquer. Il allait de la Place des martyres vers la Place 1er mai. Une femme en burqa, confortablement assise, toise une jeune fille en pantalon taille basse, visiblement mal à l’aise. » Pourquoi tu ne te couvre pas bien ? « , interroge la femme en burqa dont on ne voit que le noir des yeux.
La fille au pantalon taille basse s’ir- rite : » fais d’abord voir ton visage que je sache à qui j’ai affaire ! « … quelques rires d’approbations et des soupires de désolation se font entendre par-ci par-là dans le bus, qui brusquement se replonge dans le silence ; que les ronflement du moteur se faisaient entendre.
C’est un autre bus à moitié vide. Un jeune d’à peine 20 ans, mettant un casque d’où des bribes de musique agitée jaillissaient, tire un chewing-gum de l’une de ses innombrables poches. Il jette l’ » emballage » à deux pas de lui. Un homme barbu en gandoura s’incline et le ramasse. Après l’avoir bien scruté, il lance au jeune qui ne l’entendait qu’à peine : » si tu avait bien lu, tu ne l’aurais pas acheté. C’est fait avec du hellouf (porc, ndlr).
C’est haram ! « . Le jeune, indifférent, remet son casque, et le barbu continue à rappeler, à celui qui voulait l’entendre, le percepte de l’Islam des premiers siècles : le salafisme. Pour toute personne fréquentant les transports en commun, les cafés maures, les quartiers populaires… les scènes comme celles que nous venons de lire, ne sont pas rares. Mais la rue, les bus, les cafés… ne sont pas les seuls endroits que les salafistes wahhabites fructifient pour le bien de leurs » doctrine « .

La mosquée aussi, en dépit du fait que l’Algérie ait vécu toute une décennie de terreur, à cause de l’extrémisme religieux, est employée à ces fins et ces pratiques.
Les imams soft tirent la sonnette d’alarme
Dans cet état de faits, les imams algériens se sont résolus à combattre ce qu’ils appellent ouvertement « la pieuvre wahabite ». La tâche n’est évidemment pas facile, et le long chemin parcouru jusque-là, n’est qu’une infime partie de leur entreprise de « nettoyer les mosquées ». En effet, Après plusieurs réunions marathon tenues ces derniers jours, ils ont pu finaliser les préparatifs pour la création d’une coordination nationale des imams (CNI) dont la mission principale est de « nettoyer les mosquées de la pieuvre salafiste qui étend ses tentacules sur la société » algérienne.
L’initiative est conduite par l’éminent cheikh Djelloul Hadjimi, actuel imam de Télemly à Alger, lequel mène depuis des années, le combat contre « le salafisme wahabite » qui gagne du terrain en Algérie et constitue une « réelle menace sur la cohésion nationale et les valeurs de la République ».
Les initiateurs, conscients du danger que représente le wahhabisme, compte bien reprendre les choses en main, en récupérant en premier la mosquée : Ils comptent dans les prochains mois, dresser une cartographie du salafisme en Algérie, avec la liste d’imams dits « irrécupérables » que l’Etat devra impérativement changer.
Dans tous les cas de figures, les imams réputés » soft » auront bien du pain sur la planche, puisque « un véritable bataillon religieux se livre pour l’endoctrinement d’enfants et de jeunes adolescents à travers des programmes conçus dans les laboratoires wahabites au Qatar et en Arabie Saoudite », soutiennent les initiateurs.
» Les salafistes considèrent que les Algériens soient loin de la religion et qu’il faille les rééduquer de nouveau, selon un modèle importé, qui a échoué même à corriger les siens « , assure M. Fares Mesdour, fervent défenseur d’un Islam modéré.
En effet, les salafistes sont connus pour leur rejet de la référence religieuse algérienne et leur refus de se conformer aux lois et aux règlements préconisés par le ministère pour gérer les mosquées et autres établissements religieux.
Leur seul objectif est de propager « une référence salafiste wahhabite comme si elle était une affaire constitutionnelle », a déclaré une source, parlant au nom de la coordination des imams, à un site électronique.
Delà, apparaît clairement le projet des wahabites pour l’Algérie : lui faire un recul de 14 siècles dans l’histoire !
Tous les moyens sont bons
Pour une entreprise pareille, tous les moyens semblent bons pour ce courant afin d’enfoncer davantage ses griffes. Entre autres procédés, des prédicateurs de renom s’invitent sur le sol algérien pour prêcher leur système. Ainsi le ministère des Affaires religieuses a annoncé, il y a trois jours de cela, qu’il a dû refuser l’entrée en Algérie à nombre d’entre eux d’origine Yémenite, de la Syrie, d’Iran, d’Arabie Saoudite…Ceux-ci ont tissé des liens avec des » sympathisants » algériens qui leur envoient des invitations sous prétexte de tourisme.
L’autre moyen, qui n’est pas des moindres, est le livre religieux sur lequel, le contrôle des autorités laisse à désirer. Le mouvement associatif constitue également, un moyen redoutable pour semer les germes du salafisme parmi les jeunes et les moins jeunes. Nous citerons à titre d’exemple, cette association qui se targue de voiler des milliers de fillettes en bas âge…
Par Hamid Fekhart